*** Savile se penche, renifle et tousse... ***

*** Les minutes passent. ***

***
Savile se saisit d'un bâton et entame l'exploration de la cavité dans ses tréfonds les plus obscures... ***

***

A force de trifouiller dans le trou, au milieu de la roche et de la boue, dans ce vieux marais au terrain incertain....Arthur creuse, creuse et....tombe.

Sploch, splach, craaaac, flac, froutch.

Le chercheur chute et traverse plusieurs mètres de terre meuble et humide sur les fesses pour atterrir dans une minuscule grotte. Il fait noir, très noir et M. Savile est maintenant sale, très sale.

Et bien entendu, ça pue la vase.

***

***
Effectivement, Savile affichait maintenant un sourire ravi, le Tchae tout crotté après avoir retrouvé son bâton se remit en marche à la lumière d'une lanterne cabossée.
***

*** En tendant l'oreille, il crut entendre un bruit derrière lui. ***

*** La chose était apparue dans un éclair de clarté... Ou pas... ***

***

Face au faisceau glauque de sa vieille lanterne et de ses timides lumières dansantes, Savile distingue une horrible petite créature d'une quarantaine de centimètres, visiblement apeurée et manifestement méfiante. Et qui n'a strictement aucune sorte de parenté avec le lapin....



Le Lugorio Philiniste est une espère rare de singe essentiellement herbivore, qui doit la couleur de son pelage à son régime alimentaire des plus basiques. Des champignons, des algues, des racines et des herbes. Ainsi que des lombrics à l'occasion. Ou des doigts, selon....

Ce qui intrigue Savile n'est pas tant de tomber sur un animal aussi singulier que le Lugorio (communément nommé le Gibbon des Marais), que de le trouver dans une grotte souterraine....

Au moindre geste déplacé du chercheur, le Lugorio affiche ses multiples rangées de petites dents acérées en signe (peu convaincant) d'intimidation.

***

*** Un instant surpris, Savile reprends ses esprits et affiche une mine étonnée.
***

*** Il avait parlé en tchae, en tydale et en nelda (très mal pour cette dernière) et avait repris avec un language mis au point lors de ses errances en Syfaria consistant en d'étranges gesticulations et force grognements gutturaux accommpagnés de sporadique jappements... ***

***

Le singe ne cille pas, ne bouge pas, ne lâche pas cet air terrifié et méfiant.

Au bout d'une longue minute, il ouvre finalement sa gueule pour émettre un hululement strident qui résonne à peine dans la petite cavité. Quelques secondes après, de nombreux phares s'ouvrent dans l'obscurité ambiante, comme autant de pairs d'yeux pour autant de Lugorios Philinistes. Arthur est cerné par une troupe d'une bonne dizaine d'individus, dont des vieux, des enfants, des femelles....

Et tous le fixent avec ce même regard éberlué et dément.
Au fond duquel brille un je-ne-sais-quoi quelque peu dérangeant....

Ce je-ne-sais-quoi qui, sans doute, brille aussi dans les yeux de Savile.
La faim. Une terrible et lancinante faim.

***

*** Hum hum...

Savile était de plus en plus étonné, toute une famille de Lugorios Philinistes tous plus laids les uns que les autres, incroyable!
Il allait falloir découvrir la facon dont ils étaient arrivés ici et la facon dont ils se débrouillaient pour se nourrir.

Absorbé par des préoccupations d'ordre zoologique, il oubliait un moment sa faim. ( qui devrait donc par conséquent revenir plus forte encore une fois sa curiosité apaisée.)

Il se dirigea vers l'un d'entre eux et entreprit de le saisir, de le coincer entre ses genoux et d'observer les eventuelles traces de nourriture qui devaient rester entre ses minuscules dents... ***

***

Un des vieillards malingres de la bande succomba rapidement devant l'assaut déterminé et les gestes vifs du Tchaë. Malgré des vaines tentatives de morsures, de griffures et une résistance plus ou moins farouche, le Lugorio pouvait difficilement lutter contre Savile et sa curiosité scientifique mortelle.

Il était au bout de ses forces, tiraillé par une faim dévastatrice.

Pendant que le chercheur opérait son étude sur ce spécimen, toute la bande de Philinistes s'était rapprochée et observait avec intérêt les manières d'Arthur. Certains lui faisaient également les poches tandis que d'autres se contentaient de le palper et de lui grimper dessus.

De son côté, le Confrère détermina rapidement la nature du régime alimentaire de son client. Aux dernières nouvelles, ce monsieur avait mangé....de la chair.

...Chose rare pour des Lugorios Philinistes...

***

*** De la chair, on s'embourbait dans l'étrange, qu'avait pu manger cette créature ridicule, quelle bestiole pourrait succomber aux assault d'un ridicule Lugorio à part... un autre Lugorio plus faible encore. ***

***
Il allait falloir inventer un stratagème astucieux pour découvrir le mode de vie de ces monstruosités simiesques. ***

***
Une minute passa... Savile laissa retomber sur ses pattes la bestiole, défit d'un endroit dissimulé de son costume un long lacet de cuir, et entreprit de l'attacher autour du bras de l'animal. ***

***

Le vieux Lugorio le regarda avec ce même air torve qu'il avait depuis le début de leur rencontre, à la fois fatigué et démotivé par les choses et la vie. Il observa avec distance le nouveau manège d'Arthur consistant à lui attacher une ficèle au bras et leva de nouveau son regard neutre vers le chercheur avec un soupçon de curiosité.

Toujours assailli de toute part par le reste de la famille, le Tchaë était de plus en plus recouvert de singes, dont certains le mordillaient de plus en plus fermement, comme pour tester la consistance de sa chair.

Au bout de plusieurs minutes d'attente, le vieillard attaché leva ses petites fesses et se mit à déambuler dans la petite cave humide. Il s'assit à plusieurs endroits, patienta plusieurs minutes.

Puis...il rejoignit finalement un coin reculé des lieux où gisait un tas d'ossements. Il prit un os et se mit à le ronger consciencieusement, y cherchant de quoi rassasier sa triste faim.

Des ossements...de Lugorio Philiniste !
Et certains de la famille qui mordillaient de plus en plus fermement la peau de Savile....

***