Les Mémoires de Syfaria
L'île de Syfaria

Sombre spirale...

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Sujet lancé par Kysall
Le 11-06-1509 à 00h12
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Posté par Hohen,
Le 19-10-1510 à 23h30
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Kysall

Le Julung 11 Jayar 1509 à 00h12

 
***



Tout semblait calme.

Pourtant, Kysall savait que ce ne serait jamais le cas.
Que toujours et encore il serait là, à observer lui aussi.
Le Maraudeur protégeait ce que nul ne devait voir...

Dans la cité enfouie où elle et les membres de la Coalition habitaient, les rumeurs se répandaient.
Elle en était indirectement l'héroïne.

Les créatures qu'elle croisait la connaissaient toutes dorénavant.
Ce qu'elle avait accompli avec Flymeur avait fait le tour de la cité de Rastryghën.
Pour autant, elle même avait encore du mal à comprendre l'importance que tout cela avait eu.

Mais les prémisses étaient là.
Ce qui était advenu avait provoqué chez les Maraudeurs une effervescence sans commune mesure.
Comme jamais il n'y en avait eu, disaient certains Vortex.

Oui, les prémisses étaient bien présents.
Par petites touches, tous ressentaient que ce qu'ils nommaient "les Temps du désespoir" allaient prendre fin en cette année 1509...

Alors Kysall observait et attendait, silencieuse.
Parfois des cris étaient perceptibles derrière la lourde porte que protégeait le Maraudeur.
Des hurlements qui faisaient frissonner la tydale dans l'obscurité...

***


 
Kysall

Le Dhiwara 13 Saptawarar 1509 à 21h49

 
***

Plusieurs semaines s'écoulèrent.
Kysall était presque redevenue anonyme en sa cité.
Elle avait fait ce qu'il fallait pour cela. S'était effacée.
Les rejetons ne prêtaient plus qu'une attention distante à ce qu'ils considéraient comme un outil éphémère.
Les poussiéreux n'étaient pour eux rien de moins que cela : un simple objet que le P'Khens'Sarkh avait voulu utiliser durant un certain temps.
Kysall savait que c'était au contraire bien plus...

Elle avait fini par comprendre que les peuples de poussière étaient devenus au fil du temps d'une importance colossale pour celui que ses sœurs de naissance nommaient l'Artisan du Déclin...
En réalité, elle saisissait de mieux en mieux la mentalité du dernier ennemi des Eduens.
Non pas qu'elle le côtoya régulièrement, car ceci restait impossible, mais sa mission l'avait fait saisir la profondeur de cet être, son indicible volonté et sa patience hors norme.
Cette patience avait fini par payer...

La cellule qu'elle avait espionné durant des semaines était devenue muette depuis déjà longtemps.
Le prisonnier avait alors été transféré.
Il avait fini par avouer ce que les Maraudeurs voulaient savoir, nul doute là dessus.
Les Nemens étaient plus résistants, mais des semaines de torture auraient brisé n'importe qui...

Aujourd'hui, la tydale était sortie aux abords du gouffre de Rastryghën.
Elle avait senti l'agitation chez les rejetons.
Il se tramait quelque chose.
Assise sur un rocher à quelques centaines de mètres dans les montagnes, elle attendait.
Une dizaine de Maraudeurs volaient en cercle loin au dessus du gouffre.
Kysall n'en avait jamais vu autant à la fois.
Ils protégeaient le lieu autant qu'ils voulaient assister à l'évènement.

A l'avènement...

Soudain, Kysall sentit trembler le sol.
Rastryghën grondait toute entière.
L'ex cité Eduen exultait de milliers de cris plus bas dans ses entrailles.
Quelque chose venait des profondeurs.
Venait de là où le P'Khens'Sarkh résidait.

Quelques secondes plus tard, ce qu'elle vit lui coupa le souffle !






La créature faisait plusieurs mètres d'envergure et était soutenue par des flux de mana, environnée de puissance.
Elle s'éleva lentement, jusqu'à une centaine de mètres d'altitude et resta immobile.

Kysall ne pouvait croire ce qu'elle voyait.
Cette abomination était donc l'aboutissement !
Le prisonnier Nemen trônait, méconnaissable, au milieu de l'amas de chairs et de muscles.
Ast'yrithgarmania Loïa...
Les autres corps - encore en vie comme Loïa - étaient ceux de poussiéreux qu'elle ne reconnut pas.
Le reste... était l'œuvre du P'Khens'Sarkh lui même.

La fin des Nemens se trouvait devant elle.
L'un d'entre eux avait pu être corrompu par les effluves...

Kysall se releva.
La créature restait immobile, les Maraudeurs volant autour d'elle.
La tydale redescendit en courant vers la cité.
Elle devait se trouver au centre de ce qui allait se passer. Elle n'avait pas le choix.
Aucun risque ne pouvait être pris...

Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle devait tenter quelque chose.
Même si c'était contraire à ce qu'elle avait appris toute sa vie.
Tout en marchant, trois messages télépathiques partirent.
Brefs.
Elle allait avoir affaire aux Maraudeurs pour s'insérer dans la suite des évènements.
Elle ne pouvait faire plus sans qu'ils le devinent...

Avant de s'enfoncer dans les entrailles, elle jeta un dernier regard en arrière.
Immobile, l'Abomination était tournée dans sa direction.
Un instant, elle eut l'impression que les yeux de ce qui avait été Ast'yrithgarmania Loïa étaient braqués sur elle.
Ellle se détourna, frissonnante.

Il ne subsistait en cet être que de la rage à l'état pur...

***


 
Kysall

Le Julung 21 Jangur 1510 à 16h59

 
***



Ce fut le chaos...

Sans aucun signe annonciateur, les Vortex firent soudain sécession.
Eux qui depuis des siècles étaient aux côtés du P'KhenS'sarkh, se retournèrent contre leurs anciens alliés !
Nul ne s'y attendait.

Et Sa colère en fut infinie...

La peur envahit le coeur de Rastryghën, lorsqu'une vague de haine glacée parcourut tous ses habitants.
Ses pensées étaient si fortes, si intenses !
Kysall, occupée avec sa sœur d'adoption dans sa masure, mit un genou à terre.
La trahison était avérée : les Vortex avaient agi contre Lui...

La chasse fut alors ouverte.
Partout dans la cité souterraine et en ses abords, on entendit brusquement des bruits de combat.
De guerre ouverte !
Les Vortex étaient attaqués, et ils ripostaient avec une inouïe puissance !
Ils ne cherchaient pas à lutter pour vaincre, mais à préserver le maximum d'entre eux, qui se mirent à fuir vers les montagnes, poursuivis par des hordes de rejetons enragés.

Kysall avait aussitôt, dès les prémisses, ramassé ses affaires et pris sa sœur avec elle.
Une trahison était une chose. Mais le P'KhenS'sarkh douterait dorénavant.
Il sonderait le coeur et l'âme des poussiéreux qui l'avaient rejoints.
Et Kysall savait qu'elle ne passerait pas ce test...
Elle aussi devait fuir au plus vite !

En sortant du gouffre, elle entrevit le chaos engendré par cette guerre interne.
D'autres races natives, d'une force insoupçonnée jusque là !, sortaient de terre, protégeaient les Vortex et ralentissaient leurs poursuivants, se sacrifiant sans hésitation !



La lutte serait brève, Kysall le savait.
Les rejetons allaient massacrer leurs opposants : le nombre ferait la différence sur la détermination.
Mais une majorité de Vortex pourrait fuir...

Elle se mit à courir, la petite tydale sur ses talons.
Nul ne faisait attention à elles, poussières parmi les géants.
Courir pour survivre.
Le plus loin possible.

Les montagnes seraient leur salut...

***


 
Kysall

Le Sukra 20 Marigar 1510 à 23h55

 
***



Solitude

Kysall s'était éloignée.
Leur campement était invisible, mais elle sentait la présence de la jeune tydale comme une flamme dans sa conscience.
L'éloignement ne suffisait pas à apaiser sa souffrance.

En chemin, elle avait trouvé un oeuf abandonné.
Quelle créature aurait pu naitre ?
Morte née.
Etaient-ils tous ainsi ? Morts nés ?
Elle s'accroupit aux abords du grand lac, la beauté du lieu lui remémorant des jours meilleurs...



Les poussiéreux qu'elle avait croisé étaient loin, maintenant.
Le fil d'ombre avait fait son office, et empêchait qu'elle fut détectée.
Pour autant, elle se sentait infiniment seule depuis leur rencontre.

Ils étaient unis. Disparates mais unis.
Elle se séparait chaque jour un peu plus de ses frères et soeurs.
Certes, elle avait réussi à les lasser. Ses réponses autant que son absence de réponses avait réussi ce qu'aucune fuite n'aurait pu accomplir.
Son âme était déchirée par l'amertume.
Elle aurait pu leur demander de l'aide.
Surtout à lui... Syin Lothar.
Il l'avait ignorée, et elle le comprenait.
Quelle déception cela avait du être pour lui. Ses paroles avaient du être cruellement banales à ses yeux.
Cruellement banales...

Elle avait tenté de les avertir.
Mais Kysall savait bien que ce n'était rien. Que ce n'était qu'un brin d'herbe voletant dans une tempête.
Elle espérait pourtant que ce brin d'herbe sauverait des vies...

Elle regarda les eaux faussement paisibles du grand lac.
Ainsi, tout était joué. Il ne restait plus qu'à sonner les trois coups, et la tragédie s'amorcerait.
Elle se sentait impuissante, et aucune rage ne l'habitait plus.
Elle songea à Flymeur, à ce lieu où il s'était reclus.
Un an déjà que la dernière menace d'envergure avait fouaillé Syfaria.
Un an de paix relative.
Un an.

Elle n'avait pas vu le temps passer.
Les vies s'étaient écoulées.

Quand avait-elle compris le teneur de la macabre pièce qu'ils jouaient tous ?
Elle ne savait plus.
Cela avait sans doute été diffus.
Les six factions avaient raison, voilà toute la noire et douloureuse vérité.
Et dans cette vérité résidait l'indicible.
Les poussiéreux sauraient-ils le comprendre un jour ?
Et alors qu'adviendrait-il ?

Loïa était là, toujours dans ses pensées, à l'observer.
Lui aussi savait.
Les règles du jeu n'avaient pas changé.
Elle se dirigeait vers la première cité qui tomberait.
Elle avait du faire un choix.
Cela la terrorisait, mais elle n'avait pas le choix de ne pas choisir.
Ou ils n'auraient aucune chance de survie...
Le premier acte passé, le deuxième resterait ainsi ouvert.

Le plan de l'Arpenteur était parfaitement en place.
D'où tenait-elle ce nom ?
De Loïa peut être.
En tant que Nemen, il ressentait différemment les choses.
Ce qu'il avait appris en étant en contact avec elle avait une autre saveur.

L'Arpenteur.
Ce nom était parfait.
Un être qui se dérobait sans cesse.
Qui œuvrait à sa libération depuis des millénaires.
Ils avaient tous été ses pions inconscients. Nemens, P'KhenS'sarkh, poussiéreux.
Seuls les peuples natifs lui avaient échappés jusqu'à présent.
Sauf que les Vortex eux aussi étaient entrés en guerre.
Cela était-il aussi son oeuvre ?

Kysall se releva et frissonna.
L'Arpenteur.
Aujourd'hui un poussiéreux parmi les autres.
Sa conscience s'était incarnée. Depuis longtemps, depuis peu ?
Kysall ne le savait pas.
Etait-il l'un des premiers sortis ?
Un symbiosé ?
Son influence allait au delà des mots et de ce que pouvait imaginer Kysall.
Ses agents pouvaient être nombreux, Nemens comme rejetons ou poussiéreux.
Sans le savoir le moins du monde.
Leurs choix influencés subtilement ou de véritables bombes à retardement.

Elle savait juste qu'il était là.
Quelque part parmi eux.
Loïa l'avait perçu. Sans pouvoir le répérer.

Elle se prit à l'imaginer.
Être de chaos, ou simple jeune poussiéreux souriant ?
Chef ou simple ouvrier ?
Où se cachait-il, attendant simplement son heure ?

Kysall inspira l'air frais, et se sentit vivante malgré son intense solitude.
Elle ne pouvait faire confiance à personne en Syfaria.
Elle revint sur ses pas, vers leur campement.
Une certitude l'habitait désormais.
Quoi qu'il advienne, elle allait devoir trouver des alliés.
Elle ne pouvait pas compter sur les Nemens, le P'KhenS'sarkh ou les rejetons, aveuglés durant des millénaires.
Les créatures natives les tueraient tous si ils apprenaient sa présence.
Seuls les poussiéreux restait une option.

Mais L'arpenteur était parmi eux...



***


 
Kysall

Le Merakih 31 Marigar 1510 à 23h35

 
***


Le temps était venu...

Kysall se tenait debout, les cheveux au vent.
Sa cape battait lentement derrière elle.
Son visage était magnifique et déterminé, auréolé d'une seule certitude.
Demain, le monde serait différent et elle était prête pour assister à ce prodige.

Qu'il fut sanglant n'avait aucune importance...

Face à elle, le paysage montagneux se déroulait vers la cité.
Ses murs d'enceinte scintillaient dans la lumière mordorée du matin
Elle paraissait si imprenable, si puissamment protégée dans son écrin de roche.
Mais Kysall savait combien elle était fragile aujourd'hui...

Elle avait voyagé rapidement, ne voulant pas faire attendre le destin.
Celui-ci avait déjà trop tardé à se mettre en place.
La créature qui avait été le Nemen Ast'yrithgarmania Loïa était fébrile.
L'effort serait important, mais ce n'était pas cela qui l'affectait.
Elle était en réalité excitée à l'idée de démontrer sa puissance, étourdie par la rage qui l'habitait désormais.

Kysall se retourna vers les montagnes.
Des centaines de créatures natives s'y amassaient, encore pour quelques heures à l'abri des regards des sentinelles.
Ast'yrithgarmania Loïa avait fait en sorte qu'elle sachent.
Il se délectait du massacre à venir.
Utrynia n'avait été qu'un test, Oriandre serait le début de son macabre chef d'œuvre.

Oriandre.
Pourquoi cette cité plutôt qu'une autre ?
Kysall avait eu un choix à faire.
Ainsi l'avait voulu ce monstre saturé d'effluves qui se jouait d'elle avec perversité, lui faisant payer le fait qu'elle aurait pu le sauver voilà des mois.
Kysall avait donc choisi, sans état d'âme.
Oriandre était parfaite pour être la première.

Parmi les créatures natives, Kysall aperçut des Arkoniens en grand nombre, ainsi que des Flavistes en même proportion.
Deux tisseurs observaient non loin de là, mais ils n'avaient pas encore décidé si leur peuple serait parmi les combattants.
D'autres créatures natives, bien plus puissantes, étaient en chemin dans les tréfonds de Syfaria.
L'offensive ne pouvait se faire sans elles.
Même si les Vortex étaient déjà là...

Une centaine d'entre eux, occupés à organiser les troupes pour le moment disparates.
Ils établissaient un campement, à peine à quelques kilomètres de la cité.
Kysall les avait rencontré deux jours avant.
Ils avaient accepté sa présence.

Grâce au roi Vortex.

Armaryen l'avait écouté.
Il avait compris les intentions purement dévastatrices d'Ast'yrithgarmania Loïa.
Armaryen était partagé.
Il se savait menacé par les rejetons, et s'opposer aux poussiéreux n'était pas la meilleure option, loin de là.
Mais les peuples natifs de Syfaria avait un tout autre point de vue.
Pour eux, les rejetons et le P'KhenS'sarkh n'étaient pas des ennemis.
Les Vortex n'avaient pu convaincre les autres natifs de ne pas attaquer.
Sans l'appui de l'ancien Nemen et de sa créature, les murailles d'Oriandre ne tomberaient point.
Avec lui, comme cela avait été démontré aux Flavistes à Utrynia, la prise de la cité devenait possible.
Et pour la majorité des peuples natifs de Syfaria, reprendre le contrôle de la surface après des millénaires d'exclusion était trop attirant.
La puissance des Nemens pouvait enfin être défaite.
Les cités qui entachaient leur monde pouvaient être rayées de la carte.
Ils avaient pris l'aide de Loïa comme un signe de la fin de la présence Nemen sur Syfaria.
Et pour cela, ils en seraient toujours reconnaissant au P'KhenS'sarkh.

Kysall frissonna.
Cette guerre devenait totalement incontrôlée.
Le P'khenS'sarkh avait déclenché une véritable spirale de destruction, que lui même ne pourrait plus arrêter.
L'Arpenteur avait parfaitement manœuvré.
Syfaria allait sombrer dans un indicible chaos...

Pourtant, il restait de l'espoir.
En voyant Armaryen monter vers elle, elle l'observa avec attention.
Sa puissance était indéniable, mais elle avait du mal à comprendre la notion de pur honneur qui dictait ses actes.



Malgré les risques, le roi vortex avait joint ses forces à l'armée qui se préparait à déferler sur les poussiéreux.
Les rejetons ne s'en mêleraient pas.
Ses guerriers étaient peut être plus en sécurité ici que partout ailleurs à la surface.
Mais ce n'était pas pour cela qu'Armaryen était venu.
Il était parvenu à un accord avec les autres peuples natifs.
Il allait proposer aux poussiéreux de partir.
Leur laisser du temps pour évacuer.

La cité devait être tuée.
Pas forcément ses habitants.
Sa présence était une offense et une douleur.
Eux n'avaient pas à souffrir.

Kysall et Armayen plongèrent leurs regards vers Oriandre.
Elle ne savait pas comment le vortex allait s'y prendre.
Mais elle connaissait les poussiéreux, et elle avait peur de leur réponse...

L'armée serait bientôt vue par les sentinelles.
Les dirigeants seraient prévenus.
Escortés par plusieurs vortex, ils se mirent en chemin.

Il n'y avait dorénavant plus qu'à attendre qu'ils viennent à eux...

***


 
Thosen Noril

Le Vayang 2 Astawir 1510 à 16h02

 
***


Une petite figure solitaire franchit les portes d'Oriandre et s'avança en direction des vortex.

L'apparence frêle, un casque finement ciselé ceignant ses tempes, quelques bijoux aux doigts, une cape sombre négligemment jetée sur les épaules qui laissait entrevoir un râtelier d'armes à feu et une armure de métaux ondulants.
Malgré une certaine finesse, le jeune diplomate était paré pour la guerre.

Et seul à s'avancer en cette heure. Seul à donner des ordres aux soldats dans la cité en effervescence puisque ni le Roi ni le Général ne montraient de signes de vie. Seul à assumer la colossale responsabilité inhérente aussi. Seul.

C'était cette responsabilité d'ailleurs qui le faisait marcher sans escorte vers les vortex.

Il était inutile de risquer la vie de ses frères non symbiosés avant un quelconque affrontement, qu'aurait-il trouvé à opposer d'ailleurs aux six vortex et à cette tydale ? Une quarantaine d'hommes pour équilibrer les choses ? Une centaine pour faire bonne impression ? Pourquoi ne pas tenter une sortie tant qu'on y est...

Non, si sa sécurité était effectivement menacée, Stennar prendrait le commandement de la cité. Ils avaient réalisé ensemble la plupart des dispositifs pour préparer Oriandre à la guerre et maintenant que celle-ci s'invitait chez eux, l'un comme l'autre connaissaient les ressources de la forteresse. Ou Krondor s'il était dans la ville à cette heure.
Thosen était tout à fait remplaçable, inutile de risquer autre chose que sa vie.

Empruntant l'un des sentiers étroits qui menaient à la cité, à peine de quoi faire passer trois tydales, le diplomate artilleur hocha doucement la tête tandis qu'il approchait de la délégation. Armaryen et Kysall.

Il avait libéré le premier de la tour du concile, puis ils s'étaient fâchés à Lerth, il avait combattu la seconde dans le néant. Il l'aurait -avec l'exécutrice Kaliss- d'ailleurs tué sans l'intervention de Nelle.

Nelle... Il contacta d'une pensée la jeune fille. Elle connaissait aussi ces deux êtres et semblait avoir gagné leur estime.
***


Dame Kysall, Roi Armaryen,

Je suis le maire de cette cité, Thosen Noril.
Et je ne suis pas certain qu'un bienvenue à Oriandre soit de circonstances.
Mais si vous êtes ici, c'est que vous désirez être entendu, je vous écoute donc.


 
Armaryen

Le Vayang 2 Astawir 1510 à 23h03

 
Armaryen baissa la tête en signe de bonjour respectueux.
Ses yeux fulminaient, et ses gestes étaient mesurés, lents et nimbés de puissance sourde.
Il regarda ensuite Thosen Noril droit dans les yeux, s'exprimant dans cette langue faite de cliquetis que tous comprenaient sans la connaitre...

Être de poussière, nous vous saluons.
Je suis ici en tant que représentant d'une force armée native de Syfaria, que vos sentinelles ont du repérer à quelques lieues de là.
Un campement a été établi.
Déjà un millier de soldats, et d'autres arrivent chaque seconde qui passe.
Nous serons bientôt deux cent vortex, deux mille Arkoniens et Flavistes, et plusieurs dizaines d'habitants des profondeurs.
Sans compter certaines forces anciennes que nous pouvons ramener à nous.
Mais cela en soi n'a aucune importance...

Vos murailles. Les murailles de cette ancienne cité Nemen sont imprenables.
Leur force est telle qu'elles repousseraient notre armée comme une brise ferait s'envoler un brin d'herbe.
Les luttes contre les cités ont cessé voilà des siècles.
Nous ne pourrions espérer vaincre là où les armées du P'KhenS'sarkh ont échoué, même si à l'époque les Nemens vous épaulaient.
Aujourd'hui, nous ne servons pas votre ennemi séculaire.
Nous ne sommes pas les sbires du P'KhenS'sarkh.
Nous, peuple Vortex, avons cessé de le servir.

Nous sommes ici pour le bien de notre monde.
Pour le bien de nos peuples.

Ces peuples qui nous accompagnent considèrent pour la plupart les poussiéreux comme leurs ennemis.
Des siècles d'incompréhension ont semé des graines indestructibles de discorde.
J'ai réussi à les convaincre d'offrir aux habitants de cette cité une chance de survivre.

Nous vous demandons d'évacuer Oriandre.
Quittez la ville.
Nous savons, et moi le premier, que c'est une sentence bien lourde pour votre peuple, qui considère cette cité comme sienne, comme refuge.
Nous savons aussi qu'il vous sera difficile d'accepter cela sans combattre.
Qu'il vous semblera que fuir serait une calamité.
Que vous retrancher dans une autre cité ne serait que reculer pour mieux mourir plus tard.

Mais réfléchissez bien.
Demandez aux symbiosés d'Utrynia.
Nous sommes en mesure de détruire vos murailles.
D'abaisser vos protections.
Les cités Nemens se sont affaiblies, et nous pouvons les réduire à l'état de simples pierres.

Je vous offre de vivre, car vous le méritez.
Vos villages ne seront pas attaqués par nos peuples.
Seules les cités Nemens nous intéressent.
Non pas pour les conquérir, mais pour les rayer de Syfaria.
Ce monde nous appartient, et nous tolérerons votre présence si vous acceptez de ne point nous combattre.
Nous trouverons un compromis. Plus tard. Une fois que tout sera fini.

Débutez l'évacuation de votre cité avant demain.
Prévenez les autres cités de se préparer à en faire autant.

Le monde tel que vous l'avez connu est amené à disparaitre.
Définitivement...


 
Kal'Ash

Le Sukra 3 Astawir 1510 à 09h54

 
*** Après le départ du Maire, elle avait grimpé quatre à quatre les marches de la tour la plus proche et la mieux située. Les mines des gardes laissaient transparaitre la peur et ils ne semblèrent pas lui prêter attention.

Arrivée tout en au de la tour, elle se blottit contre un créneaux et empoigna un objet cylindrique dans son sac. Le déployant et regardant par l'extrémité la plus petite elle balaya lentement les environs jusqu'à apercevoir Thosen, minuscule devant les assiégeants.


Elle observa un long moment la Tydale, puis l'immense Vortex depuis sa lunette. De quoi pouvaient-ils bien parler ?




Un seule fois elle avait rencontré l'une de ces chimères, isolée près d'Oriandre justement.
Il avait alors fallut l'action conjointe des meilleurs symbiosés présents pour en venir à bout . Et là il y en avait beaucoup, beaucoup plus. Sans compter les autres créatures qu'elle ne connaissait que de part quelques gravures.

Cette armée était là pour détruire la ville, c'était une évidence, ce qu'elle comprenait moins c'était ce temps mort qu'ils observaient.

Rassemblant ses esprits, et déglutissant avec peine, elle continua à chercher aux alentours des cibles stratégiques, camps, armes de siège, chef de groupes. Tout ce qui pourrait se révéler utile et faire la différence lorsque les régiments fondraient sur eux. ***





 
Nelle

Le Sukra 3 Astawir 1510 à 15h59

 
Nelle est en train de trépigner aux portes nord lorsqu'elle reçoit le message de Thosen confirmant l'identité d'Armaryen et de Kysall dans le comité d'accueil, et l'invitant donc à le rejoindre pour le pique-nique champêtre qui s'annonce.

J'arrive.

Et d'ajouter, en réponse à l'inquiétude mesurée de son amant :

Et non, ils n'ont pas intérêt à te réduire en charpie...

Roi vortex ou pas.

Après, c'est vrai qu'il aurait pu se faire accompagner, lui aussi, au lieu de partir tout seul à leur rencontre. Ne serait-ce que pour la mise en scène...

Bref, Nelle rejoint rapidement le point de rencontre à quelques centaines de mètres des murailles, et se place au côté de Thosen, sans un mot, alors qu'Armaryen finit de parler.
Le diplomate noir lui a transmis au fur et à mesure les paroles du seigneur Vortex, et l'esprit de Nelle est déjà en ébullition, mais pour l'heure elle ne dit rien, laissant à Thosen le soin de répondre en premier.
C'est quand même sa cité, que le vortex vient gentiment lui proposer de raser...


 
Thosen Noril

Le Sukra 3 Astawir 1510 à 20h35

 
Thosen se gardait bien de laisser cours à ses émotions. Armaryen lui ayant fait la bonne surprise de se révéler être télépathe dans la Scintillante, inutile d'échanger autre chose que des mots. Neutralité prudente donc.

Roi vortex, vos paroles ont été transmises à ceux susceptibles d'agréer à votre demande.
Je vous ferais part de leur décision lorsque celle-ci sera prise.


Il adressa à la nouvelle venue un sourire sincère, avant de retrouver son détachement teinté de circonspection.

Étant le Roi d'un peuple pour qui l'honneur est tout et capable de ressentir les émotions avec une grande... clairvoyance, je crois en votre droiture. Et donc, indépendamment de la décision qui sera prise par mon gouvernement, je vous remercie pour vos efforts et pour ce choix que vous nous offrez. Même si, vous le comprenez, il n'est pas aisé à faire.

Néanmoins deux choses m'interpellent dans vos paroles.

Vous parlez de compromis... vous parlez de compromis une fois que tout sera fini, c'est à dire après nous avoir expulsé de nos cités, nous avoir mis sur les routes, avoir considéré notre droit à vivre sur ce monde qu'au travers du prisme de votre générosité et de notre passivité.
Qu'y aura-t-il alors à attendre de ce compromis ?
Que devons nous espérer de ce mot, de cet arrangement où vous possédez tout et nous ne possédons rien.
Pourquoi devrions nous nous en remettre à vous pour arbitrer ce monde et notre destin quand les peuples qui vous accompagnent veulent notre mort et que vous peinez à les influencer ?
Comment même entendez vous nous accorder ce compromis, alors que le P'khenS'sarkh n'est plus votre allié et qu'il est celui des flavistes et des arkoniens que nous trouvons parfois aux cotés de ses armées ?

C'était la première chose. La seconde tient dans une question qui peut être déclinée.
Comment comptez vous détruire la cité ?
Est ce que cela implique de la raser entièrement ? De détruire ce que nous avons construit pendant six cents ans ?
Ou, laissant les bâtiments intactes, de détruire juste sa conscience ?
Les mots que vous employez, "Les cités Nemens se sont affaiblies, et nous pouvons les réduire à l'état de simples pierres", est ce que cela signifie que la protection nemen sera détruite, ou qu'il ne restera plus d'Oriandre que des pierres ?


 
Aedrenith

Le Sukra 3 Astawir 1510 à 21h08

 
La discussion avait déjà commencée, au loin, lorsque la boiteuse grimpa tant bien que mal en haut des marches. En uniforme, comme toujours. Mais dans un uniforme couvert de poussière, tâché de sang. Et elle ne valait guère mieux que ce qu'elle portait. Visage terne, grandes cernes, cheveux sales. Elle avait l'air de ce qu'elle était. Après trois semaines de campagne au dehors de la ville, à commander un détachement pour traquer et éliminer les abominations, rentrée une poignée d'heures plus tôt, à marche forcée, pour assurer son rôle de commandement des médecins de la Noire.

Se penchant sur la muraille, elle vit pour la première fois l'armée qui campait au loin d'Oriandre...

Par Shamgre ! Comment ils ont réussi ce tour de force ?...

Cette question la taraudait depuis que la nouvelle était tombée. Comment une armée d'une telle ampleur avait-elle pu débarquer ici de cette façon ? Pas par les routes, toujours fréquentées, elle aurait été repérée depuis longtemps. Pas par les montagnes, comme certains de ses Frères le pensaient. L'hiver à peine terminé, les neiges interdisaient à une armée de s'y engager, au dehors des chaînes de cols qu'empruntaient les routes... Mais alors, comment ?... Par le ciel ? Elle y jeta un œil, murmurant pour elle-même.

Avec l'hiver qu'on a eu, maintenant que ça servirait, on pourrait pas avoir une bonne chute de neige, ou une grosse pluie bon sang ?...

Elle était trop épuisée pour avoir vraiment peur. Bien reposée, elle aurait sans doute paniqué, en la circonstance, c'était lui demander trop d'efforts. Elle repéra le petit groupe qui parlementait, au sol. Étrange... l'ennemi voulait discuter ?... Les pensées du Frère Maire lui parvinrent, rapportant ce qui se disait là bas, lui parvinrent à ce moment.

Bordel de [censuré] !

Ça lui avait échappé. Elle n'y fit même pas attention. Ce qui se disait confirmait ce qu'elle craignait. Et lui apprenait beaucoup, à côté de cela. Elle sortit sa pipe, pour la bourrer de tabac. Elle avait besoin de se concentrer, pour ce qui promettait d'arriver, et pour cela, elle devait faire taire cette douleur dans sa hanche. Le tabac l'y aiderait. Sa trousse de soins de campagne aussi, au besoin...

Une pensée lui traversa l'esprit, quand elle alluma sa pipe. Ils avaient un sacré cran, le maire et cette tchaë qu'elle ne reconnaissait pas, pour sortir à la rencontre du roi des Vortex et de la tydale, comme ça... Fallait oser. et faudrait bientôt oser bien plus, elle le craignait.


 
Armaryen

Le Dhiwara 4 Astawir 1510 à 13h01

 
Armaryen répondit en fixant Thosen Noril, grave et tendu.

Les questions taraudent et affaiblissent celui qui espère des réponses.
L'espoir n'existe pas.
Je comprends votre envie de certitude, mais il n'y en a jamais en ce qui concerne ce qui n'est pas encore arrivé.
La présence des Eduens puis des Nemens, la brisure créée par le S'sarkh et la colère du P'KhenSsarkh, l'assouvissement de la surface à une guerre millénaire, l'arrivée des êtres de Vent.
Tout ceci est certitude.
Ce monde est notre. Etait notre. Sera notre.

L'avenir n'est rien.
Le présent est inutile.
Le passé réconforte ou amenuise.
L'action seule et l'honneur de chaque acte compte.

Votre deuxième interrogation est légitime.
La pierre est de notre monde, et elle restera intacte.
Pour le reste, Nemens comme rejetons ne sont qu'un long passage, que des échardes douloureuses.
Et nous allons retirer ces échardes, quitte à ce que la plaie s'infecte durant quelques temps...


 
Thosen Noril

Le Luang 5 Astawir 1510 à 02h26

 
L'action seule et l'honneur de chaque acte.
Autant ne pas s'attarder sur la première question.


Donc la pierre restera intacte... Excusez moi.

Une pause. Les instructions d'Elchior lui parvenaient et Thosen se rappela que le Roi tchaë ne savait rien de la télépathie d'Armaryen. L'une des tâches qu'il venait de lui assigner s'avérait bien plus ardu à réaliser qu'à décrire.

La pierre restera intacte. Donc vous comptez détruire les cités nemens, mais sans endommager les constructions qu'elles abritent...
Dans ma conception des choses, les questions amènent la connaissance plutôt que l'affaiblissement.
Que celui qui les pose réalise une action qui lui permettra d'en accomplir d'autres plus adaptées à sa situation et que celui qui y répond lui offre sa propre compréhension des actes qu'il va entreprendre.
Ou plus simplement, je pense celle là légitime elle aussi et elle ne tient pas à ce futur incertain: Comment comptez vous détruire la cité ?

Est ce que c'est un rituel... une sorte de manipulation de la trame ?
Vous avez besoin de cette armée pour l'accomplir d'ailleurs ? Ou peut être que ce sont ces habitants des profondeurs ou ces créatures anciennes que vous mentionnez qui peuvent le réaliser ?
Cela prendra du temps
?

Voilà Armaryen bombardé de questions. Alors qu'il semble nerveux et peu enclin au dialogue. Sourire un peu confus du jeune tchaë et coup d'œil à Nelle, si lui et Kysall étaient ici c'est qu'ils s'attendaient effectivement à des interrogations, autrement un message télépathique et l'image de cette armée auraient suffis à accorder déjà du poids à ces mots.

Ahum... le gouvernement tchaë est en train de se réunir pour envisager votre proposition.

Je... je ne parle pas au nom du gouvernement. La décision qu'ils vont prendre leur est donc propre... mais je pense qu'aucune cité ne peut être évacuée en une journée.
Nos frères et sœurs ne sont pas du tout habitués à voyager, et on m'indique qu'un grand nombre de créatures, tetrikarus, loups malfaisants, akrorytars notamment d'agonie ont été repérés sur la route, fuyant probablement votre armée.
Lancer des civils sur les chemins dans un moment pareil c'est les envoyer à la mort, même si nous autres soldats faisons tout pour les protéger.

Vous avez surgi sans prévenir personne et assiégez en premier le peuple le plus sédentaire de tout Syfaria en lui donnant un délai presque impossible à tenir pour évacuer ses citoyens. Comprenez que ce choix nous est difficile et que même si je suis convaincu de votre droiture et que vos mots reflètent la réalité, par manque de temps et d'autres options disponibles, nous risquons de combattre.

Roi Armaryen, vous nous demandez de commencer à évacuer avant demain, cela c'est possible. Mais l'évacuation de toute la cité, si elle est préférée, va nous prendre un peu de temps. Et c'est ce temps qui risque de faire défaut au gouvernement et lui faire prendre une décision qui nous jetterait les uns contre les autres.
Car je vous assure qu'une balle de mousquet tue un arkonien, qu'une vingtaine d'entre elles tuent un vortex, et que même sans la protection de la cité nemen, ces sentiers qui mènent à la ville ne permettront pas à plus de trois guerriers de front d'avancer, l'affrontement n'est quelque chose de souhaitable pour personne.

Il nous faut réfléchir peut être aussi à d'autres options...
Là encore je ne suis que ma propre voix, mais si vous n'avez rien contre le peuple qui habite ces murs, si vous n'entendez pas détruire ces murs, est-il envisageable qu'une autre piste soit présentable à mon gouvernement ?
Une évacuation effective mais qui ne durerait que le temps de détruire ce qui balafre la trame ?


 
Syin Lothar

Le Luang 5 Astawir 1510 à 13h10

 
Aussi étrange que cela puisse paraitre, Syin était lui aussi dans les parages.
Il avait cheminé depuis sa rencontre avec Kysall pour rejoindre le sud, une partie de l'île qu'il ne connaissait et qui ne le connaissait pas non plus. Il avait certainement emprunté, à peu de chose près, le même chemin que l'armé ou celui de Kysall mais ils ne s'étaient jamais croisés et lui se trouvait maintenant devant les portes de la cité d'Oriandre. Un message télépathique lui parvint, un vieil ami, un sombre présage mais aucune réelle surprise.

Triste réalité pour celui qui avait voulu fuir un temps son destin, il se retrouvait de nouveau exactement au cœur de l'histoire de Syfaria.
Ne discernant de ses yeux l'avant troupe de l'armée menaçante, il se posa à une centaine de mètre de la cité, camouflé dans les collines escarpées. Son regard scrutait les environs tendit qu'il communiquait avec d'autres symbiosés.


Tu as de toute façon suffisamment vagabondé...

Le tydale était sale et ressemblait plus à ermite qu'à un fier représentant de sa race mais ce long voyage qu'il avait entreprit l'avait requinqué de sa mésaventure avec Kysall. Il savait que des vortex s'étaient approché, il voulait aller leur parler, savoir pourquoi ils étaient mêlés et surtout reprendre son œuvre qu'il n'aurait jamais du abandonner.

 
Armaryen

Le Luang 5 Astawir 1510 à 14h05

 
Un combat entrainera inévitablement des pertes de tous les côtés.
Mais nous vaincrons, quoi qu'il en coûte, car le temps est venu.
Ne croyez pas que nous soyons limités à l'entrée de la cité.
Vos murailles tomberont si cela doit advenir.
La même créature que celle qui a attaqué Utrynia s'y emploiera, avec une puissance que d'autres symbiosés pourront vous faire connaitre.
Elle est impatiente. Enragée. Et cherche le sang pour le sang.
Nous autres Vortex, nous préférerions que les choses se passent autrement... mais la décision vous appartient, êtres de poussière.

Vous ne pourrez plus habiter ici, même si les pierres resteront intactes.
La cité deviendra inhabitable, à jamais.
Sachez que votre départ, ou évidemment la destruction de votre peuple, ne sont pas des chemins qui peuvent s'emprunter dans l'autre sens...

Votre décision est importante, car elle conditionnera notre attitude pour les prochaines cités.
Combattez, et nous ne pourrons plus influencer les autres peuples natifs, dont la haine ne pourra qu'être exacerbée.
Nul poussiéreux ne sera en sécurité, dans les cités comme partout ailleurs en Syfaria.

Nous allons vous laisser réfléchir, mais si demain matin nul signe d'évacuation n'est visible, sachez que l'attaque débutera dans une colère à nulle autre pareille.
Notre allié n'a aucune retenue ni aucune pitié.
Vos enfants, vos familles, vos vieillards seront éradiqués avec une cruauté inégalée.
Des siècles de soumission et de sourde rage s'abattront sur eux...
Il n'y aura aucun faux semblant dans ce qui risque d'advenir.

A vous de décider, vous avez les cartes en main, Thosen Noril.
L'aube sera espérance... ou écarlate.


Durant tout ce temps, Kysall était restée impassible, le visage baissé.
Les Vortex qui les accompagnaient étaient nerveux, tendus à l'extrême, et il ne valait mieux pas les approcher de trop près.
Armaryen se retourna, et commença de revenir vers les montagnes et le campement de l'armée native, à quelques kilomètres de là.
L'escorte se mit en position défensive, et Kysall lui emboita le pas.

Bientôt, ils ne seraient plus là, et le destin des races de poussière relèverait de la décision d'Oriandre...


 
Nelle

Le Luang 5 Astawir 1510 à 15h45

 
Nelle n'avait pas eu le temps d'en placer une que la discussion semblait déjà close, et qu'Armaryen et sa comparse s'éloignaient sans même sembler avoir remarqué l'arrivée de la petite tchaë.

En même temps, l'échange qui venait d'avoir lieu n'était pas réellement ce qu'on pourrait appeler une discussion. Le seigneur vortex était venu leur proposer de choisir entre la peste et le choléra.
Et rien de ce qu'ils pourraient dire n'aurait visiblement la moindre chance de changer la donne...

Nelle n'avait pas eu l'occasion de s'exprimer, mais comprenait finalement que cela aurait de toute façon été vain.

Mourrez brutalement, ou à petit feu.
Ni plus ni moins.
Voilà l'offre charitable -et non négociable- d'Armaryen et de ses alliés.
Après des centaines d'année de lutte contre l'Usurpateur et ses rejetons, quelle ironie -amère- de constater pour la jeune témoin que c'était finalement les créatures natives qui s'apprêtaient à causer la perte des poussiéreux.

Tout en regardant Armaryen et Kysall s'éloigner, Nelle retenait avec peine le désarroi qui l'envahissait...


Knüt dit :

Moi j'trouve que tu fais vach'ment bien la plante verte, en tout cas.
Ouais.


 
Kal'Ash

Le Luang 5 Astawir 1510 à 19h29

 
*** Les différents tubes s'emboitaient dans un ordre précis, chacun d'entre eux allongeant d'un pied le canon. Chaque goupille trouva sa juste place, chaque engrenage et chaque ressort s'imbriquèrent parfaitement selon un plan d'une complexité rare, et qui plus est opéré de tête.

En dernier temps, la lunette fut fixée à l'ensemble maintenant très conséquent. Un long moment fut ensuite accordé au réglage de celle-ci à l'aide de calculs posés à la hâte sur un vieux papier et corrigés en temps réel, l'œil dans la lentille.

Les chargeurs étaient disposés à sa droite, dans un alignement si ordonné qu'il se devinait aisément l'état potentiellement critique de la situation.

Allongée à même la pierre froide, elle saisi la robuste poignée, coucha la tête sur le coté et commença à balayer la zone au travers de la lunette grossissante. Mâchonnant un fin morceau de bois, elle entendait la discussion qui se déroulait à quelques centaines de mètres en contre-bas par l'intermédiaire du rapport du Maire.

Les assaillants offraient aux habitants de se rendre à une mort assurée dans le but d'éviter une mort certaine. Bien évidement, la situation était analysée du point de vue d'un Vortex qui se pouvait aisément parcourir les vastes étendues de syfaria sans craindre autre chose que les plus proches serviteurs du Grand Ennemi.

Pour le peuple Fraternel l'examen était tout autre, et un exode massif d'Oriandre était proprement inconcevable, sans murailles, jettés sans délais sur les routes à la merci des premiers maraudeurs venus les pertes seraient gigantesques.

Non le choix proposé n'en était pas un. Du point de vue d'un Tchaë lambda, non symbiosé de surcroit, le dilemme savamment orchestré tombait à plat et ne débouchait au mieux que sur une fatalité : ils étaient acculés et forcés de se battre.




Au moins les choses étaient claires. ***





 
Syin Lothar

Le Luang 5 Astawir 1510 à 23h35

 
Syin avait perdu du temps, il n'avait pas put rejoindre la délégation.

Il lui avait d'abord fallut obtenir une autorisation pour entrer en ville et la traverser puis après il s'était perdu dans les ruelles et les places de la citée. Il ne connaissait pas ce lieu et ne parlait pas la langue Tchaë, cela avait rendu les choses bien compliqué.

Pour autant, il n'avait de cesse de s'activer. Il avait de nouveau repris contact sur le consensus de ses anciens alliés, il avait longuement discuté avec Thosen qui semblait être très demandé. Il avait cherché de tout son être un obstacle pour barrer la fatalité mais pour l'instant il était bloqué. Aussi bien dans ces rues que dans ses idées.

Le tydale s'arrêta. Demain verrait une nouvelle étape dans la survie des Êtres de Vents de Syfaria et la nuit allait être agitée. Il repensa aux paroles du Diplomate Tchaë, il lui avait suggérer de prendre contact avec la renégate Tydale, la questionner. Il lui fallait le faire, au S'sarkh les rancunes et déceptions personnelles, c'était pour ses frères et sœurs qu'il devait agir et se comporter.

La main posée sur ces étranges maisons aux toits plats, Syin créa ce lien télépathique qui lui permettait de communiquer, un lien tissé vers Kysall mais aussi avec le Diplomate Noir envers qui il voulait montrer sa bonne volonté.


 
Nelle

Le Matal 6 Astawir 1510 à 14h10

 
La première vague d'affolement passée, Nelle reprend ses esprits.
Sur le consensus, où elle a presque simultanément retranscris les réponses d'Armaryen, les avis et idées fusent, loin d'être aussi bêtement fatalistes et résignées que sa première réaction à cet ultimatum.

Ignorant les velléités suicidaires de certains, Nelle écoute durant quelques instants les possibilités de repli et de survie qu'envisagent les plus mesurés -ou les plus réalistes.
Puis elle se redresse et s'avance d'un pas vif pour rattraper le vortex déjà loin d'une cinquantaine de mètres.
A son approche, les vortex qui entourent et protègent leur roi se dressent face à elle, menaçants et implacables.

Drôle de tableau que celui-ci, du haut de ses un mètre trente face à ces créatures de cauchemar plus imposantes que les plus grands neldas, Nelle ne se sent aucune impulsion héroïque. Et se garde bien d'esquisser le moindre geste équivoque...

S'arrêtant, et sans attendre de voir si le seigneur vortex et la guerrière vont en faire autant et l'écouter, elle s'adresse à eux d'une voix suffisamment forte pour se faire entendre :


Vous avez tord, Armaryen.
L'espoir existe.
Et loin d'affaiblir, il rend plus fort.

Mais pour autant je ne crois pas en votre affirmation que nos villages ne seront pas attaqués. Ils le sont déjà, ils l'ont toujours été.
L'orpheline que je suis en sait quelque chose...
Quand bien même les natifs cesseraient ces attaques, les rejetons les continueront, les aberrations aussi, les créatures perverties aussi.
Seules ces villes que vous voulez détruire nous ont à ce jour réellement protégés de ce monde qui nous a toujours été hostile.
Alors oui, la sentence est bien lourde à entendre. Cet exode est presque assurément une condamnation à mort pour nos peuples.

Presque...
Nous pourrions nous réfugier à Ulmendya comme vous nous l'aviez recommandé, Kysall.


Nelle regarde brièvement la guerrière tydale, s'interrogeant intérieurement sur son silence et son retrait manifeste de cette rencontre, puis elle reprend à l'intention du vortex.

Mais, sans même parler de l'éventualité qu'ils nous y accueillent, votre besoin viscéral de détruire les nemens et leurs oeuvres vous fera fatalement un jour ou l'autre vous tourner vous aussi vers la cité-puits.
Je crois que celle-ci pourrait au mieux être une étape.

Mais il existe aussi un autre lieu en Syfaria qui n'a jusqu'à présent jamais été hostile aux poussiéreux.

Savez-vous, Armaryen, pourquoi nulle créature ne vient sur l'Aghererh’ta S’sarkh ?


Nelle laisse passer quelques secondes de silence sur cette question qui lui semble subitement capitale, puis elle ajoute, tant qu'elle en a l'occasion :


Votre annonce soulève également une autre question : vous désirez éradiquer ce qui n'est pas de votre monde. Que comptez-vous faire alors -ou tenter de faire- des piliers de poussière ?

 
Kysall

Le Merakih 7 Astawir 1510 à 00h28

 
Armaryen stoppa net, tournant toujours le dos à Nelle.
La dizaine d'autres Vortex se sont positionnés pour protéger leur roi, faisant ressortir leurs griffes, et leur peau durcissant rapidement.
Nelle s'aperçoit alors que ces vortex diffèrent de ceux qu'elle a déjà rencontré.
Ils semblent plus vieux, leur peau plus dure et couverte de cicatrices rituelles alambiquées.
Nul n'a jamais vu de près les plus anciens Vortex de Syfaria, qui ont attendu durant des siècles la libération de l'Honneur de leur peuple.
Seul Jemori Colcook, dans un moment d'exception que lui seul connait, avait pu les apercevoir. De loin...

Leur capacité à transformer leur corps ne peut que surprendre la petite tchaë.
Et sans doute l'inquiéter un peu plus.
Car elle a là sous les yeux une preuve de plus que certaines choses échappent malheureusement aux poussiéreux, dans le fatras des ans et des non dits.
Ces Vortex là sont la garde rapprochée d'Armaryen, et au vu de leur récente rébellion contre le P'KhenS'sarkh, comment ne pas imaginer que sa libération n'ait été prévue de très longue date par ces êtres séculaires ?
Thosen Noril avait participé à cette libération voilà quelques années de cela...

Les secondes s'égrainèrent, le vent seul modelant l'espace alentour.

Puis Armaryen se tourna vers Kysall, et la regarda fixement.
Un échange muet se produisit, et ce fut la guerrière tydale qui répondit à Nelle.

Nelle'Dymer, les races de poussière n'ont d'autre choix que ceux que leur ont imposé les rejetons et les Nemens.
Survivre.
Dans leurs cités, contre leurs armées.
Pour autant, cela ne signifie pas qu'il n'existe pas d'autre solution.
Je ne peux garantir la sécurité de vos peuples s'ils se jetaient sur les routes.
Les êtres de poussière sont des orphelins jetés dans un monde hostile et qui les rejette.
Cela est une terrible calamité, mais c'est la réalité de ces six derniers siècles.

Est-ce pire de se retrouver projeté dans un inconnu où toutes les cartes sont enfin dans vos mains que de perpétrer une immonde survie pour encore des siècles, sous la seule coupe de ceux qui vous malmènent en douceur ou en violence ?

Vous pouvez avoir l'impression d'une terrible injustice.
D'un malheur sans nom qui s'abat sur vous une fois de plus sans possibilité d'échappatoire.
Mais le Tableau n'est pas ainsi.
Rien n'est écrit, et tout se dessine, Nelle...

Pour ce qui est de la cité puits, elle ne peut être détruite, car les Nemens ont tant malmené la réalité que celle-ci fait dorénavant parti intégrante de Syfaria en tant qu'être de vie et de conscience.
Ulmendya est bien plus qu'une simple cité.

L'Aghererh’ta S’sarkh...
Je ne peux répondre à cela.
Nul parmi nous ne le sait.
Je n'ai jamais entendu un rejeton évoquer ce sujet.
Seul Batyias pourrait vous renseigner à ce propos, selon moi...

Enfin...,
elle regarde une nouvelle fois Armaryen avant de tourner de nouveau les yeux vers la tchaë.
Vous posez là une question juste et justifiée.
Les piliers de poussière.
Rien ne peut les détruire, tout simplement.
Rien. Ni personne. Nulle puissance ou volonté.
Les piliers de poussière sont un liant que seul le P'KhenS'sarkh a pris le risque d'altérer.
Et nous en savons les conséquences, sur ce monde comme dans d'autres.

Les peuples natifs ne sont pas le P'KhenS'sarkh.
Ils veulent préserver Syfaria et les mondes qui le sous-tendent.
Même si leurs intentions immédiates peuvent vous sembler servir celui que vous nommez l'Usurpateur, cela n'est pas le cas.
Loin de là...


Son regard se fige sur les derniers mots qu'elle vient de prononcer, comme un couperet.
Armaryen ne s'est pas retourné vers Nelle.
Il reprend sa marche, les vortex ne cessant d'observer les moindres mouvements alentours, tandis que Kysall elle aussi reprend sa route vers les montagnes.



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