La Voix des Âmes
La solitude du néant...

Empreintes effacées

Des pas à trouver
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Sujet lancé par Léonal
Le 09-10-1510 à 16h54
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Posté par Léonal,
Le 21-10-1510 à 23h34
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Léonal

Le Sukra 9 Otalir 1510 à 16h54

 
Une longue chute.
Interminable.


Seul.

Léonal était à nouveau seul. Loin de la douleur des autres morts mais si proche de la sienne qu'il pouvait sentir sa main glacée le caresser. Recroquevillé dans sa chute à travers les ténèbres, le loup eut la chair de poule. Il claqua des dents, trembla comme une feuille.

Il gardait les yeux clos avec force et se répétait que tout cela n'était qu'un mauvais rêve. Qu'il ne pouvait pas être ici, telle une ombre projetée sur une toile noire, tel un nuage flottant sur un ciel sans lune. Telle une âme dérivant dans l'éther. Il ne pouvait se résoudre à accepter la mort, la sienne, celles des symbiosés et de tant d'êtres à travers tout Syfaria.

De quel cauchemar était-il captif, de quel terrible songe était-il le pantin ?
Inutile de se mentir pourtant. La réalité est une vision fatale de la vie à laquelle Léonal ne pouvait se soustraire.

Des larmes inondèrent la fourrure de ses joues. Le malheur était là, il côtoyait la folie et la renonciation dans une assemblée tragique où déambulaient sans conscience les morts qui venaient ou s’en allaient. Simple passage. Lieu de transition. Non lieu. Ces morts pénétraient dans un monde bouleversant mais semblaient insensibles à la calamité. Leurs propres tribulations ne paraissaient pas les concerner.

La mort serait-elle devenue une routine ?
Léonal sanglota à cette pensée.

Combien de symbiosés utilisaient le monde des morts comme chemin de traverse mais combien de poussiéreux l’accueillaient comme dernière destination ? Qu’en était-il de ceux qui resteraient à jamais dans ce néant ? Qui se soucierait de leur misère ?

Qui se préoccuperait de sa famille…

Korsyne était détruite et dans ses ruines gisaient les attaches du loup ; ses proches, ses camarades, sa maison d’où il était parti et où il s’était promis de revenir. Sa grand-mère. La tombe de ses parents. Son premier amour et ses premières amitiés ; son premier rêve, son premier cauchemar ; ses joies, ses peines, ses espoirs.

Son passé.
Cette fois, Léonal pleurait pour de bon.

La ville et ses habitants n’étaient plus. Tout ce qu’il aimait et chérissait, tout ce avec quoi il grandi était détruit. On disait que l’âme de la ville était consumée et le loup, sans métaphysique, en arrivait à la même conclusion. Le cœur de son monde cessait de battre et c’est tout son être qui sombrait.

On l’amputait d’une part de son existence et on jetait cette part aux ordures.
Adieux, chers proches.
Adieux, chers souvenirs.
Adieux, chère ville.


 
Léonal

Le Sukra 9 Otalir 1510 à 16h56

 
Seul… ?

Malgré cette mutilation, malgré sa propre mort, malgré sa détresse et son désespoir, Léonal était là. Il demeurait présent dans cette absence générale ; matériel d’existence dans le néant caractérisé. Il était l’étincelle dans le noir, la flamme dans le vide. Une flamme que le trépas n’éteignit pas et qui continuait à brûler inexplicablement. Mais de quoi se nourrissait-elle, comment pouvait-elle continuer à briller alors qu’aucunes des conditions nécessaires à sa survie n’étaient réunies ?

Comment ?
Léonal ne pleurait plus qu’un peu.

Mort, il réfléchissait toujours et pouvait ressusciter – même si l’idée d’abandonner l’endroit où dormaient ses souvenirs était insupportable.
Or donc, quelque chose alimentait sa pensée, ainsi que celle des autres symbiosés décédés, et cette chose lui conférerait assez de ressource pour l’aider à reprendre vie le moment venu. Pour renaître de ses cendres.

Cette chose énigmatique l’entretenait tout au long de sa fatale expérience pour l’empêcher à tout prix de disparaître ; il était en ce moment même relié à elle comme devaient l’être ceux qu’il venait de croiser. Elle était là, environnante, attachée aux points d’entrée de son âme, attachée à toutes les âmes en transit.

La chose les approvisionnait tous, sans exception, sorte d’énergie stimulante.

Stimulante.
Léonal sécha ses larmes et ouvrit les yeux.

Ses recherches précédentes ne donnèrent rien car elles se basèrent sur une démarche trop vague. Son désir restait pourtant inchangé ; il croyait puissamment pouvoir trouver des fragments d’âmes ou de psychés laissées par les morts de passage ou par les morts définitifs.
Des aperçus de Korsyne avant sa destruction ? Des mots oubliés ou des révélations ?

Il y devait y en avoir quelque part.
Il y en avait forcément.
Il refusait de croire que la mort signifiait la fin.

Tous ceux qui traversaient ce monde de mort y laissaient une part d’existence, sinon comment expliquer les pertes évoquées par ceux qui ressortaient des Piliers de Poussière. Carences, diminutions des capacités physiques, trous de mémoire, folies, cauchemars.

De passage au milieu des ombres, les symbiosés étaient alimentés par une énergie mystérieuse mais était-il possible que cette énergie se nourrisse en retour d’eux ? Si tel était le cas, ladite énergie comporterait des traces du passage des symbiosés trépassés et le loup tenait ses informations s’il parvenait à remonter jusqu’à ces traces.

Ces empreintes.

Léonal se redressa dans les ténèbres.
Il était un réceptacle d’énergie dans le néant et il se mit à en chercher d’autres, différents des poussiéreux qu’il quitta en chutant. L’énergie environnante était reliée à tout, pensait-il, alors peut-être l’était-il lui aussi…


 
Narrateur

Le Luang 18 Otalir 1510 à 22h53

 
Un temps infini ou infime s'écoula.
Léonal était seul.
Nul écho. Nulle empreinte. Nulle révélation.
Seule la solitude était sa source de satisfaction...

Il ressentait pourtant.
Savait qu'il existait. Exister.
L'existence plutôt que l'essence.

Léonal sentit une vibration.
Il cherchait l'existence. Mais les seules autres existences étaient celles des autres morts auxquels il s'était fermé.
Il n'entendait plus Krépion. Il n'entendait plus rien.
Il savait, incidemment, qu'il pouvait renouer le lien. Retrouver d'autres morts.
D'autres existants.

Mais lui comme eux n'étaient plus que cela.
Nulle essence. Juste des existences.
C'était une clef, il le ressentit.
Une clef complexe et peut être douloureuse.
Une clef lourde et difficile à manier.

Qu'est-ce qui les maintenait dans l'existence ?
Sans essence en ce néant malléable, qu'est ce qui les portait ?
Étaient-ils détachés ? Séparés ?
Léonal sentit qu'il aurait du mal à trouver la réponse seul.
Car seul, il n'avait que lui même comme miroir.

Et la mort se regardait elle même dans ses yeux...


 
Léonal

Le Julung 21 Otalir 1510 à 23h34

 
Posture redressée.
Posture repliée.
Éternelle gymnastique du couard au grand cœur.


Seul, il n'avait que lui même comme miroir...à cette idée, le Peureux se mit à trembler de tous ses membres. Les miroirs, ainsi que les chats, trônaient au sommet de la pyramide de ses peurs. Ces deux choses (Léonal refusait de considérer les chats comme des êtres vivants) se rapportaient en effet aux affaires de l'âme et de la dépossession, sujets tabou dans la famille du Rêvant. Leur simple évocation suffisait d'ailleurs à faire bouder le pépé de Léonal.

FrankyZ dit :
TU VAS PAS TE REMETTRE A CHIALER, PUTAIN.


Je ne "chiale" pas ! C'est juste que... tu connais mes phobies et ces histoires de miroirs. D'habitude, il m'en faut peu pour avoir peur mais le simple fait de me savoir décédé conjugué au simple fait de penser à un miroir me...

FrankyZ dit :
ÇA VA, ÇA VA. FAIS PAS CHIER.

Léonal soupira. Malgré sa tentative d'intimidation il n'était pas parvenu à calmer la haine de son Mou très longtemps - ou du moins, cela ne lui paraissait pas avoir été assez longtemps. Passés les premiers instants de surprises et de doutes, FrankyZ reprit du poil de la bête et se remit en tête de rendre chèvre le loup.

Léonal arrivait à la conclusion que seul il ne parviendrait pas très loin dans ses recherches. Devait-il alors partir à la recherche des autres trépassés ou se contenter de la présence de son mol compagnon ?


FrankyZ dit :
NAN MAIS JE SUIS PAS LA EN FAIT.

... plait-il ?

FrankyZ dit :
JE DIS QUE JE SUIS PAS LA.

Euh... sans vouloir te vexer ni chercher à paraître mal poli, je t'assure que tu es bien là. Mes oreilles peuvent (helàs) te le confirmer.

FrankyZ dit :
NAN. NAN. CA C'EST TON IMAGINAITON. OU UN AUTRE TRUC. T'ES MORT DUCON, ET TU CROYAIS PAS QUE J'ALLAIS TE SUIVRE, NAN ? MAIS QU'EST-CE QU'IL CROIT L'AUTRE... MOI JE SUIS DEHORS A ME DORER LA PILULE, TRANQUILLE.

... mais... comment tu... et pourquoi nous...

FrankyZ dit :
T'INQUIETE PAS. JE SUIS EN TRAIN DE CHERCHER UN AUTRE SYMBIOSE PARCE QUE TOI T'ES VRAIMENT GLAND ET TU ME SAOULES. JE VAIS ESSAYER D'EN TROUVER UN AVEC DES COUILLES.

Quoi ?!

FrankyZ dit :
C'EST COMME ÇA. HÉ OUAIS. J'AI VU UNE NELDA AVEC DES NICHONS DE DINGUE. JE VAIS L'ABORDER ALORS A PLUS.


Léonal, paniqué, protesta. Dans le vide et le silence général qu'était son tombeau. FrankyZ avait disparut, d'un coup, sans prévenir, et le Peureux n'aurait jamais songé à regretter un jour la présence de son infâme compagnon.

Seul et abandonné (encore une fois), il se sentait trahi et en proie à une terreur bien supérieure à tout ce qu'il avait connu auparavant. Si le Mou détestable disait vrai, et quand bien même s'agissait-il de l'imagination du loup (n'importe quoi d'abord), il allait laisser en plan le symbiosé et le livrer au néant sans autre forme de procès ! Terrible réalité que celle de se croire sur les sentiers de la résurrection pour arriver finalement dans une impasse.

Bon sang ! Il lui fallait réfléchir vite ! Ne pas paniquer, ne pas paniquer et réfléchir sacrément vite !
A cette étape de son trépas, Léonal n'imaginait pas pouvoir revivre rien qu'en claquant des doigts.
Et c'était bien dommage pour lui.

Son raisonnement le poussait à croire que la proximité d'autres décédés faciliterait son expédition - ou la rendrait moins difficile, nuance à souligner - et lui permettrait de sortir d'ici. Hors donc, il savait que Krepion maraudait quelques centaines ou milliers de mètres au-dessus de lui. En imaginant, bien sûr, qu'il y ait une géographie temporaire du monde des morts.

Une falaise, grosse, coupante, méchante, se dessinait droit devant lui.

Aurait-il eu d'autre choix ? Probable que non.


Alors qu'il entamait le roc, Léonal dû reconnaître qu'il se faisait une autre idée de l'Ascension...


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