Les Mémoires de Syfaria
La Région de Lerth

Si vous le voulez bien...

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Sujet lancé par Agliacci
Le 12-12-1511 à 19h24
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Posté par Silindë,
Le 11-04-1512 à 21h24
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Agliacci

Le Luang 12 Dasawar 1511 à 19h24

 
Il est trois heures de l’après-midi et jusqu’aux dernières nouvelles, rien ne se passe dans les alentours de Lerth.

… rien ?

Vraiment rien ?
Non, attendez, si, il se passe quelque chose…

Là, oui, là, aux abords de Lerth, une jeune tydale connue sous le nom d’Agliacci se retourne brusquement en arrière pour jeter un regard inquisiteur à un tout autre tydale qui, lui, semble répondre au nom de Silindë…et…et...oui, elle dévisage son postérieur !

Replaçons le contexte de cette histoire.

En réalité, la consoeur était auparavant affairée à faire le tour des environs de la ville, au cas où, sait-on jamais, certaines personnes l’intéressant vivement se seraient cachées pour roupiller derrière un buisson.
Sa recherche n’ayant abouti à rien, l’artiste du Luth avait sagement décidé de retourner vider plusieurs verres au S’sarkh Miséricordieux, et, dans sa générosité naturelle, avait même prévu d’en dédier quelques-uns à l’expédition de folie qui allaient emporter certains symbiosés vers une mort quasi-certaine, avant d’enchaîner sur un concerto improvisé qui serait, sous l’effet d’un jolis amas de verres, du plus bel effet.

C’est donc dans ce contexte que, sifflotant gaiement sur le chemin du retour, les mains dans les poches et sa veste jetée sur l’épaule, les manches de sa chemise retroussées jusqu’aux coudes, l’attitude ab-so-lu-ment nonchalante, la flegme dans toute sa splendeur, Agliacci croise un autre symbiosé, i.e Silindë.

Elle lui jette un regard en biais curieux lorsque son esprit perçoit l’usuelle sensation qui accompagne la présence d’un autre symbiosé, mais passe son chemin sans rien dire ni le saluer.

Néanmoins, et sans aucune raison apparente, la voilà soudainement qui se retourne indiscrètement quelques pas plus loin afin d’examiner avec plus d’attention la face arrière de l’autre symbiosé.

Nul ne sait quelles pensées germent dans son esprit décalée suite à cette observation peu galante, ni quelles idées bizarres la Luthière se forme. D’ailleurs, il est sans doute préférable pour tous de ne pas le savoir. Un petit sourire malicieux – annonciateur des plus grandes catastrophes ! – apparaît sur ses lèvres.

Agliacci remonte le chemin jusqu’à celui qu’elle vient de dépasser et lui repasse devant, avant de se retourner à nouveau pour le détailler.

Puis répète le manège en sens inverse.
Là, normalement, elle devrait avoir attirer son attention. Enfin, elle l'espère, sans quoi cela risque de compromette son plan.
Maintenant elle pose un doigt sur ses lèvres, comme pour indiquer le silence. Et se met à battre du pied sur le sol.

Tap-tap-tap.

Elle sourit franchement et recommence.

Tap-tap-tap-tap-tap…

Et voilà qu’elle lui fait un clin d’oeil maintenant et, toujours sans rien dire, elle va à sa rencontre.

Tap-tap-tap-tap…

Sans donner aucune explication ni lancer aucun salut, et possiblement sans aucune raison préalable, Agliacci a vraisemblablement décidé de faire un petit numéro de claquettes à un innocent symbiosé qui passait par là.

Et au vu du petit sourire espiègle qui l'anime, ça a grand l’air de l’amuser…



Comme si c'était la dernière fois. La première fois.

 
Silindë

Le Julung 15 Dasawar 1511 à 00h33

 
Ledit postérieur dudit Silinde n'avait pourtant rien à se reprocher. Il s'agissait d'une paire de fesses dotées de toutes les caractéristiques et qualités associées habituellement, surmontée d'une chute de rein haut de gamme.


Lowgli dit :
Sil, ne te retourne pas tout de suite, mais je croit que nous sommes suivis émet un mou qui depuis quelques jours s'est décidé à repérer ses collègues. On ne la lui fera pas deux fois d'affilé!


Qu'on le dévisage n'était pas si extraordinaire, non, ça arrivait. Que ce soit son arrière train qui soit l'objet de pareille attention était plus rare -mais là encore, rien de complétement abbérant.

Par contre qu'on passe et qu'on repasse....

Deja...

Il se permet à son tour de dévisager la donzelle qui le déshabille sans pudeur aucune. Un sourire amusé a pris place sur son visage.

L'équilibriste apprécie la vue. Une silhouette ciselée, qui exprime pour le moins une indolence matinée de ... morgue? insouciance? insolence? Difficile a dire.


Tap-tap-tap....


Ouat?

tap-tap-tap-tap...


Là c'est l'incrédulité qui fleurit sur le visage expressif du tydale. Il vient d'entrer dans la septième dimension. Pourquoi pas. Il n'est plus à ça près, et l'absurdité d'une telle scène à de quoi le séduire. Qui n'a jamais eut droit à un numéro de claquettes par une tydale débraillée croisée sur la route dans le coin le plus reculé de Syfaria?

Tellement illogique que c'en devient évident.

Diantre

Au bout du monde, Aglacci lui offre un cadeau dont elle ne se doute pas.

Alors comme on lui a dit de ne pas parler -de peur peut-être de rompre le charme?- il ne dit pas un mot. Mimant un non moins innocent numéro à une symbiosée qu'il suspecte maintenant ne pas être totalement innocente.


http://www.youtube.com/watch?v=D8brJ1S3VXk&feature=related

Et au vu de son visage, le theatre seul l’empêche d'être hilare. Et puis le silence aussi. Sauf le bruit des pieds.



Jusqu'au bout...

 
Agliacci

Le Luang 19 Dasawar 1511 à 19h37

 
Ledit postérieur n’a rien à se reprocher ?

Ah, ça, c’est ce qu’il croit !
A se dandiner comme ça sous le nez des gens, faut pas s’étonner, ensuite, de susciter l’intérêt. Coupable, parfaitement, qu’il l’est, ce dangereux derrière ! Jamais faire confiance à une paire de fesses qui se prétend irréprochable, loi numéro un de la survie sociale ! Ça vous joue le coup de l’innocent et sans transition, vous voilà assistant à une suite de déhanchés tous plus rocambolesques les uns que les autres. Et pas n’importe quels déhanchés, en plus ! C’est qu’il y a de l’histoire là-dedans, de la farce, de la pitrerie, du mime et sans doute un éclair de talent, et Agliacci reste momentanément sur le carreau devant les affres jouasses de Silindë.

Ahein…ouais…bien sûr…je vois…c’est cela…oh.

En fait, pour tout dire, la Luthière est juste totalement prise par surprise par l’habileté de l’inconnu à jouer les mimes. Sous ses airs de fauve nonchalant, une étincelle s’est allumée et elle plisse ses yeux vairons comme pour mieux examiner le numéro qu’on lui fait. Oui, oui…très bien, ça…eh ! joli coup !...c’est qu’il a du rythme, ce petit…le sens de la chute, aussi, une bonne dose de légèreté dans sa caboche, elle en mettrait sa main à couper, et de l’ingéniosité, ouais, sans doute…

L’artiste fait donc potentiellement face à un autre artiste.
Et aussi étonnant cela puisse-t-il paraître, Agliacci en est toute retournée. C’est que certes, elle en côtoie souvent des damnés de l’Art, mais cela n’a rien à voir, elle ne leur appartient pas, elle est quelque chose comme une solitaire marginale de sa propre meute, et puis, enfin quoi, on ne lui répond pas, d’habitude !
La constatation tombe sur elle tel le pot de fleur sur la tête du passant. (« Oh non, pas encore… »)
Ben, oui, d’ordinaire c’est elle qui fait le spectacle, elle toute seule, on ne s’amuse pas à lui rendre la pareille…

Elle ne sait pas trop ce qui la prend alors. De la joie ? Une petite dose de jalousie ? (« C’est ça, fais le malin, mais touche à un cheveu de MON public et je te renvoie direct à tes premiers cours de jonglerie » ?) Dans tous les cas, l’inconnu a définitivement capté son intérêt.

A la fin du numéro de son étrange compagnon, la tydale place une main sur son cœur et mime une demi-révérence. Joli numéro, semble-t-elle dire, le visage radieux et souriant. Mais pourtant, à peine sa jambe est-elle lancée en arrière que déjà elle la fait glisser dans un arc-de-cercle et pivote avec ce qui convient d’appeler de la grâce, ou quelque chose de semblable en tout cas. Son visage pâlit soudainement et elle lève la nuque vers le ciel.

Elle place une main en coupe sur ses oreilles et fait mine d’écouter quelque chose alors que ses pas commencent à esquisser une nouvelle danse dont Silindë serait le centre. C’est d’abord hésitant, un peu frêle, mais très vite cela s’emballe.

Au fur et à mesure que sa danse évolue, la Luthière prend une expression de plus en plus paniquée. Ce qu’elle entend doit la terrifier. Elle va jusqu’à se jeter à terre, c’est pour dire ! Ses traits sont inquiets, ses gestes trop vifs. Elle semble vouloir fuir ; mais celui est impossible : à chaque fois qu’elle tâche de prendre la tangente, la tydale est renvoyé au plancher des braxats par un nouveau pas de danse. Pour finir, comme prenant conscience de son impuissance à sortir de sa situation (qu’elle quelle soit), la tydale tourne les yeux vers Silindë et tend une main silencieuse vers lui. Une invitation à entrer dans la danse dont l’apparence serait l’appel au secours.


Comme si c'était la dernière fois. La première fois.

 
Silindë

Le Julung 29 Dasawar 1511 à 20h47

 
Oh...

Et toc! C'est ça ça la classe postérieure. Non seulement celui du tydale se dandine, se cambre, s'agite et se promène sous le nez de la spectatrice, mais en plus il en est fier. C'est qu'il est content de lui, le bougre.

Et puis avouons le, il y a là de l'orgueil en jeu. Croit elle être la seule à savoir jouer? tututu...L'enfant favori de la Troupe de la Dame -quand bien même il viendrais de remettre sa démission au Semeur des Vents- a aussi son public. Lui qui depuis la fugue de son nerhe a pris sa place comme chef d'orchestre de cette joyeuse bande (au figuré fort heureusement au vu de ses talents douteux d'instrumentiste) s'amuse. Et il ne doute certes pas de lui.
Ton public? Chiche! Impressionne moi, jolie Donzelle, surpasse moi, si tu peux...

Il faut dire qu'il est rare désormais qu'il rencontre des collègues joueurs.

Avec un franc sourire il s’apprête à lui rendre sa révérence quand la jambe se recule, la belle se detourne et souple se tourne. Quelle maestria dans ce mouvement! Grâce, harmonie.
La jambe est menue et le pied fin. La gorge dévoilée est à l'avenant. Mais qu'écoute elle?

Il tend l'oreille aussi, cherchant à percevoir ce chant des stryges. Est ce si terrible que ça?

Palit elle?

Et elle tourne, ses geste parfois saccadés. Tente elle de partir ? Elle en est incapable.

Et lui? Lui vers qui se tend cette main, que pourrait il faire?
Aller, courir à elle? La relever? Briser le cercle qui la retient prisonnière?

Peut-être. Sans doute.
Il aimerait bien en tout cas. Et puis, il ne peut, ne sais et ne veux pas résister à la demande d'Agliacci.


Il tends un main vers elle...
(hrp:commencer à 10mn40)

Mais que peut une marionnette?
C'est de cela qu'il s'agit. As t'il une liberté de mouvement? Une main veux se tendre vers celle de la tydale. La delivrer du piege où elle s'enlise. Malheureux. Il se fige. Les yeux se voilent, une ombre y est passée. Viens il de voir retomber le balancier de quelque horloge immense? Ou bien un Sablier qui atteignant son dernier grain est immédiatement retourné -hors de question de perdre un instant. Un Temps?

Les bras retombent, s'elevent. Les mouvement esquissés ne mènent nul part. Corps, jouet d'un autre? Pantin qui se met à virevolter au grès de ses fils.

Funambule hypnotisé par ses propres fils.
Spectateur de sa propre danse.

Et cette main qu'il voudrait, qu'il aurait voulu saisir...

Ses mouvements ne sont plus vraiment les siens, Pinocchio dont le regne sur lui même est balbutiant.

Lowgli dit :
Charlot...
Commente un mou qui, par discrétion s'est réfugié sur un arbre.



Jusqu'au bout...

 
Agliacci

Le Dhiwara 15 Jangur 1512 à 16h37

 

La paupière baissée comme un store, le visage effilé et tendu, Agliacci retient son souffle et navigue en silence dans les parages du corps comme rendu fou de Silindë, à la manière d’un squale.

Un instant elle désire se retirer de la scène, uniquement pour contempler cette désarticulation physique dont fait montre l’inconnu. Que ne faut-il être souple pour lui servir ce numéro comme sur un plateau, au hasard d’une improvisation, sans échauffement préalable ! (Alors qu’elle-même sent que niveau musculation, y a comme qui dirait un petit flanchement…) Comme elle aimerait ne rien montrer de son agréable surprise, de sa réelle fascination pour le travail apparemment sans efforts et sans accrocs que donne à voir Silindë !...Elle a bien fait de provoquer ce dernier. Il a visiblement quelques surprises en réserve.

Oui, c’est cela : il donne à voir…et quelque chose répond en elle ; cette partie enfantine et attendrie d’elle-même qui demande à s’asseoir, là-bas par exemple, à rire et à applaudir des deux mains et à demander : « Encore ! La suite ! »
Elle sourit. « La suite… »

Elle bondit en avant et place sa jambe de manière à contrecarrer un des pas de danse de Silindë. De là à dire qu’elle tente de lui crocheter le pied, il n’y a qu’un pas…

Elle s’amuse à interférer ainsi pendant quelques secondes dans les gestes de l’inconnu, le fixant intensément, un sourire léonin en bandoulière un peu comme d’autres garderaient une dague sous la main ; et soudainement, elle tend sa main vers le col du danseur qu’elle agrippe et attire fermement à elle.

Cela nécessite probablement quelques explications. Pourquoi ce geste aussi soudain qu’inapproprié ? Est-elle réellement assez forte pour traîner un tydale contre son gré par le revers de ses vêtements ? Quels trucages ont été mis en œuvre pour réaliser ce numéro ?

Exactement le type de questions qu’en ce moment même, Agliacci ne se pose pas.

Cette dite main passe presque aussitôt sur la nuque du danseur. La Luthière débute un pas d’une valse qui s’annonce plutôt rapide, et qu'elle tient apparemment à partager avec le muet inconnu.


Comme si c'était la dernière fois. La première fois.

 
Silindë

Le Merakih 18 Jangur 1512 à 01h57

 
Où serait la beauté, la magie de la chose si tous les trucs étaient dévoilés? Donc se contenter d'en profiter est une attitude pour le moins normal, sinon celle de celui qui ne veut pas arreter de rever simplement pour connaitre que les rouages.
C'est celle de Silinde. Et visiblement, celle d'Agliacci aussi.

Il savait combien les illusions sont trompeuses et preferait ses illusions à la réalité.

L'illusion donc manque de faire un faux pas avec traitre pied qui viens presque se placer là où il ne faut pas. Brisure suplementaire : celle de l'equilibre precaire qui était apportée par le mouvement. Rattrapage in extremis. Et voila qu'elle recommence. Mais elle exagere!

Non, en fait il adore.

Comme quoi il suffit que l'un s'enferme pour que l'autre se libere. Et vice versa.

Inconnus l'un pour l'autre, et aussi silencieux que souriant les deux artistes continuent leur étrange jeu. Et les regards sont plus parlant que n'importe quel mot qui paraitrait, peut-être, d'une banalité affligeante. Et puis, que dire qui ne puisse pour l'instant pas être exprimé par des gestes.

La petite danseuse qui l'a arreté sur le chemin en passant et repassant devant lui parait aux yeux de l'artiste une liqueur pleine d'un nectar delicieux, qui vous desaltere et vous rejouit l'ame autant que les levres. Vivante.

Bon, d'accord. Il aurait presque envie de lui tirer la langue. Il est juste un peu trop occupé pour le faire là.

Terpsychore donc l'attire à elle. Guere difficile. Il se laisse faire de toute maniere.

Hein quoi une... valse? Pour les premiers pas, c'est elle qui guide. Il lui laisse imposer le rythme, le choisir. La transition est moins souple, il faut à Silinde le temps pour l'integrer.. mais ensuite... Le tydale a posé une main dans le dos de la tydale, l'autre s'est emparée de sa jumelle. Il la tiens comme on saisirait un morceau de vent, du bout des doigts, sachant qu'il va se réenvoler d'ici quelques tours.


Et ils commencent à tourner

Les pupilles anthracites plongent dans les yeux vairons. Sa princesse aussi a les yeux differents. Ca ne le change pas tant que ça. Sauf que ceux là sont emplis de bien plus de malice que les autres. Ils en rivaliseraient presques avec les siens. Diantre. Une concurente. Oui, bon, ça on le savait deja. Et puis des comme ça, il est pret à tout pour en avoir. La danse, et Agliacci.
Un deux trois, un deux trois. Et on fait tourner sa partenaire.

La danse est un partage, une complicité. Un échange. Et tandis qu'il mene la danse, il ne la lache pas du regard. Le sourire a depuis longtemps atteinds les yeux. Il guide, elle suit. Silinde ne doutait pas qu'elle le ferait de toute maniere...

Ralentir. Il n'a pas envie de la lacher. Qui en aurait envie? Mais deja la valse touche à sa fin et... il n'est pas tellement d'attaque pour un second round.

Ils n'ont toujours pas dit un mot.


Jusqu'au bout...

 
Agliacci

Le Merakih 15 Fambir 1512 à 19h36

 
Tout d’abord, le corps.

L’activation sereine des poumons dans ce léger thorax, la chaleur des muscles qui roulent sous l’épiderme, la machinerie complexe des tendons et la fluidité des articulations qui pas une fois, pas une seule fois, n’ont ici laissé à désirer.

Combien d’années, combien de fichues années passer à danser pour en arriver là : la légèreté chaude d’une main entrelacée dans la sienne, la présence indéniable et réglée d’un corps mâle qui tantôt la frôle mais jamais ne la touche, le mouvement anticipé des chevilles, un inconnu croisé à l’orée d’un passage…

Puis, le silence.

C’est vrai, elle n’a toujours rien dit. Pas pipé un mot, un seul. Le bruit simple et court de sa respiration et le frottement des pieds contre le sol est la seule indication de sa présence sonore.
Est-ce que ça ne vous fait pas comme un sentiment bizarre, indescriptible, un silence pareil ? Une sorte d’excavation doucereuse dans la poitrine. A moins que ce ne soit la fin de la danse, la clôture annoncée du mystère. Agliacci n’en est pas sûre : avec les folies de ce monde, un rien est possible…

Mais tendez l’oreille ; ouvrez les yeux ; il y a quelque chose, dans cette façon de mouvoir son corps avec la précision de l’expérience, une manière différente et subtile avec laquelle le visage compose ses traits…

Le monde n’arrête jamais de bruisser.
N’en déplaise aux paroles elles-mêmes, étant donné les habitudes que dans tant de bouches infectes elles ont contractées, il faut un certain courage pour se décider non seulement à écrire, mais même à parler. Parfois, lorsque la volonté fléchit ou s’esquive, il faut chercher les signes ailleurs…

Dans le regard étrange qu’Agliacci rend à Silindë, par exemple.
La contraction infime de sa mâchoire inférieure.
L’allégement de sa prise.
Presque indiscernable, cette accélération de la respiration qui se voudrait contrôlée.
Le pli courbe des lèvres.

Qui sait. Ce qui se passe sous le crâne d’une Luthière…

Ensuite, le mouvement.

La brisure, plus exactement. Un peu farouche, un peu fougueuse, totalement bravache, Agliacci s’écarte avec brusquerie – mais sans trop s’éloigner néanmoins - de Silindë, rompant la danse maladroitement et déniant à celle-ci la possibilité de se finir sur une note plus douce.

C’est évidemment fait pour le surprendre. Mais ce qui est le plus surprenant, c’est peut-être la manière dont elle englobe son visage dans ses mains et se presse impétueusement contre lui pour l’embrasser.


Comme si c'était la dernière fois. La première fois.

 
Silindë

Le Merakih 11 Astawir 1512 à 21h24

 
La langue, elle, dit bien ce que bon lui semble. Qui donc lui ferait confiance? Chez certains elle est pure et claire. Et à mourir d'ennuis. Chez d'autres elle est joueuse, roublarde. Suave et enjôleuse.

L'entropiste ne croirait pas. Il se sait menteur et n'en éprouve aucune honte. Pourquoi le devrait-il? Les mots sont son terrain de jeu. Sont-ils aussi celui de la petite tydale?

Les corps sont un moyen d'expression bien plus dur à travestir. Le véritable menteur est celui qui contrôle chacune des réactions de son corps. Tous ces petits indices imperceptibles à l'œil et pourtant si criant de vérité. Il n'en est pas encore là. Pas quand il ne le désire pas. Le jeu n'est pas drôle quand il ne peut être battu. Et la victoire sans jeux n'a pas de saveur. C'est le vide sous leur pied qui donne envie de tourner. Même si du vide, il en a vu plus qu’il ne le pensait ces derniers temps.

L'artiste guide. Ses doigts legers sur la taille fine de la danseuse. Sous la chemise, il perçoit les muscles fermes de la luthière. Que joli corps! devine-il. Quels jolis yeux! Il doit être doux de les contempler au réveil sans forcément savoir quel paysage admirer. Sauf que, se corrige-t-il, l'œil risque de lorgner bien plus au sud.

Perturbation. As t'il manqué un pas? Elle se dégage. Silinde hésite. Une moue interrogatrice commence à se former sur ses traits et peut-être pour la première fois s'apprête il à parler. Et bien non! Il a du être décrété par une instance supérieure qu'il n'en placerait pas une.

Il n'avait pas vraiment prévu ça. Enfin il y avait pensé, mais pas sérieusement. Et tandis que ses deux mains rapprochent leurs deux visage, il ne songe qu’à l’ instant. Ne vit qu'à l'instant. Et clos à demi les yeux une fois la surprise passée. Pour mieux se concentrer sur les sensations que lui renvoient ses levres. Et le frisson délicieux qu'elles éveillent en lui.

Un pas en arrière. Deux pas. L'intérêt de l'herbe au bord de la route qui lui apparait de plus en plus évident. Et tandis qu'il a passé ses bras dans le dos de la confrère, pour l'empêcher de fuir peut être ou simplement pour le plaisir de la toucher, il se laisse tomber en arrière, l'entrainant avec lui. Silinde sert de matelas quoi, d'amortisseur.. Et libérant ses lèvres des siennes, il a le sourire ravis de ceux qui viennent de voir réussir leur plus beau tour.

Un rire quelques instants. Leger -pour la première fois depuis un moment.


Hajar toi.

En fait si, il a parlé. Il ignore d'où elle vient ou qui elle est. Alors c'est leur langue maternelle qui lui vient aux lèvres. Si elle ne comprend pas, tant pis. Il s'en fout. Retourner voler un nouveau baiser sur ces lèvres est bien plus intéressant.


Jusqu'au bout...

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