Les Mémoires de Syfaria
La région de Kryg

Les Déclinantes

Le crépuscule des deux
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Sujet lancé par Sadr
Le 14-03-1512 à 18h34
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Posté par Sadr,
Le 21-03-1512 à 17h52
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Sadr

Le Merakih 14 Marigar 1512 à 18h34

 
*** Il y a bien longtemps... ***

*** Le Matriarcat était peuplé d'héroïnes. Syfaria toute entière vibrait de leurs insolences, de leurs audaces, de leurs exploits.
Aujourd'hui, foin d'héroïnes. Place aux hérauts.

Lorsqu'elles se croisent, elles se reconnaissent.

Leurs regards sont fuyants, féroces, terribles. Elles feulent, leurs mots s'écorchent, leurs pensées se fracassent. Elles veulent partir en reines, les Déclinantes, car elles entendent l'hallali !
Alors, elles se crispent. Ou elles ploient, gracieusement.
Dans l'attente d'être servies.

Certaines vivent le dernier acte sur scène. Dans un collapse bruyant, malodorant, laid à faire peur, elles sombrent. Elles meurent. Parce qu'elles meurent, oui. Mais elles n'entendent point partir seules.
D'autres le vivent in utero. Elles s'étiolent, se dessèchent, se fanent. Leur peau, déjà, s'évapore. Elles sont suie, elles sont fumée. De la mort, elles n'attendent rien, car précisément : la mort n'est rien.

Le corps en pièces, l'âme en charpie...
Lorsqu'elles se croisent, elles se reconnaissent.

Et ce soir, elles se croisent. ***




Horoscope de Jayar

 
Pentar

Le Merakih 14 Marigar 1512 à 20h47

 
Crépuscule. Aux portes de la Citadelle.
Pentar s'approche d'une fine silhouette affairée à désherber la muraille.
Elle identifie cette dernière comme étant son interlocutrice.
Sadr. Une inconnue.

Ne l'a jamais rencontré. Et le consensus n'est pas son domaine.
Peut-être une nouvelle télépathe. Surement.

Elle crache par terre. Comme pour signaler sa présence.
Sculpturale, la tydale est aussi sale et débraillée.
Du sang, de la sueur, de la poussière et des cendres.
Un équipement qui part en morceau.
Comme d'habitude, elle chassait.
Loin. Dans les ténèbres.

Rien ne la lie à la civilisation.
Tentative de s'ordonner dans un monde sans avenir.
Une mince pellicule sur un chaos brûlant.
Elle ne sera belle que dans sa chute.

Elle ne vient jamais ici. Le moins possible.
Là, on veut lui parler. Elle n'aime pas ça.
Mais cela fait longtemps qu'elle n'a pas vu quelqu'un.
Sinon des ombres sur les routes, dans les forêts.
Là, c'est une Soeur.

Quand l'astrologue se retourne, elle la salue d'un hochement de tête.
Elle range une lame rouillée dans son fourreau.
Les armes sont pour le monde.

Son visage est fermé. Son corps est fermé.
Seuls ses yeux parlent.

Ils parlent comme un brasier.
Pas un brasier de passions.

Un brasier froid, de destruction et de mort.
Un brasier qui consume sans réchauffer.
Un brasier qui tue.
Et attend.


Ferme ton clapet, béjaune, de toute façon tu vas bientôt pourrir. Et en silence.

 
Sadr

Le Merakih 14 Marigar 1512 à 22h15

 
*** Sadr se retourne, avec lenteur.

D'abord, parce que son corps la trahit, dès qu'elle prétend le hâter. Ensuite, parce que le crachat mérite d'être pensé. On ne se signale point ainsi sans une bonne, une excellente déraison.

Les traits durs, le regard abyssal et l'expression âpre de la tydale hurlent son extrace : de toutes les tueuses dont la faction s'enorgueillit, Pentar n'est sans doute point la plus rapide, la plus capable, la plus terrible. Si leur tableau de chasse leur tenait lieu d'estrade, certaines faucheuses feraient de l'ombre à l'Artisan lui-même ! Celle qui fait face à l'enfant-nuit n'est point de cette eau-là. Il y a plus féroce, il y a plus dur...

Pourtant, quelque chose s'éveille en Sadr. Pentar n'est certes pas la pire qui soit, non...
Mais c'est la plus... ***


Pure !

*** Elle ne dit qu'un mot, c'est celui-là. Puis, comme si de rien n'était, pointe les herbes glauques qu'elle arrache à la muraille ***


Je cueille des Calanthes. Elles ne fleurissent qu'entre Silith et Drajl. Leur infusion, bue sous deux lunes - peu importent lesquelles - favorise les rêves prémonitoires.

*** Précisant le terme, pour une personne qui n'en connait point forcément le sens ***


En clair, les cauchemars.

*** La liadha range les plantes rêches dans sa besace ***


Hajar, Coupeuse de vie, Déclinante Pentar.

Un jour prochain, je vais sortir de Kryg. Mais je ne peux pas, aujourd'hui. Je mourrais trop vite, de façon grotesque et factice. C'est trop tard, et c'est trop tôt. Je dois attendre, physiquement.
Spirituellement, c'est une autre affaire.
Il se passe quelque chose, hors-les-murs. Quelque chose que je dois voir.

Je pourrais le demander à n'importe qui...
Mais j'obtiendrais n'importe quoi.


*** Le regard de Sadr est fuyant, ses yeux deux civelles. Elle donnerait cher pour lire l'Aura de la tueuse, ne fut-ce que pour pouvoir...
La révélation lui vient d'un coup, comme une giffle ! Aussitôt, ses priorités s'inversent. Elle en lâche son sac, pensant à voix haute ***


Oh. Tu as...

*** Un ange passe ***


Ton sang est référent. J'en suis sûre.
Offre-m'en une goutte.


*** L'enfant-nuit devient grave ***


Puisque les mots mentent, qu'il parle.




Horoscope de Jayar

 
Pentar

Le Merakih 14 Marigar 1512 à 23h41

 
Elle observe l'astrologue.
Une créature délicate, songe-t-elle.
Avec un esprit profond et puissant.

Elle ne cherche pas à comprendre ses mots.
Il y a des idées complexes derrière. Les idées complexes la troublent.
Non qu'elle soit bête. Mais elle préfère l'instinct.
Les actes et les choses concrètes.
Elle laisse les idées à celles qui savent les manier.

Elle s'essuie le menton d'un revers de manche.
Et après un souffle, plonge un doigt dans une blessure fraîche.
Sur son ventre nu. Souvenir frais d'un affrontement avec un assulter.
Puis elle tend l'index plein de sang à la jeune fille.

Elle grimace un peu avant de parler.
Sa voix est usée par le silence.

C'est dehors que se passent les choses.

La guerrière regarde un instant les étoiles.
Et revient sur le visage de la fille.

Tu es belle.

Comme un abîme.


Ferme ton clapet, béjaune, de toute façon tu vas bientôt pourrir. Et en silence.

 
Sadr

Le Julung 15 Marigar 1512 à 18h50

 
*** Si Sadr savait comment faire, elle sourirait. ***


C'est la grossesse qui nous rend belles.

*** Pointant le ventre blessé de la guerrière, puis son propre front : ***


En actes comme en pensées, nous portons le Déclin. Un jour, un jour prochain, nous accoucherons.
Alors,
Nous serons belles à tutoyer les dieux.


*** S'avançant, elle prend la main de Pentar et la porte à ses lèvres.
Une perle de rubis lui suffit.
Les plus grands médecins, dit-on, établissent leurs diagnostiques de la façon la plus directe qui soit : tels des nez, des chefs toqués, des œnologues, ils goûtent les viles humeurs de leurs patients, ils flairent leurs selles, boivent leur urine. Tous les sens aux aguets, ils pistent le mal, le traquent et le débusquent, dans le seul but de...

Le nommer.

Car ce qui est nommé peut être défié.

L'enfant-nuit veut savoir, bien sûr. Mais surtout, elle veut voir. Et cela passe par boire.
Le sang de Pentar explose en bouche. Il est concentré, comme ces vins dont le triste raisin n'a jamais vu le soleil... et vous le fait payer. Il est gorgé de terre, de fer et de malheur.
Ce sang, c'est de l'or noir, de l'huile de naphte : laid, sombre et mort, il ne demande pourtant qu'à s'embraser.

Sadr s'essuie de la paume, se traçant un sourire de Joker. Elle s'appuie d'une main faible aux moellons et, luttant contre l'ivresse, dit d'une voix rauque ***


De l'Ether, de la terre... une langue de feu, et de l'eau sale...

*** Vertige ***


Ton Aura est souveraine.

Tu portes un manteau de Salamandre, mâtiné de mer. La Terre étouffe le Feu, la Phlogistique est amendée par l'Eau. Tu es laborieuse, pugnace, ouvrière, dans ton œuvre de mort. Tu t'adaptes, opiniâtre, et ta route balafrée s'encombre de charognes.

Ton élément-maître n'est pas l'Ether, le contrôle : il est le Vide. Oh, comme il te ronge... te tyrannise... te définit ! Bien des filles se vantent, car elles portent les ténèbres. Toi, les ténèbres te portent. Sous ton armure de peur et de crasse, tu déclines, superbement.

Finalement, tu es comme les autres...
Mais tu hais comme personne.


*** Enfin,
les yeux de Sadr se posent sur Pentar ***


Je te vois, maintenant. Et je peux te nommer.
Pentar...

La Valkyrie.


Horoscope de Jayar

 
Pentar

Le Vayang 16 Marigar 1512 à 15h08

 
Elle ne comprend pas tout.
Mais elle comprend la poésie. La sent.
La vérité qui chante, qui caresse.
La vérité qui s'exprime.
Absconse.
Mais sensible.

Son impression se confirme.
Sadr lit dans les astres, les âmes, les fluides.
Un esprit puissant et profond.
Des idées complexes.

Elle ne lit que dans le fer des armes.
Cela lui suffit. Le fer juge.
Le fer exécute.

La Valkyrie.

Elle répète, pensive.
Comme pour donner du sens.
Cela lui échappe.

Pour elle, le nom n'est qu'une formalité.
Ce qui est voué à disparaître ne devrait pas être nommé.
Le nom c'est l'éternité, une malédiction, c'est fixer les choses.
C'est les maintenir au-delà de leur existence.
Et leur existence est éphémère.

Mais elle lui fait confiance.
C'est elle l'astrologue, la pensée.
Elle doit en avoir besoin.
Elle doit savoir.

Elle, elle n'a pas besoin de nommer.
On a pas besoin de nommer ce qu'on tue.
Ce qu'on tue n'a pas à l'être.
Ce qu'on tue n'est plus.
N'a jamais été.

Pentar s'assied sur une grosse roche.
Et sort d'un sac un peu de nourriture.
Du pain et un morceau de viande.
Elle croque et mâche.

Après un moment de silence.
Elle regarde Sadr. L'observe de nouveau.

Je ne vois pas comme tu vois.
Je suis aveugle.

Tu sais qui je suis.
Dis-moi qui tu es.


Ferme ton clapet, béjaune, de toute façon tu vas bientôt pourrir. Et en silence.

 
Sadr

Le Vayang 16 Marigar 1512 à 22h54

 
*** Telle une poupée de chiffon, la sybille s'affaisse, lentement. La voici accroupie, à hauteur de Pentar.
Elle peut la regarder, désormais, et ne s'en prive pas.

De loin, l'on pourrait croire qu'elle a trop bu et qu'elle pisse à la hussarde, étourdie de mauvaise bière. Et de fait, elle est saoule. L'ichor ardent de la Coupeuse lui dévore l'esprit. Elle grimace, tremble soudain, semble chercher ses mots, s'affaiblit ***


Ton manteau... est un peu lourd pour moi...
Attends, attends...

*** Ses yeux se révulsent. Son visage, d'ordinaire serein, se tord brièvement. Elle soupire, en demande de sursit, en manque d'oxygène, en quête d'indulgence.
Enfin, les paupières closes, elle souffle péniblement ***


Qui suis-je ?

Je l'ignorais, jusqu'à ce soir. Puis tu es venue, et je t'ai vue.
Et j'ai compris :
Je n'existe que pour voir...


Je suis témoin.

*** Sadr lève une main, ébouriffe les étoiles ***


Ce monde est une farce. Une farce atroce.
Son histoire est le Déclin, son dessein est le Tableau.

Toi, la fleur de guerre, la sœur tydale, la Valkyrie, la grande Faucheuse, tu es l'actrice. La jeune première. Celle qui écrit la pièce, celle pour qui la pièce s'écrit. Tu seras présente lors du dernier acte, et pour cause : ce dernier acte sera le tien. Tu frapperas, une ultime fois, et Syfaria elle-même succombera...

Moi, la fleur de serre, la sœur infirme, faible astrologue, je suis témoin. Je suis là, spectatrice sidérée, pétrifiée d'horreur, crucifiée d'admiration, bouleversée dans ma chair et mon âme par ce que je vois ! Je serai là, au dernier acte, lorsque tu frapperas...

Alors, la vanité de toute chose nous sera révélée.
Et s'il m'est donné, s'il m'est permis de le faire, avant que l'espace et le temps ne s'anéantissent...

J'en témoignerai.


Horoscope de Jayar

 
Pentar

Le Sukra 17 Marigar 1512 à 13h41

 
Un instant Pentar cesse de manger.
Stoppée dans son mouvement par les murmures.
Encore une fois elle a le sentiment que des choses lui échappent.
Mais l'essentiel la frappe de plein fouet.

Et quand les choses la frappent de plein fouet...
C'est rarement des paroles.
Là, pourtant, elle cesse de respirer.
Se perd dans les yeux de l'astrologue.

Elle voit la fièvre de Sadr.
Elle saisit le bruissement visionnaire.
Comment contaminée, un léger vertige l'étreint.
Puis après une seconde fronce les sourcils.
Les yeux de Pentar sont brillants.

Une lueur. Petite et lointaine, mais...
D'une intensité incroyable.

La fille lui promet le seul rêve qui lui reste.
La seule chose qui compte vraiment.
Cela lui semble impossible.

Elle s'était faite à l'idée. Au supplice, à la douleur.
Noyée dans le fer et la sauvagerie.
Dans la ruine et le sang.

Flotte le silence, l'incertitude.
Ce même silence qui succède au tonnerre.
Ponctue la paralysie.

Quand elle parle, sa voix est incertaine.
Jure avec ses mots tranchés, son timbre de roche.
C'est une gamine qui parle.

Nous...nous verrons la Chute ?



Ferme ton clapet, béjaune, de toute façon tu vas bientôt pourrir. Et en silence.

 
Sadr

Le Sukra 17 Marigar 1512 à 21h53

 
*** La réponse fuse, instantanée ***


Oui, oh oui !

Lorsqu'elle surviendra, nous serons là.
Nous toutes ! Toi, moi, nos paires ! Notre génération verra, vivra la chute !
Je le sais depuis...


*** Sadr désigne son mou ***


Vois mon Ombre, ma petite Ombre... elle souligne ma souillure, mon indignité. Elle me prive de la seule liberté qui soit, la seule qui vaille : la mort. Nous autres, filles du Déclin, savons depuis longtemps que le trépas est une libération. Par conséquent, la symbiose est un outrage, une abomination !

Mais si l'on creuse la question, si l'on oublie ce qu'elle nous fait pour s'attarder sur ce qu'elle nous promet...


*** Intensément ***


... elle nous enchaine, nous ancre en ce monde. Elle nous cloue sur Syfaria !
Désormais, telles des papillons punaisés dans leur boite, nous ne pouvons plus nous échapper... nous enfuir... nous dérober...

Comprends-tu pourquoi ?


*** Confidente, enfiévrée ***


... parce que la fin est proche.

La symbiose est une étape majeure du Déclin. Elle signe l'avènement du Tableau.
Elle nous dit que la mort n'est plus une option. Plus maintenant.

Elle garantit que nous vivrons jusqu'à la chute.


Horoscope de Jayar

 
Pentar

Le Luang 19 Marigar 1512 à 20h22

 
Pentar n'a jamais considéré la chose sous cet angle.
Pour tout dire, elle n'a jamais vraiment considéré la chose.
Comme quelques autres avant elle, elle s'était retrouvée télépathe du jour au lendemain.
Et ne voyant aucune réponse à ce mystère, s'en était accommodé.
Comme on s'accommode d'une étrange maladie.

La Coupeuse se gratte la tête, pensive.
Le don absurde de l'immortalité engendre la promesse d'un futur.
Or, pour le Matriarcat, le seul futur qui vaille, est celui de la Chute.
C'est une perspective intéressante.
Presque réjouissante, d'une certaine manière, si on a de la patience.
La patience, encore, de devoir attendre cette Chute.
Une patience que les Déclinantes ressentent comme une amère souffrance.
Un temps rêvé, désiré, mais impossible. Plus douloureux encore.
Un temps que Sadr dit être proche.

Mais les astrologues parlent souvent d'un temps astral, céleste.
Une autre notion du temps. Beaucoup plus longue. Trop longue.
L'échelle temporelle de l'univers qui tourne et se déploie n'est pas celle de Pentar.
Le rythme de la guerrière est celui du loup, du sanglier, du monstre.
Celui de la chasse et du massacre.

Elle n'envisage rien au-delà de l'immédiat. Ou si peu.
Elle ne le fait pas, car sinon, cela la trouble.
Et lui rappelle trop la vacuité de toute chose.

Cette réflexion, déjà, lui fait mal.
Plus mal que n'importe quelle douleur physique.
Dans la douleur physique, elle devient plus féroce encore.
Mais avec ce genre de maux, elle se sent faible et perdue.
Son regard s'assombrit. Un éclat ténébreux.

Il faut parfois mieux rester dans la souffrance d'un rêve inatteignable.
Que de s'embarquer dans des spéculations illusoires.
Peut-être plus douloureuses encore, car neuves.
Une douleur nouvelle est toujours plus vive qu'une souffrance ancienne.
Une souffrance ancienne, on s'y habitue, on vit avec.
Et ce vide antique, finalement, nous structure.

Mais encore une fois, Pentar considère Sadr pleinement.
C'est elle qui voit. Qui pense. Elle voit si mal, pense si peu.
Ses armes voient pour elle, son instinct pense à sa place.

Pourtant...

Pourtant, rien ne prouve la permanence de la symbiose.
Bien de nos soeurs, un jour télépathe, ont, du jour au lendemain, perdu leur don.
C'est une aiguille qui nous cloue, facilement retirée.
Si le phénomène s'interrompt brutalement.
Si nous perdons notre mou.
Toi ou moi.

Alors nous ne verrons pas la Chute.
A moins qu'elle soit imminente.
Mais l'est-elle ?

La symbiose protège de la mort.
Jusqu'à ce qu'elle cesse.
Qu'elle décline.
Non ?


Ferme ton clapet, béjaune, de toute façon tu vas bientôt pourrir. Et en silence.

 
Sadr

Le Luang 19 Marigar 1512 à 22h32

 
Oui.

*** Une tristesse infinie envahit la sibylle. La douleur de Pentar a son écho. Le dialogue se passe aussi à ce niveau. ***


Toute malédiction se mérite.
La symbiose n'abandonne pas : elle est abandonnée.

Quelques-unes, trop rares parmi les nôtres, se sont interrogées : pourquoi nos vies sont-elles ainsi prolongées, jusqu'à l'absurde ? Pour tuer davantage ? Pour souffrir plus encore ? D'aucunes, inconscientes de l'enjeu, ont renoncé. Elles n'ont vu que la surface, lors que le don maudit est un abysse insondable. Elles n'ont vu que les pouvoirs, la télépathie, la puissance, les sortilèges... autant de colifichets, de gadgets, de leurres.

Ces pouvoirs sont une mystification. Ils sont la peau qui nous cache le cœur. Ils ne m'abusent point. Je les refuse, ma sœur. Je les refuse avec une force...
Si tu savais, si tu savais !


*** Baissant les yeux sur son corps de porcelaine ***


Je les refuse si fort que le Déclin m'écoute...
La symbiose ne me renforce en rien. Regarde-moi. Faible j'étais, faible je suis. Je suis portée par la foi, parce que le Tableau m'attend...


*** La tristesse se fait piété ***


Tu es symbiosée parce que le Tableau croit en toi. Alors, crois en lui.
Crois en lui et tu chuteras.


*** L'expression de Sadr change. L'extase le cède à la crainte. ***


Un jour prochain, je quitterai la ville.
Je partirai sur les routes répandre le Déclin. Je veux qu'il frappe à l'âme, plus qu'à la chair. Je veux jouer mon rôle, si médiocre, si dérisoire soit-il...


*** Timide ***


M'aideras-tu ?

Horoscope de Jayar

 
Pentar

Le Matal 20 Marigar 1512 à 14h24

 
Pentar acquiesce, le regard fixe.
Cela fait sens. Les idées s'emboîtent bien.
Elle aime ça. Que les choses soient claires.
Le doute est l'ennemi. Le doute trompe et affaiblit.
De nouvelles certitudes naissent et grandissent.
Productrices d'énergie. De volonté. De force.

Elle reprend sa tâche. Se nourrir.
Croque. Mâche. Avale.

Elle est plus à l'aise quand il s'agit de concret.
La porcelaine veut quitter la ville, découvrir le monde.
Point de projet plus louable et formateur.
Pentar acquiesce de nouveau.

T'aider ? Oui.
Mais t'aider en quoi ?


Elle relève les yeux vers Sadr.
Jouer aux gardes du corps, sans doute.
La guider sur les routes aussi.
Mais elle veut l'entendre dire.

Si ceci est un contrat, et cela y ressemble.
Elle en veut les termes exacts.

Pentar n'aime pas les promesses.
Les promesses sont faites de paroles.
Les contrats sont faits de sang.
Le sang ne ment pas.


Ferme ton clapet, béjaune, de toute façon tu vas bientôt pourrir. Et en silence.

 
Sadr

Le Merakih 21 Marigar 1512 à 08h32

 
*** Pentar dit :
Oui.

Sadr ne sourit point, mais ses yeux en amande s'étrécissent et s'éclairent. C'est bref, c'est curieux, ça lui fait une tête de clown triste, de Pierrot lunaire. ***


En vérité, tu n'as pas attendu. Tu m'aides déjà.

Notre rencontre m'a éclaircit l'esprit. Mes idées sont plus nettes, plus sûres. Tu m'as permis de mettre des mots dessus ; je sais que tu t'en méfies, mais pour moi, ils habillent, ils étoffent la pensée. Je n'ai point ta féroce emprise sur les choses. Je vis dans un monde de signes et de symboles.

Lorsque je sortirai, tout me sera prétexte de mort. Melancholia me dit souvent : bien énervé, même un chaton pourrait te terrasser ! Elle m'encourage, dans mon souhait de tailler la route. Mais j'ai surtout besoin d'un regard, lucide et affûté, car j'ignore ce qui m'attend.

Oh bien sûr, j'ai lu des livres, j'écoute le consensus. Mais...


*** Mais ça ne vaut rien. Pentar conclura sans peine. ***


Si je marche avec toi, tu sauras qui fuir et qui tuer. Je périrai moins souvent.

*** La fraicheur de la nuit taquine les peaux. Un silence s'installe.
Puis ***


Nous sommes si différentes que ce moment est beau.

Horoscope de Jayar

 
Pentar

Le Merakih 21 Marigar 1512 à 13h55

 
La Coupeuse achève son casse-croûte.
Elle contemple les étoiles un instant.
Profite du silence qui s'installe.
Prend une respiration.

Puis elle se lève et s'étire.
Rouillée par trop d'immobilisme.

Ce qui t'attend, petite porcelaine ?
Le bruit et la fureur.
Ce monde est un corps malade et corrompu.
Mais il est beau dans sa déchéance.
Tu aimeras.

Peut-être pas les crocs et les griffes.
Peut-être pas le sang et les larmes.
Mais le reste.

L'horizon.
La nature et les cités.
Les proies et les prédateurs.
Les effluves et la poussière.
Qui tuent et cohabitent.
C'est une danse.
Un ballet.

Sous les étoiles.


Elle fait craquer quelques os.
Se masse le cou.
Soupire.

Je vais m'en aller, Sadr.
Quelques nuits dans la Citadelle.
Je vais voir si il y a des missions.
Même si je préfère la solitude.

Je vais voir.
Et je repartirais.
Loin.


Son visage marmoréen esquisse une ombre.
Un sourire, peut-être. Rien n'est moins sûr.

Nous nous reverrons, petite soeur.

La tueuse ne bouge pas.
Elle profite d'un moment de quiétude.
Rares dans son existence agitée.
Puis se dirige lentement vers la cité.
Elle n'aime pas la ville.

Mais il faut qu'elle leur rappelle.
Qu'elle existe. Encore.

Après quelques pas, elle se retourne.
Le fantôme n'a pas bougé.

Tu es belle.


Ferme ton clapet, béjaune, de toute façon tu vas bientôt pourrir. Et en silence.

 
Sadr

Le Merakih 21 Marigar 1512 à 17h52

 
*** Sadr suit Pentar des yeux.

Elle ne bouge pas, colonne cariatide de verre et de mercure, presque phosphorescente sous l'obscure clarté tombée des étoiles.
A la Valkyrie qui s'éloigne, elle offre ce qu'elle a :

Le mystère.
Le silence.

La fleur de son secret. ***




Horoscope de Jayar

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