Deux surprises. Deux… Ses sens en éveil, elle débouche en un lieu où ça s'affaire.
L'élite de Syrinth répond à l'appel et elle admire non sans une certaine once de de respect, ces Neldas, Tchaës et Tydales fourbus.
Loyaux, fiers, ils se préparent à répondre au dernier appel.
Et elle elle débarquait là, enfant indisciplinée des Terriers, ancienne subordonnée de l'Aveugle.
Son regard dans le vague, elle repense à Ner'hion et à son regard fatigué… Ah, au S'sarkh les images du passé, ombres mystérieuses et corbeaux déplumées.
Bagatelle sur bagatelle tout compte fait. Des bagatelles qui vous forgent une âme.
Une âme dure comme de l'acier trempée.
Et c'est là dans cette foule que son regard tombe… Comme attiré par le regard rêveur d'un autre symbiosé.
Le Poète aussi avait répondu au gong… Leur regard se croisèrent. Un instant éphémère, trop pour qu'aucune pensée ne fut échangée et la foule emporta Silindë alors que Temia s'en extractait. Fatalité. Aujourd'hui, l'entropie et l'arc seraient au service d'une même cause.
Elle s'extirpe de cette foule qui regarde la conque des bois. Là haut… Il n'y a plus personne.
L'appel a raisonné la foule attend son leader.
Elle se retourne et sursaute. Un petit Tchaë aux yeux cernés lui jette un regard étrange du haut du piédestal. Si elle s'y attendait. Renald Gath.
Un an, cela faisait un an qu'elle avait brièvement conversé avec le Tchaë cherchant à le décrypter comme si ceci aurait pu apporter une réponse à ses questions.
Elle ouvre la bouche les mots se perdent.
Elle n'avait pas compris sa colère, l'année passé, cet instant où elle avait dépassé cette limite où il lui avait demandé de partir…
De même qu'elle n'avait pas compris la rancoeur de Silindë voilà quelques mois de cela.
Maintenant, elle percevait un semblant de réponse. Comme des pièces de puzzle se mettant en place. Là, à la limite, au bord de la Fin…
L'aube serait rouge, pensait Kiavè, juché sur son épaule et regardant le ciel encore noir au dehors. Encore faudrait-il qu'il y ait aube.
L'arcaniste, l'invite à la suivre, et lui parle d'un ton amical.
Il est heureux de la voir… Quel personnage énigmatique. Elle incline la tête pour le remercier et se porte à ses côtés pendant qu'il lui explique la situation.
La réunion des soldats du parangon. Un guerrier légendaire aux dires des tavernes. Serait-il là lors de l'instant de vérité?
Il la guide jusqu'à une salle d'arme contenant surement le plus bel attirail qu'il lui ait été donné de voir.
Il est pressé, elle comprend. Sans un mot, elle acquiesce de la tête et sourit. Ils pourront parler. Ils devront. Après.
Pour éclaircir quelques points.
Elle entre timidement et contemple les objets qui y sont entreposés. Des armes… Des armures… Et d'autres choses plus incongrues…
Une dague de combat… De la longueur de son avant-bras… De quoi perforer le poitrail de…
Mais non. Avec un sourire, elle détourne le regard. Ce ne sont plus ses armes.
Elle dégrafe son arc et son carquois et déplie tout sur une table. Pas de magie… Elle s'était toujours débrouillée sans. Sauf depuis que…
Elle jette un coup d'oeil vers la porte entre-ouverte que l'arcaniste avait délaissé et contemple ses doigts blancs. Ils noircissent et de petites fumerolles sombres apparaissent entre ses jointures. Magie de ruine qui s'abreuvait de ce qui était vivant.
Le danger serait grand… Et face à une horde, il lui faudrait recourir à ses talents. La discrétion et la frappe létale. En une seule fois…
Elle n'était pas guerrière et ne pouvait se permettre d'engager une armée comme un soldat de bataillon.
Il lui fallait deux choses. Une arme qui tue… Et non qui blesse. Avec un soupir de regret, elle posa son arc court contre un râtelier… Elle reviendrait la cherchait, cette arme qui avait accompagné sa rédemption et parcourut les différents stands pour enfin trouver son bonheur… D'instinct, elle savait que ce serait lui. Un arc long plus grand que sa taille même avec une corde faite dans une matière douce et soyeux qu'elle n'identifiait pas, taillé dans un bois noir - de l'if ou de l'ébène… - parfaitement équilibré léger, et un carquois de flèches barbelées qui suintaient la magie… Son encombrement était compensé par sa légèreté… Elle tira un trait sur une cible qu'elle toucha en plein centre… Le mouvement en vrille de la flèche s'était décomposé devant ses yeux… Bien enfoncée dans le bois ayant tout ravagé sur son chemin… Elle l'avait son arme pour tuer…
Elle devait trouver une armure… Elle trouva rapidement son bonheur et enfila une armure de cuir qui rendait chacun de ses mouvements relativement flous se qui donnait une impression étrange de clignotement avec les saccades que provoquaient sa ceinture… Elle serait une Ombre parmi ces guerriers. Qui frapperait, qui tuerait. Et qui jamais n'aurait existé. Pour quiconque.
Satisfaite, elle s'apprêta à rebrousser chemin…
Elle posa son regard sur le médaillon encore sur la table au milieu de ses affaires d'antan…
Un médaillon qu'Annbella lui avait remis avant son départ :
"Pour que la Rhin assia soit avec toi et guide ta main en tout lieu, tout instant…", lui avait-elle dit quand elles s'étaient faites leurs adieux
La reverrait-elle? Pouvait-elle seulement accepter de porter un tel présent… Elle poussa un soupir, prit le collier et le passa autour du cou avant de glisser le pendentif sur son col… Elle en aurait besoin, de cette bénédiction.
Sans mot dire pour le petit Mou qui la regarde calmement, elle agraffe la broche de sa cape et sort de la pièce, sa nouvelle arme à la main.
Il était temps de rejoindre ses kielnos.
Digne ou indigne,ma vie est ma matière, ma matière est ma vie.