***
La musique résonne dans l’immensité…
Elle joue un moment les yeux fermés avant de les rouvrir sur la grande salle de l’Amphithéâtre.
L’odeur saline et le soleil couchant ont laissé place aux fragrances du bois poli et du velours empesé. Le lieu lui est aussi familier que sa propre demeure mais apparaît en cet instant empli d’une atmosphère singulière : la poussière recouvre en couches épaisses piano et parquets et la lumière nébuleuse qui éclaire la vaste pièce semble provenir des murs mêmes.
Le lieu est abandonné.
Froid.
Vide.
Elle frissonne, la sourde absence emprisonnant soudain son cœur de sa main de glace.
La solitude est insupportable.
Elle se lève brusquement, pour se trouver à nouveau face au reflet que lui renvoient les miroirs sans tain qui parsèment l’immense salle vide.
La litanie continue de résonner dans la salle, les touches d’ivoires du piano s’enfonçant doucement, comme muent par d’invisible mains.
Le reflet s’enfonce dans l’Ombre, laissant apparaître deux yeux luisants au cœur l’obscurité.
Elle s’approche doucement, abandonnant dans la poussière les traces de ses pas hésitants.
Sa main se tend vers l’apparition et se fige à quelques centimètres de la surface qu’elle devine glaciale.
De la buée sort de sa bouche.
Les stalactites qui parsèment la coupole brillent faiblement.
De légers flocons commencent à tomber...
Elle lève les yeux vers le dôme neigeux pour s’abîmer dans sa contemplation.
Quand son regard retourne à son reflet, la surface polie des miroirs a disparu.
L’Obscurité l’appelle, aidée des deux yeux brillants qui lui font signe de les suivre.
Elle enjambe cette fois sans hésiter le rebord sculpté qui la sépare de son mystérieux guide et s’enfonce à sa suite dans le noir.
La musique persiste à sa suite.
***