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Les Dédales du Luth

Les Gages du Fils Prodig(u?)e

visite à Kenneth Drey
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Sujet lancé par Umbre
Le 23-02-1508 à 19h14
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Posté par Cleya Joranum,
Le 08-04-1508 à 07h36
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Umbre

Le Sukra 23 Fambir 1508 à 19h14

 
Dans le foisonnement merveilleux des labyrinthiques Dédales du Luth, Umbre cherchait le richissime hôtel particulier où demeurait le bureau de prêt sur gage des Drey. Ici, les artistes des rues et autres saltimbanques laissaient notables et hauts dignitaires hanter à leur place les allées sinueuses et pavées d'un domaine qu'ils possédaient habituellement. Arômes délicats de bourgeoises coquettes et senteurs raffinées de gentilshommes précieux embaumaient l'air dans un mélange indécent. Le chambellan, qui se trouvait en territoire bien connu, se demandait laquelle des deux forces il préférait, entre la folie orgiaque des troubadours ou la subtilité vénéneuse des courtisans. À vrai dire, peu importait. Lui-même en était l'hybride parfait. Il passa devant un vieil opéra, un théâtre et une galerie, un fameux tailleur puis s'arrêta. Le message de Krym confirmait l'adresse. Il ne pouvait pas rater la bâtisse, de toute beauté. Le rez de chaussée ? Le Pantin, après un regard aux alentours, entra d'un pas déterminé.

Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Sukra 23 Fambir 1508 à 21h08

 
La double porte en fer forgée, coté rue, est close mais s'ouvre sous la poussée légère du Chambellan. Elle grince juste ce qu'il faut, pour saluer l'entrant. Le tydale entend le son clair d'une clochette qui s'agite, quelque part. Devant lui, un passage aux parois marquetées, en voute aux croisées d'ogives, ouvre sur une vaste cours intérieure.

Umbre n'a pas fait un pas d'une petite porte latérale s'ouvre, livrant passage à un nelda colossal, armuré de pied en cape, qui s'extrait d'un local de garde et se déplie lentement en s'appuyant sur une hallebarde de taille inhabituelle. L'amas de métal et de muscles baisse les yeux vers le pantin et demande d'une voix de baryton enroué :


Que puis-je pour votre service, monseigneur ?

Derrière ce qu'on pourrait assimiler au Minotaure de ce quartier-dédale, une vague agitation trahit la présence d'autres monstres de son acabit.

 
Umbre

Le Sukra 23 Fambir 1508 à 21h29

 
Alors que Umbre se perd un instant dans la contemplation de cette délicieuse entrée qui vient plus loin libérer sa grâce dans une cours intérieur, un colosse massif à l'ombre inquiétante se dresse devant lui avec toute la mesure de sa puissance. Le pantin, un instant, déglutit discrètement puis fait résonner dans le passage la mélodie de sa voix.

Je suis le Chambellan des Arts Umbre, de l'Horloge du Luth.

Puis il ajoute, presque sur le ton de la confidence.

Je viens m'entretenir avec Kenneth Drey de l'affaire qui le préoccupe actuellement, concernant le décès de son père et l'emprisonnement de sa mère. Inutile de vous préciser que tout cela est de la plus haute importance.

Il fixe le mastodonte de fer et de sang en imaginant qu'il est peut-être le dernier de sa portée, faible et maladif. Et que ses nombreux cousins patientent tranquillement dans la pièce adjacente, jouant aux cartes avec difficulté dans une salle de garde trop exigüe.

Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Sukra 23 Fambir 1508 à 23h17

 
Le titan s'incline brièvement :

Bien sûr. Par ici, s'il vous plait.

Il précède Umbre dans une cours en travaux : des échelles, des tas de gravats, de sable et de terre, des plantes semi-empotées et des statues protégées de toiles huileuses laissent à penser que l'on aménage les jardins à la nouvelle convenance de leur propriétaire. L'endroit, bien que bouleversé, est potentiellement magnifique. Quatre tours scalaires aux fenêtres d'angles lui donnent un cachet extraordinaire.

La lourde porte de l'entrée du bâtiment principal étant dégondée et posée de travers, sans doute dans l'attente d'être changée, le garde nelda entre par une serre intérieure aux baies rehaussées de vitraux qu'un soleil généreux inonde de lumière. La course des taches colorées dans le dos métallique du colosse en marche évoque celle de ballons qu'on aurait lâchés dans un ciel d'orage...

Enfin, les deux êtres dissemblables pénètrent dans un couloir où les boiseries dominent, dans un concert de couinement gracieusement offert par un parquet taquin. Finalement, le nelda stoppe devant une porte, qu'il frappe délicatement trois fois.

Une voix claire et androgyne se fait entendre :


Oui ?

Le Chambellan des Arts, monsieur.

Faites-le entrer.


Plus cérémonieux qu'un passeur d'âmes, le cerbère ouvre la porte et s'écarte pour laisser passer Umbre.

Le bureau est vaste, illuminé par une grande fenêtre concave sans rideaux. Un jeune tydale se lève tandis que le Chambellan s'avance et que derrière lui, une main grosse comme sa tête referme la porte. Le garde est entré et se tient droit, cois, sur le coté...


Chambellan des Arts... Umbre.
Je suis flatté.
Intrigué.
Ravi.




Kenneth Drey s'incline gracieusement, souriant, insolemment jeune et charismatique, avant de disposer un fauteuil à l'intention de son hôte.

 
Umbre

Le Dhiwara 24 Fambir 1508 à 00h11

 
Pendant quelques minutes le pantin s'est laissé guider dans un palais en chantier dont la finesse en impose même à la grossièreté des travaux, ouvrant sur des devinettes sans âge où la richesse fraye avec le beau dans un mélange exquis. Si pour lui, l'Amphithéâtre du Luth demeure supérieur en majesté et en goût, cet hôtel a cependant un charme intime et personnel très particulier, une âme forte et profonde dont il savoure les détours.

Comme transporté par l'onirisme des lieux, Umbre ne voit pas venir la fin du voyage et c'est un peu ailleurs qu'il entre dans le grand bureau du jeune Drey. De l'environnement, le regard térébrant du Masque passe à l'individu. Il profite de son arrivée et des salutations d'usage pour scruter Kenneth, s'attardant sur ses mots et leurs intonations, ses gestes et leurs attitudes. Mais il n'y a rien d'inquisitorial dans sa démarche, seulement les vieilles habitudes d'un esthète doublé d'un courtisan.

Il prend place dans le fauteuil qu'on lui offre en considérant brièvement la vue que dégage la fenêtre.


Confrère Drey, curiosité et ravissement sont ici partagés. Je suis heureux de pouvoir mettre le doigt sur un mystère dont on m'a vendu le portrait sans rien me révéler du sujet. J'espère que notre entretien éclaircira l'ombre d'une certaine tapisserie cousue de fils d'or.


Puis, dans un mouvement de main gracieux, le chambellan désigne les lieux.

Laissez-moi avant toute chose rendre hommage à votre goût - ou à celui de vos parents - quant au choix de ce bâtiment. Il est somptueux et tend à nous remettre en mémoire que l'architecture est davantage qu'un art, mais bel et bien une révolution permanente.

Il est cependant dommage que vous ayez pris cela au pied de la lettre. Pourquoi l'enterrez-vous sous d'obscurs traitements ? Il était temps que le vieil homme se refasse faire une beauté ?


Anodine ou calculée, la question est posée avec sincérité car l'histoire et l'esprit de cet endroit intéressent désormais Umbre au plus haut point. Tout comme celui du financier qui lui fait face.

Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Dhiwara 24 Fambir 1508 à 01h03

 
Kenneth ne s'assied pas tout de suite. Il s'approche de la baie, le dos momentanément tourné, sans pour autant flirter avec la discourtoisie. Puis il réinvesti l'espace naturel de son bureau et sourit tristement à la dernière phrase d'Umbre.

Voulez-vous boire quelque chose ? J'ai là quelques liqueurs qui plaisaient à mon père. Je vous accompagnerai d'une eau pétillante, car mon palais s'accommode mal des sensations fortes.

Sortant verres et carafes d'un meuble aux ouïes grillagées, il dispose le nécessaire devant lui, discutant comme s'il énonçait des trivialités. Pourtant, le Chambellan des Arts devine que sous des dehors dilettantes, le jeune homme est concentré :

Tout changement est un bien.
Il produit toujours, à terme, une amélioration, et l'avenir se montre inévitablement plus riche que le passé, si tant est qu'on lui laisse le temps de se déployer avec suffisamment d'aise.

Un artiste sait cela... puisqu'il en est peut-être le plus parfait agent.


Portant ses mains jointes à ses lèvres et souriant comme s'il s'amusait déjà de la réponse, Kenneth poursuit :

Il le sait, oui.
Mais sait-il pourquoi ?


 
Umbre

Le Dhiwara 24 Fambir 1508 à 06h30

 
Umbre croise les doigts, coudes posées sur les bras du fauteuils. Un léger hochement de tête et un s'il vous plaît sincère répondent à l'invitation plaisante d'une boisson paternelle. On ne refuse pas un bon alcool (surtout pas une bonne liqueur), c'est une question de caprice et de principe. L'enfant est subtil, la Rose avait raison. Il répond aux formules à peine voilées du chambellan par d'autres tournures sybillines. Voilà qui est plaisant, et dangereux. Mais cela fait partie du jeu. À la question de Kenneth, le Masque penche la tête de côté, évoquant le mouvement artificiel d'une marionnette ou saccadé d'un oiseau.

L'artiste sait juste que le changement est bon, car c'est par et pour lui qu'il existe. Mais les vicissitudes de l'inspiration et les volontés des muses, bien souvent, restent insaisissables. Le changement est pour lui un besoin mystique, passionnel et sensuel. Il ne fait que répondre aux nécessités que lui impose ce souffle occulte, aux ordres que lui délivre d'invisibles puissances.

Comme vous l'avez si bien dit, l'artiste reste un agent. Un intercesseur.

Certains partent en quête de réponses et y perdent définitivement la raison, d'autres préfèrent sagement laisser venir à eux le fleuve de la création sans en chercher la source.


Un temps, léger. Juste ce qu'il faut pour laisser les mots se dissoudre dans l'air et imprégner l'atmosphère de leur substance. Les yeux vairons contemplent l'éclat du service de table tout en remontant lentement leur vue vers Kenneth, à mesure que les paroles de leur propriétaire se déploient de nouveau dans l'espace.

Les oeuvres de l'artiste, elles, expressions du changement, sont plus aisément identifiables et compréhensibles malgré leur part éternel de mystère et d'absolu. Leur nature, leur sens, leurs conséquences sont généralement à la portée de tout bon spectateur éveillé à la conscience esthétique.

Pour les comprendre pleinement, avec l'oeil critique de celui qui désire en déceler tout les secrets, il est cependant utile - obligatoire ? - d'en identifier le ou les commanditaire/s (si il ne s'agit pas des Instances de l'Art). Car ils amènent alors sur l'ensemble une lumière inattendue et révélatrice.

Mais surtout, ils détiennent le fameux pourquoi.


Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Dhiwara 24 Fambir 1508 à 10h33

 
Kenneth écoute attentivement, le regard perdu dans les bulles de sa boisson, avant de hocher la tête d'un air qu'Umbre connait bien : celui d'un spectateur averti, qui manifeste ainsi le sentiment plaisant d'un critique satisfait par la prestation à laquelle il assiste.

Vous portez l'art du chat à des altitudes vertigineuses, Chambellan Umbre : que l'on parle de mes jardins en jachères ou des fondements de la révolution permanente qu'est ce monde changeant, vous retombez systématiquement sur vos pattes, à l'endroit précis qui vous sied.

Cela engendre un cheminement intellectuel d'autant plus impressionnant qu'il est court, formulé en quelques sentences efficaces mais toujours élégantes. Cependant, cette capacité élastique à tout rapporter aux objectifs de votre présente visite, si elle m'instruit desdits objectifs, me prive de digressions que j'imagine déjà positivement surprenantes.

Pourquoi ne nous rencontrons-nous que maintenant ?


Levant son verre à hauteur du regard et jouant de l'image déformée du Chambellan, il poursuit :

Question purement rhétorique : parce que trop d'idiots nous cernent et nous séparent des choses rares qui méritent toute notre attention.

Vous êtes très certainement ici de votre fait, personne ne vous commande, tout au plus vous dévie-t-on et encore, en le demandant poliment... votre masque de pantin n'abuse que les sots. Je trinque à votre visite, quelles qu'en soient les conséquences, pour l'amour de l'art et du changement.

A la vôtre, monsieur !


Il boit d'un trait. L'eau pétillante l'enrhume et lui pique les yeux.

 
Umbre

Le Dhiwara 24 Fambir 1508 à 19h44

 
Il n'est jamais trop tard pour les bonnes rencontre, Avih Drey. Votre destin n'est pas scellé.

A la votre, jeune homme !


Umbre boit avec plus de mesure et de délectation, la fine ouverture qui lui sert de bouche dans ce masque d'argent l'y contraint, mais l'amour des saveurs lentement dégustées y est aussi pour beaucoup. Il se laisse porter par les voluptés de l'alcool sans troubler le petit silence qui s'est installé dans le vaste bureau. La compagnie du Drey est en effet agréable. Il repose son verre et reprend la discussion, bien que sous une forme bien moins alambiquée.


Comme vous avez pu le deviner, ce ne sont malheureusement pas les beautés du monde qui m'ont poussé dans ce château aux mille grâces pour en déranger le seigneur. Je dirais que si la mort possède quelquefois sa propre poésie, celle qui a bouleversé votre existence n'a rien d'une envolée lyrique.

Il est inutile de le cacher, je cherche à découvrir l'envers du décor et le metteur en scène de cette pièce mortelle qui se joue sur nos planches.

Je sors tout juste d'un entretien avec votre mère, rose noble dans une cage funeste, et m'en viens ainsi à vous, bien décidé à compléter les cartes de cet étrange jeu. Si mes manières ou mes questions vous paraissent brutales ou déplacées, faites-le moi savoir mais n'en prenez pas ombrage, je suis en ce moment un enquêteur du Luth, un Chambellan soucieux et un Confrère alarmé.

Et le temps est contre moi, contre vous, contre nous. Voilà de quoi je suis l'esclave. Douloureux constat.


Un silence, ponctuation dans son discours et parenthèse qui lui permet de goûter de nouveau aux délices de cette liqueur fruitée.

Plusieurs éléments se bousculent, pardonnez le chaos d'une dialectique sans stratégie. J'aimerais commencer au plus vite, pour ne pas laisser la gêne et la douleur traîner sur notre échange. Peut-être alors, pourrons-nous discuter de sujets plus spirituels.

Tout d'abord, point important et sensible qui m'apportera peut-être vos foudres, j'aimerais savoir si seul l'amour, lui et lui seul, vous engage à libérer pour votre mère les sentiers de l'innocence ? Il est évident qu'elle vous aime et porte en son âme l'épanouissement d'un être aimé en retour. Mais il est difficile de voiler sur cette histoire les intérêts financiers qu'elle véhicule.

J'aimerais également savoir si vous avez des ennemis, dans quelque milieu que ce soit, capables de représenter de terribles nuisances. Si par la même occasion, votre père vous avait confié quelques noms auxquels lui-même portait plus d'attention que les autres. Bref, en un mot comme en cent, les Drey ont bien des adversaires d'envergure, de vieux concurrents ?


Umbre s'arrête, scrutant le visage de son interlocuteur. Il a encore bien des questions en réserve, mais il est important de ne pas les asséner toute en même temps. Qui plus est, elles sont plus fines et spécifiques. D'abord la toile de fond, les éléments importants et grossiers. Ce sont déjà des morceaux considérables. Les réponses qui en découleront décideront du reste, en partie.

Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Dhiwara 24 Fambir 1508 à 23h38

 
Les entrechats s'interrompent un peu vite au goût du petit prodige. Il soupire intérieurement, songeant que les occasions d'ouvrir grand les fenêtres de l'esprit en bonne compagnie sont vraiment trop rares, d'autant que la mort violente de son père adoptif hante encore ses nuits de trop jeune homme mature. Il est bien sûr hors de question d'y faire seulement allusion : montrer ses faiblesses est inimaginable.

Mais si l'artiste ne fait nul mystère de ses objectifs, quelle peut être sa motivation ? Cette question doit être résolue :


Enquêteur du Luth ? Quelle curieuse association de mots !

Je vais tâcher de satisfaire votre saine curiosité, à charge de revanche : faites-moi l'honneur de clarifier vos intérêts dans cette sombre histoire qui me voit perdre un cher parent, Chambellan Umbre. Vous n'êtes pas tenu de me répondre, mais comprenez que cela m'intrigue...


Kenneth recule dans son fauteuil et lève les yeux, comme un conteur cherchant son inspiration :

Votre question ne m'offense pas. Non, l'amour n'est pas le seul moteur de ma démarche auprès du détective Lunge, concernant Rose : vous pouvez ajouter à la liste des vertus mobilisées la gratitude, l'affection et le désir de justice.
Concernant mes vices... je n'ai pas besoin d'y faire appel. La vénalité, pour être clair, n'a pas voix au chapitre.

Sans doute le savez-vous : innocenter ma mère n'est pas la clé de l'héritage. Ce qu'il faut, pour cela, c'est identifier formellement l'assassin - ou les assassins - de mon père. Je m'y atèle... et soyez certain qu'il tombera - ou tomberont - lorsque j'aurai la disponibilité requise pour manœuvrer comme je l'entends.

Le temps vous manque ? Ce n'est pas mon cas. Au contraire, à mesure qu'il passe, il m'apporte son lot d'or et de réponses...

Il y a peu, mon conseiller et enquêteur privé m'a informé des meurtres commis sur d'autres Maître-Chands. J'ai alors compris que Rose était sinon tirée d'affaire, tout au moins en sursis : l'évidence du complot s'imposerait même au plus obtus des nôtres. Exécuter madame Drey serait commettre un crime, tant que l'affaire entière n'est pas résolue. Cette vérité la sauve provisoirement du billot.


La question des ennemis assombrit l'humeur de Kenneth. Il a hérité de ceux de son père, du jour au lendemain, sans s'y être préparé...

Ai-je des ennemis ? Bien sûr, c'est inévitable, compte tenu de mon activité. Mais je m'estime plutôt heureux en cette matière : je n'exerce pas le même métier que feu mon père...

Monsieur Arthur Drey était responsable d'un Fundeq et à ce titre, collectionnait les inimitiés en grand professionnel : tous les exportateurs d'Arameth l'auraient bien pendu, de même que les nombreux impétrants recalés lorsqu'il s'est agit de le promouvoir Maître-Chand. Cela nous fait déjà une bonne cinquantaine de personnes. Ajoutez-y les mauvais payeurs du cabinet de prêt, et vous frisez la soixantaine de suspects. Complétez le tableau avec les étrangers qui voient en nos comptoirs autant de pustules dans leur paysage local, et c'est tout Syfaria qu'il convient d'approcher dans votre enquête...

Ne parlons pas des créatures corrompues du S'sarkh, mais qui nous dit qu'elles ne sont pas concernées ? Voire initiatrices de cette machination en actes ?

Maintenant, si je devais me choisir un ennemi personnel, direct, je trancherais sans conteste pour dame Clémence Quint. En mon affaire de Prêt, elle est ma seule véritable concurrente et surtout, la seule susceptible de m'éliminer physiquement sans le moindre prémisse de... scrupule.

Fondamentalement, je pense qu'elle ignore le sens de ce mot.


 
Umbre

Le Luang 25 Fambir 1508 à 00h27

 
Le chambellan prête une oreille très attentive aux propos de l'adonis, dans leur contenu et dans leur forme. Il cherche aussi, comme toujours, à percer les émotions qui se cachent derrière les mots et leur donne leur force profonde ou leur artifice de convenance. Son esprit fait le trie rapidement, entre ce qui l'intéresse et ce qu'il est préférable d'ignorer. Le personnage continue d'éveiller chez le pantin un intérêt certain, même si il n'est pas certain de le croire entièrement. Kenneth, en tout cas, semble prompt à satisfaire sa curiosité et Umbre se sent prêt à faire de même.

Il y a bien des choses que les gens ignorent sur le Luth monsieur Drey. Vous donnez l'information ne changera pas grand chose dans la mesure où nous sommes déjà la victime de bien des rumeurs dans la Confrérie. Je vous juge suffisamment spirituel, intelligent et brillant pour que vous soyez mis au courant.

L'Horloge du Luth est un organisme d'espionnage et d'information, nous brassons les renseignements à travers tout Syfaria, au travers de nos ambassadeurs ou de nos artistes. Pour ainsi dire, nous sommes la lumière et l'ombre de la Confrérie.

Il nous revient souvent des rôles d'enquêteurs et d'informateurs, travaillant en secret et délivrant au Poinçon ce qui peut leur être utile. À notre façon nous veillons sur la sécurité des Six. Vous n'avez pas seulement un esthète devant vous monsieur Drey, mais un maître-espion.


La nouvelle n'était annoncée sans aucune fierté, sur un ton neutre un peu distant. À vrai dire, il était presque étonné que Kenneth ne connaisse pas ce aspect du Luth. Pour les intrigants et l'intelligentsia confraternelle en général, c'était bien souvent un secret de polichinelle à peine dissimulé derrière une vieux conte.

Ainsi vous comprenez aisément où sont mes intérêts. Mais hormis ce que le devoir m'impose, je suis d'une curiosité insatiable. Surtout lorsqu'il s'agit de cas comme celui-ci.

Ce que le Masque ne disait pas, c'est qu'il aimait avec une passion toute particulière ce genre de jeux politiques, ces complots et ces intrigues. Surtout quand elles prenaient des dimensions folles. C'était pour lui une sorte de drogue enivrante qui avait quelquefois l'avantage de lui procurer quelque inspiration bienvenue. Oui, il y avait le devoir mais aussi le plaisir. Pour lui, ces morts, ces fils, ces plans étaient un art et un jeu tout à la fois. Et il était très joueur et très artiste.

Moi qui comptais vous parler tôt ou tard de Clémence Quint, vous m'avez devancé. Vous savez si votre père avait déjà eu des litiges très prononcés, clairs, voir personnels avec l'ex Maître-Chand ? Peut-être vous-même en avez vous eu directement avec elle. Sur une affaire ou un individu en particulier ?

Nous ignorons encore sa place exacte dans toute cette toile, nous savons juste qu'elle a été remercié quelques temps avant l'arrivée de Fencer de Vhialys à Utrynia et qu'elle porte parfaitement les couleurs d'une araignée implacable. Allez d'ailleurs savoir si son départ soudain n'est pas un peu de son fait. Cela est furieusement bien tombé.

Mais difficile de bâtir d'autres théories dans le vide. En interrogeant votre m...Rose, il m'est apparu que cette histoire de prêt sur gage tient une place unique dans ce tableau. Le lien me semble cependant trouble entre tout ces meurtres insulaires et cette entreprise de prêt. Un surendetté qui avait contracté chez tout ces maîtres-chands de furieuses sommes ? Peu probable. Élimination de concurrents ? Peut-être. Pure démence ? Sans aucun doute. Il me manque encore bien trop d'éléments.

Mais pourquoi, vous demandez-vous, j'insiste sur cela ? Le fait que dame Quint possède un bureau d'une importance extrême, tout comme vous, et le fait qu'un ami de votre père aurait dit à ce dernier, peu de temps avant sa mort "Tu seras puni par là où tu as pêché". Étrange, n'est-ce pas ? Ce n'est peut-être rien, mais le fait est que cumuler la position de Maître-Chand et le prêt sur gage est illégal. Vilain pêché !

Et qu'un homme sait sans doute quelque chose, gambadant actuellement dans la nature. Vous ne connaissez aucun ami véritable de votre père ? Rose m'a dit qu'il n'en avait guère plus. Visiblement une bonne âme a songé utile de le prévenir. Une bonne âme ou un esprit menaçant. Tout détail a son utilité.


Un soupir, Umbre ressasse les questions qui s'accumulent, les équations et le problème.


Votre père vous a-t-il paru différent, vous a-t-il dit quelque chose d'étrange, avait-il une affaire particulière sur le dos ces derniers temps ? Vous étiez davantage dans ses histoires commerciales que son épouse, vous savez sans doute quelque chose qu'elle n'a pu me révéler. Un dossier qui lui causait du soucis ?

Quant à Clémence Quint, mis à part la réputation qu'elle véhicule avec son aura de mauvaise augure, propageant les corbeaux à tout va, y a-t-il des rumeurs particulières à son endroit ? Des histoires qui lui tourne autour, des vieilles légendes qu'il serait bon de prendre au sérieux ?

Par ailleurs, votre "guerre" avec la dame ne touche qu'aux strictes sphères commerciales ?


Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Luang 25 Fambir 1508 à 14h37

 
Kenneth enregistre les informations nouvelles avec avidité : il est resté trop longtemps éloigné d'Arameth, et il l'a quittée trop jeune pour en connaître toutes les subtilités. Ce rôle souterrain dévolu au Luth... il faudra creuser.

Clémence Quint est de la vieille école. Elle a bâti sa fortune et sa réputation en usant d'une arme efficace, mais réservée aux esprits faibles : la violence. Mon père m'a plusieurs fois mis en garde contre cette dame, sans toutefois explicitement détailler les crimes qu'il semblait lui attribuer.

Alors, j'ai demandé à quelques personnes compétentes de se renseigner. ils m'ont fait remonter des informations plutôt sinistres à son endroit ; en clair, tout laisse croire que dans le passé, la Maître-Chand n'ait pas hésité à mutiler quelques clients trop peu empressés, à son goût, de régler leurs dettes...

Oh, je n'ai ni noms, ni preuves à vous produire : je parle là d'évènements enfouis dans un passé se comptant en années, et bien antérieur à l'affaire qui vous préoccupe et qui m'afflige. J'en parle pour satisfaire votre légitime curiosité, dont je vous suis gré d'avoir explicité l'origine.


Lorsque le Chambellan cite la formule rapportée par Rose, le jeune homme frissonne comme s'il avait vu un fantôme traverser la pièce. Mais il n'en parle pas tout de suite :

Le Prêt sur Gage... il tient une place essentielle dans le tableau-puzzle qui vous échappe encore. Clémence Quint a commis le pire, dans le cadre de cette activité qui flirte parfois avec une forme légale de grand banditisme. Vous me direz qu'en choisissant cette voie, je m'expose moi-même aux vices dont je prétends dénoncer les excès ? Nullement...

Je ne suis pas de la vieille école, main de fer dans un gant de velours. Je suis un financier. Un mathématicien. Ma seule règle est la règle à calcul. Je détecte les bons clients comme d'autres les belles œuvres, Chambellan Umbre. La brutalité n'est pas dans mes manières, et j'entends ne pas m'y abaisser.


Kenneth Drey regarde en biais son interlocuteur, comme hésitant. Umbre sent qu'il veut dire quelque chose, qu'une bataille féroce se livre dans son esprit. Finalement, il se lève et marche de long en large dans son bureau, les bras croisés, les yeux baissés, avant se regarder à nouveau au dehors. Il prononce enfin la phrase qui le taraude :

Tu seras puni par où tu as pêché.

Ce n'est pas un ami de mon père qui a prononcé ces mots...
C'est moi.


 
Umbre

Le Luang 25 Fambir 1508 à 19h01

 
Le pantin retient précieusement les informations à propos de Quint. Le personnage qui se dessine est de plus en plus terrible et antipathique. Il reste encore difficile d'affirmer quoique ce soit sur son implication dans cette affaire et il le sait. Être coupable de certaines choses ne signifie pas être coupable de ces meurtres. Mais il n'en demeure pas moins que de la torture à l'assassinat, le passage n'est pas difficile. Reste à identifier le taux de subtilité de cette femme. Puis il observe attentivement Kenneth quand il lui révèle non sans tension la provenance de la phrase. Avant de poursuivre, le chambellan revient néanmoins sur le prêt sur gage.

Je suis heureux de voir que vous partagez avec moi l'idée que ces entreprises tiennent une place essentielle là-dedans. D'ailleurs....

Rose m'a explicitement dit que le prêt sur gage avait rapidement éveillé votre intérêt, vous avait littéralement passionné. Pourquoi ? Arthur Drey avait à son actif bien d'autres affaires commerciales qui auraient pu charmer votre esprit et bénéficier de vos dons pour les finances. Plus complexes, plus retors ou plus simples et faciles. Pourquoi le prêt sur gage ? Je ne m'y connais pas plus que cela en commerce, tout juste ce qu'un bon Confrère doit savoir, mais le prêt sur gage ne me semble pas plus attrayant qu'autre chose. Si ?

D'autre part, quelle place aviez-vous dans le conflit qui opposait vos parents quant à votre avenir ? Si j'ai bien compris, Arthur désirait vous voir comme lui, fameux marchand et Rose, artiste ou quelque chose du genre ? Ce ne sont pas réellement des vues proches ou semblables. Je suis curieux de connaître l'avis du principal intéressé !


Umbre reprend son souffle en même temps qu'il se saisit de nouveau de son verre pour en achever la boisson, parfaitement délicieuse et dont son palet se souviendra certainement quelques temps encore. Quelle vilénie que la disparition précoce des gens de bons goûts ! Au moins le patriarche Drey a-t-il laissé derrière lui un jeune homme tout aussi raffiné. Si ce n'est davantage et paré de prodigieuses qualités.


Et pour cette phrase, puis-je vous demander d'éclairer son contexte, sa signification et sa portée ? D'après Rose, votre père était particulièrement bouleversé...

Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Luang 25 Fambir 1508 à 23h52

 
Kenneth Drey observe le Chambellan avec un intérêt croissant :

Vous posez vos questions comme une araignée tisse sa toile : en spirale. En tours et détours, en circonvolutions, nous plongeons vers le cœur de l'affaire, même si ni vous ni moi n'en cernons l'exact contour, je le pressens. Lentement mais surement, vous progressez vers le centre. Cette façon de faire est certainement la bonne... Plonger tout droit, c'est très souvent manquer sa proie.

Vous ne devriez pas comparer dame Quint à ces petits animaux dont les créations de soie nous fascinent tant, monsieur : ils ne le méritent pas.

Pourquoi ai-je choisi le Prêt sur Gage plutôt que le commerce ? Précisément parce que cette activité tristement connotée doit changer. Le changement, souvenez-vous, est mon credo. La Confrérie des Six est une machine à vendre, à commencer par son sel : tout ce qui peut être fait en la matière l'est déjà. Comment pourrait-on améliorer les choses ? Comment pourrait-on grandir ? Quel est le moteur de l'initiative, Chambellan Umbre ?

Le Prêt. Tant qu'il sera pratiqué par des banquiers frileux ou des barons de la pègre, il fera fuir les plus brillants esprits, donc les meilleurs clients. J'entends lui donner ses lettres de noblesse, et lancer des affaires qu'aucun concurrent n'oserait financer. J'entends dynamiser l'économie d'Arameth comme personne ne peut, ne veut ni ne sait le faire.


Quelque chose se passe. Une sorte d'aimantation furieuse : Umbre ne peut détacher son regard de celui de l'adolescent.

J'entends imprimer une nouvelle politique économique à cette ville, à cette faction, qui consolidera notre leadership et nous donnera les moyens, à terme, de mettre à bas l'emprise nemen !

Le jeune tydale a presque crié ces derniers mots. A-t-il vraiment crié ? Il est dressé comme un dompteur de fauve, les yeux brillants, les lèvres pleines et gonflées de sang. Le Chambellan n'a pas souvenir d'avoir jamais assisté à pareille métamorphose, celle d'un enfant devenu tribun. Il doit se maitriser pour ne pas applaudir.

Un mouvement d'épaule, un changement de pose et de voix... l'enchantement disparait aussi vite qu'il est apparu. Kenneth change de sujet, apparemment inconscient de ce qu'il vient de faire :


Rose a toujours voulu que je persiste dans ma première passion. La musique. Mais elle n'est pour moi qu'un pis-aller, l'expression provisoire d'une réalité sous-jacente plus profonde, plus signifiante : celle des nombres qui nous gouvernent. L'arithmétique, la géométrie, la statistique : telles sont les langues qu'il faut connaître pour parler aux dieux cachés du monde qui nous entoure. La musique m'intéresse parce qu'elle est la plus mathématisée des disciplines artistiques.

Sans le savoir, Arthur et Rose Drey avaient tous deux raison. Il m'était impossible de les réconcilier...


Le jeune homme se rassied et de nouveau, sourit à son visiteur. Mais là, Umbre a le sentiment déroutant qu'il lui sourit pour la première fois :

J'ai prononcé ces mots un matin.

Mon père était rentré la veille d'un voyage en Arameth, et m'avait couvert de cadeaux. Lorsque je lui ai demandé d'où ces tissus, parfums, livres, joyaux, horloges, armes, tableaux et autres merveilles provenaient, il m'a répondu : secret.

Evidemment, c'était un jeu... nous savions d'où il tenait ces choses. Il les tenait de ses marchands et grossistes, toujours prodigues en biens et produits de luxe pour s'attirer nos bonnes grâces. Alors, j'ai calé mes scrupules et mes doutes sous mon bras, avant de le questionner sur son voyage.

Le soir, j'ai repensé à cette manne providentielle. J'étais troublé, comme si quelque chose de malsain m'avait pris dans ses rets. J'ai mal dormi. Je regardais, dans ma chambre, tous ces cadeaux indus, expression de la peur et non de l'amitié. Finalement, je me suis assoupi...

Au petit matin, lorsque j'ai vu mon cher parent adoptif attablé pour le petit déjeuner, je l'ai rejoint. Il tenait une cuillère en argent dans la main. Il l'avait sortie la veille d'une des dix malles qu'il avait rapportée d'Arameth.

Je l'ai regardé au fond des yeux, j'y ai lu sa mort prochaine, et j'ai dit ce que vous savez.

J'ignorais qu'il en avait parlé à ma mère.


 
Umbre

Le Matal 26 Fambir 1508 à 09h21

 
Umbre est littéralement fasciné. Il a eu l'occasion de considérer l'intelligence et la vivacité du garçon, sa compagnie agréable et son verbe facile. Mais il vient à l'instant d'assister à un spectacle prodigieux qui confirme ce que son intuition lui souffle depuis le début à propos de l'éphèbe. Sa grandeur apparente est le masque de la folie, et le chambellan ne connait que trop bien le sujet. Kenneth Drey, visiblement sans le savoir, vient d'ajouter une pierre considérable à l'édifice de cette enquête. La pierre doit cependant être examinée, étudiée en profondeur et replacée dans un contexte approprié.

L'esthète songe, en ressassant les propos du terrible Kenneth, qu'il a peut-être pris le problème à l'envers. Que tous ces meurtres et cette folie ne cherchent pas à nuire à la Confrérie mais au contraire, à l'optimiser. La fin justifie les moyens. Surtout quand la fin est noble, issue d'une volonté "bienfaitrice".

Ce second visage, ce double implacable, ce financier tribun aux allures de requin, lui, aurait très bien pu entamer l'élimination progressive de tout ceux nuisant à la réputation du prêt sur gage et aurait pu, par son déroutant maniétisme, ensorceler les assassins. Hypnotiser, convaincre, contrôler, posséder...Au vue de l'étrange phénomène dont le pantin vient d'être la victime et le spectateur, il n'est pas stupide d'imaginer que Kenneth a pu manipuler des volontés pour achever son plan, son opération, l'instauration de sa "nouvelle politique économique" qu'il est le seul à "pouvoir, savoir, vouloir" appliquer.

À commencer par son père. Ce "pêcheur". Comment il a atteint les autres agresseurs est plus obscur, problématique. Mais pas inimaginable. Qui Umbre a-t-il vraiment en face de lui ? Un acteur, un illuminé ou un schizophrène ? Les trois sans doute. Et Quint dans tout cela ? Elle s'enferme chez elle, fuyant le monde et son ennemi. Future et ultime objectif de Drey peut-être....

Non, du calme. Ne pas s'emballer, nuancer et considérer tous les angles. Comme il le dit si bien, "ne pas plonger tout droit".


Pour tout vous dire, je suis un adepte relatif du vieil adage "combattre le feu par le feu" et l'applique souvent aux affaires dont j'ai la charge. À celle-ci, toile d'araignée, je préfère y évoluer comme sa tisserande.

Puis d'un vague geste de la main, il chasse cette réflexion et revient au coeur de la discussion.

Votre vision semble novatrice. Inventer et réinventer nos débouchés, notre commerce, notre avenir. Superbe entreprise que de vouloir dynamiser et bousculer nos vieilles habitudes en leur cherchant un sang neuf et des voies alternatives. Néanmoins, les grandes idées, surtout quand elles sont précoces, se heurtent toujours aux piliers fondamentaux de la vieillesse réactionnaire et conservatrice. J'ai du mal à concevoir comment vous allez rendre ces banquiers moins frileux et ces barons de la pègre moins criminels ! Vous ne pouvez mener cette tâche et porter ce fardeau seul.

C'est qu'il y a un plan derrière tout cela, que vous y avez réfléchi et songez à l'appliquer un jour ou l'autre, non ?


Le désir de voir de nouveau émerger le politicien-commerçant afin de mieux le connaître se mêle à l'insatiable curiosité du pantin, prêt à engouffrer le savoir et à se délecter de la douce ambroisie qu'il procure. Mais déjà, il jongle avec un autre sujet, presque aussi passionnant, un peu plus...métaphysique.


Vous avez indéniablement un avantage sur moi.

J'ai la prétention de me considérer bon compositeur et interprète convenable mais ne m'y entends guère en chiffres. Et je sais pourtant, on me l'a dit avant vous, que c'est une science qui trouve en la musique une soeur parfaite. Je crois être capable de cerner la forme divine que les mathématiques pourraient révéler au poussiéreux. Pour tout vous dire, je la conçois même sans pouvoir vraiment la toucher. Comme vous j'imagine. Je m'y entends dans la mesure où je suis entropiste, mais bien peu au-delà. En fait, ce que je touche du calcul reste souvent de l'ordre de l'intuition et de l'instinct, assez étrangement.

Oui, un peu comme lorsque je compose une mélodie. C'est sans doute pour cela que je manie cette sphère avec quelque habileté....Nous en revenons ici aux démons insaisissables de l'inspiration.


Le sujet ne manque pas de passionner l'esthète masqué, qui plonge un instant dans des réflexions personnelles. Il se met à songer à ses premiers vertiges entropiques et à sa première rencontre avec la musique, lointains souvenirs pourtant si proches. Mais il s'extrait bien vite du cocon chaleureux de sa mémoire en se promettant d'y revenir plus tard. Les deux domaines sont les sujets de futures recherches pour le moment mis en parenthèse par les nécessités du présent.

Du reste pardonnez-moi, mais il est assez particulier, original, d'admirer dans les yeux de son prochain l'imminence de sa mort. Avez-vous régulièrement ce genre d'impressions fugitives et de visions limpides ? Je trouve, qui plus est, que votre funeste révélation n'explique pas réellement la précision de votre phrase "par là où tu as pêché". Vous avez vu dans son regard sa mort, bien, mais vos propos ainsi rapportés nous laissent à penser que vous y avez également vu les raisons. J'entends ce foisonnement inconsidéré de dons volés qui vous malmènent, mais de là à être convaincu que cela provoqua sa perte...

Pourquoi, comment ? Je vous concède avoir du mal à suivre tout votre cheminement.


Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Matal 26 Fambir 1508 à 17h58

 
De nouveau détendu, le jeune Drey reprend un verre d'eau de Seltz et dit d'une voix aussi pétillante que son breuvage :

Votre curiosité est éclectique, monsieur. Je vais essayer de la satisfaire, si tant est qu'une tâche aussi ambitieuse soit à la portée d'un pauvre mortel !

J'ai un plan, oui, bien sûr. Il obéit à un principe désarmant de simplicité, j'allais dire de naïveté, mais hors de portée des gens sans qualité :

Pour commencer, je vais développer mon activité de Prêt de façon tout-à-fait classique, à cette différence fondamentale - je n'y reviens pas - que je n'userai pas de violence. Si ce n'est pour me défendre, mais j'ose espérer ne jamais en arriver là.

Pour étriller la concurrence, je proposerai des taux tout bonnement plus avantageux. Je pourrai me le permettre très bientôt, car j'attends une importante rentrée d'argent, indépendamment de toute considération filiale. Je me baserai aussi sur ma compétence de... financier, pour repérer les meilleurs placements et garder une tête d'avance sur Qu... qui prétendrait faire mieux. Enfin, je ferai courir le bruit - pour être franc, je m'y attèle déjà - qu'il existe un établissement de Prêt dépourvu de corbeau, et qui n'entend user que de la justice confraternelle pour faire valoir ses droits et recouvrir ses créances.

Parallèlement à cette série de mesures, je créerai des filiales dans tous les quartiers susceptibles d'intéresser de potentiels clients. Mon but, vous l'aurez compris, est d'obtenir un monopole de fait. Lorsque j'aurai accompli cela, l'actuelle hypocrisie consistant à laisser cette activité économique à des Maître-Chands déjà bien lotis cessera, et tout le monde s'en portera mieux...


Fixant Umbre avec intensité :

Par ailleurs, il se trouve que j'entends développer la communication, et séduire une clientèle de décideurs politiques et culturels via le mécénat. Qu'en dites-vous, Chambellan des Arts ? Imaginez ce que des gens de talents, bien épaulés, bien soutenus, pourraient faire s'ils en avaient les moyens, pour disperser notre culture, notre langue, notre art de vivre, hors de nos frontières ?

Une telle ambition transcende le commerce, monsieur. Cela me prendra sans doute quelques années, mais si l'on me prête vie, j'y parviendrai !


Kenneth s'intéresse à la dernière réflexion de son interlocuteur et s'apprête à y répondre, lorsqu'on frappe à la porte de son bureau. Une voix féminine qu'Umbre ne connait pas se fait entendre à travers le bois de rose aux bas-reliefs cynégétiques :

Maître Drey ? Votre conseiller est là.

Faites-le attendre dans le salon bleu, Sonia. Dites-lui que je l'y rejoins sous peu et servez-lui... un thé citronné.


Se tournant vers le pantin :

Pardonnez cette intrusion... votre compagnie me fait oublier l'heure. Où en... ah oui : la fameuse phrase...

N'avez-vous jamais eu de ces intuitions qui résultent non pas d'une fulgurance ex nihilo, mais d'une lente maturation intellectuelle qui ne dit pas son nom ? L'esprit fonctionne ainsi, parfois. Le mien, en tout cas.

Ce jour-là, j'ai pris progressivement conscience, mais sans l'expliciter par étapes, que mon père adoptif - et par extension, tous les Maître-Chands - prospéraient non pas sur un système, mais sur les failles d'un système.

L'absence de structure de contrôle efficace et la concentration des pouvoirs en un seul poste sont bien sûr cause de cette incurie, les hommes eux-mêmes n'étant pas forcément de fieffées crapules... Pourtant, ce qui m'est venu à l'esprit sur l'instant n'est pas vraiment "quelqu'un va finir par mourir", dit d'une façon dramatiquement prémonitoire, mais plutôt "pourquoi personne n'est-il encore mort" ?

Et comme les autres Maître-Chands me sont presque tous inconnus, donc m'indiffèrent, c'est la mort de mon père qui m'est apparue douloureusement prégnante.

Je note avec soulagement que depuis l'avènement des... mous ? C'est bien cela ? De ces choses qui rendent une poignée de gens télépathes ? ...ce genre de dérive est devenue sinon impossible, tout au moins bien plus facile à prévenir. Mais à considérer ce qui est arrivé à Arthur Drey, je me demande si cette étrange révolution - dont j'attends qu'elle me touche, je vous jalouse, sachez-le - n'arrive pas trop tard...

Tout se passe comme si la mort elle-même rôdait, de Fundeqs en Fundeqs, hors de tout contrôle. Tout se passe comme si quelque chose avait été mis en branle, et suivait désormais son bonhomme de chemin en semant la ruine parmi nos comptoirs.

Trouver l'assassin ne suffira peut-être pas à l'empêcher de nuire, Chambellan Umbre.


 
Umbre

Le Matal 26 Fambir 1508 à 20h55

 
Il va falloir poser tes dernières questions petit pantin, et les poser bien, choisir les bonnes. Tu n'auras sans doute pas l'occasion de recroiser le Drey avant longtemps et de revenir sur cette histoire, tes affaires dans les bas fonds peuvent prendre du temps, beaucoup de temps.

Umbre écoute attentivement le programme commercial de Kenneth, judicieux et bien pensé. Cet enfant qui veut à la fois innover et changer le monde. Changer la monde des affaires, changer la Confrérie. Le chambellan note au passage "importante rentrée d'argent", sans doute rien, sans doute un client. Mais chaque détail compte. Comme ce monopole. L'artiste ne s'y connaît guère en économie, mais il sait à quoi mène beaucoup de pouvoir pour un seul homme.

Quand il évoque le mécénat, le Masque lui rend son regard.


A ceci je ne peux que répondre favorablement. Les artistes du Luth sont désespérément pauvres, bien souvent obligés de se perdre dans des fonctions harassantes à côté de leur existence horlogère. Je ne compte plus ceux qui sont devenus domestiques, ouvriers ou qui vivent malheureusement de petit banditisme. Il m'appartient la fonction de quêter des fonds à droite et à gauche pour que ceux qui ont des projets puissent les mener. Le Terreau ne nous délivre des sardoines que lorsque ce sont des dossiers d'envergure, profitant à toute la Confrérie. J'essaie de le faire comprendre que ce sont aussi et surtout les petits évènements qui profitent à la faction, j'essaie de faire changer les mentalités, mais comme vous le savez mieux que quiconque, l'affrontement avec les traditions n'est pas aisé.

Alors bien évidemment je dis oui, et j'ajoute qu'il va nous falloir garder contact.


Il hoche de la tête puis jette distraitement un regard par la fenêtre. L'heure avance c'est certain, et il faut maintenant quitter Drey. Mais non sans avoir poser d'ultimes questions.

Nos affaires respectives nous appellent je crois, et nous voilà donc à nous soumettre au temps et à ses caprices.

J'aimerais cependant accaparer une ou deux secondes de votre destinée pour les tourner de nouveau sur notre malheureux complot. Autant dire que votre regard m'importe plus que tout autre.
Car si nous avons à faire à la mort paré d'un semeuse n'atteignant que les Maîtres-Chands, j'ai peur que toute nos forces soient nécessaire pour l'abattre et mettre fin à sa course folle. Je dois vous avouer posséder la même impression. Qu'il a suffit d'une impulsion, de la poussée d'un seul domino pour que le château de cartes s'effondre. Alors remontons un instant, si vous le voulez bien, à la source.

Vous connaissez Rose parfaitement sans doute. J'ignore si elle est superstitieuse ou portée sur ces choses là, mais elle m'a clairement signifié - avec toute la limpidité que de tels propos peuvent avoir - que lorsqu'elle a abattu son mari, elle se sentait contrôlée, possédée....Étrange, non ? Qu'est-ce que cela vous inspire ? Rose a-t-elle déjà eu ce genre de coups de lune, des absences ? Avez-vous senti dans l'atmosphère, ce jour-là, une essence particulière ? Constaté un évènement ou un phénomène ? N'importe quoi qui puisse nous aider à mettre un pied sur la cape sombre de la mort et celle de ses apôtres.

Plus globalement - sachez que je fais cela très rarement mais que dans ce cas précis cela m'importe beaucoup - quelles sont vos conclusions actuelles et non-définitives sur toute cette sanglante mascarade ? Vous étudiez l'affaire avec votre conseiller depuis un certain temps et l'avez suivi avec avidité. Il doit surement en être ressorti une forme d'idée générale parmi les nombreuses - trop nombreuses - théories. Celle d'un financier de votre envergure m'intéresse. J'ai pour ma part peur que quelques données chiffrées m'échappent.

Mais surtout, où va mener cette destruction implacable des Maîtres-Chands ?


Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Matal 26 Fambir 1508 à 22h07

 
Concernant Rose, votre question est pertinente mais malheureusement, ou fort heureusement, la réponse est des plus banale : non, je n'ai jamais noté chez elle la moindre absence, ou autre manifestation étrange. Elle n'est pas, que je sache, sujette à la schizophrénie et plus généralement, à quelque forme identifiée de folie. C'est une âme simple à l'esprit complexe, dont le comportement général repose sur des bases solides et saines. Le contraire d'une meurtrière pulsionnelle ou d'une conspiratrice.

Cette vérité m'a contrarié à un point que vous n'imaginez pas, lorsque j'ai voulu comprendre ce qui s'était passé. J'en déduis, ce jour, que Rose n'était qu'un instrument et n'avait pas la maitrise de ses actes...

Etait-elle possédée ? J'ignore ce que peut signifier ce terme, au sens où je crois l'entendre ici. Je ne connais rien à la sorcellerie. Ce sujet est plutôt du ressort des savants et des chercheurs, j'y suis incompétent. Les gens ne sont pas des vestes qu'on enfile et qu'on abandonne ainsi... sinon, pauvre de nous !

Ai-je noté quelque chose de particulier, ce soir-là ? Je n'ai pas diné avec mes parents, je m'entrainais au pistolet avec mon maître d'arme. Je les ai quitté peu de temps avant qu'ils ne se mettent à table, et ne les ai revu que... dans les circonstances que vous imaginez.

Rien ne m'a paru sortir de l'ordinaire, si ce n'est l'épouvantable drame lui-même. J'imagine qu'on vous a décrit la scène du crime ? Mon père, alité, mort strangulé d'une cordelette de cuir à corset, et... Rose effondrée au bord du lit, s'accusant du meurtre...

Les gardes, le maître d'arme et moi étions sous le choc. Nous n'avons sans doute pas réagi de façon très rationnelle, comme l'aurait fait un policier professionnel : nous avons bougé le corps, questionné ma mère, fouillé les appartements de fond en comble en espérant trouver un autre coupable... nous avons tout mis sens dessus dessous ! S'il y avait quelque chose d'un tant soit peu subtil à noter, ou quelqu'un de parfaitement invisible à trouver, soyez certain que nous l'avons manqué.


Lorsque Umbre interroge Kenneth sur son sentiment général à propos de l'affaire, le jeune homme se raidit un bref instant, comme s'il rechignait à aborder ce sujet. Ce langage du corps s'efface rapidement, et c'est d'une voix au timbre inchangé qu'il poursuit :

Mon avis... ne vaut pas grand-chose. Oui, Lunge enquête à ma demande et me conseille quant à l'attitude qu'il convient d'adopter, mais ce qu'il m'a jusqu'ici appris ne permet pas de trancher : les Maître-Chands ont trop d'ennemis !

Je ne vois, à ce stade, que deux façons véritablement efficaces de progresser dans votre enquête, Chambellan Umbre. J'ai évidemment fait cette remarque à Lunge, mais vous disposez de leviers certainement plus puissants que les siens :

La première piste concerne le mode opératoire : comment le(s) coupable(s) procède(nt)-il(s) ? Cette question me taraude ! Dans ses pires accès de colère, jamais je n'y vu Rose lever la main sur qui que ce soit... et elle a tué ! Ca n'a pas de sens ! Comprendre se qui se passe réellement, au moment des meurtres, me semble essentiel.

La seconde piste est plus dans mes cordes, si j'ose dire : à qui profite le crime ? Je ne vois qu'une réponse à cette question, Chambellan Umbre. Aux confrères symbiosés.

Les Maître-Chands tués seront remplacés au plus vite, il en va de notre politique commerciale et de son avenir. Par qui, selon vous ? L'éviction de Clémence Quint au profit de monsieur Vialys a pu donner des idées à d'autres... et vous savez mieux que moi que l'acquisition d'un symbiote donne à son heureux propriétaire des pouvoirs hors norme.


Kenneth Drey ouvre les bras, signifiant par ce geste candide qu'il ne sait qu'ajouter.

 
Umbre

Le Matal 26 Fambir 1508 à 22h54

 
Ainsi, nous y revenons toujours. La Symbiose et leurs maudits Mous, parasites insupportables et pourtant bien utiles. Lui-même, où en serait-il sans cette minuscule créature cubique ? La Confrérie est-elle entrain d'assister à un chapitre décisif de son histoire, indirectement provoqué par l'apparition de quelques élus "bien pensants" ? Et pourtant, ils sont trop nombreux les imbéciles qui bénéficient de ces prodigieux atouts alors que des esprits brillants restent coupés de cette élite. Ils sont nombreux les indigents et les idiots que Umbre voudrait voir disparaître au profit d'un Drey ou d'une Quint. Mais voilà, ces petites choses ne semblent pas choisir leur compagnon en fonction de leur génie. Ils suivent certainement des schémas aléatoires, ou d'un logique intrigante. Quoiqu'il en soit, le feu a été mis aux poudres et il va falloir penser à en stopper la course sous peine de faire sauter la maison.

Le Masque se lève, signifiant son départ imminent.


Vous savez que ma première théorie dans tout cela fut une rébellion domestique, ou quelque chose du genre. Stupide sans doute, mais allons donc. Rose avait d'abord dit au Chambellan Yeshal qu'elle avait été droguée. Puis ce Darn't qui provoque la mort de son maître en le noyant...Je voyais là une sorte de lien. Le premier dans toute cette affaire. Le conflit n'est pas un conflit de classe, c'est évident. Et pourtant. Si il est question de symbiose là-dedans, nous n'en sommes plus très loin.

À qui profite le crime....Voilà une vraie question. Aux symbiosés sans nul doute, correspondant aux grands remaniements que nos institutions ont récemment connues avec notre avènement. Maîtres-Chands, derniers vestiges d'un temps où nous n'étions pas hantés par des légumes et des fruits. Pour autant, je connais pratiquement TOUT les symbiosés de cette faction maître Drey. Et ce ne sont pas de vaines paroles. De près ou de loin, je sais leur nom, leurs activités, leur histoire, leurs désirs inavouables et leurs petits secrets pour certains.

Aucun n'a l'envergure pour ce genre d'intrigue. Aucune épaule ne peut porter cela. C'est donc que la communauté télépathe en profite, malgré elle. Et que l'instigateur de tout ceci se trouve ailleurs.


La pantin se perd quelques secondes dans la vue que lui offre la fenêtre, puis d'un pas lent, se dirige vers la porte et la mastodonte qui la garde, imperturbable.

On tue, on affaiblit. Mais tue-t-on pour affaiblir ? Vous oubliez une question entre le mode opératoire et les profiteurs. Quel mobile ? Il nous semble acquis que c'est la disparition des Maîtres-Chands, mais pourquoi ? S'sarkh, pourquoi ?!


Son dernier mot est lancé avec force, dans un mélange contenu et mesuré de colère et d'indignation.


Si tout cela était fait pour rendre la Confrérie plus dynamique, plus puissante, plus grande ? Une saignée temporaire, éphémère. Une affreuse et douloureuse petite saignée pour chasser les mauvais microbes. Outre le fait que vous êtes une âme noble et donc rejetez avec raison les manières de cette entreprise, que pensez-vous de cela ?

Notre faction n'est pas exempt de fanatisme et d'agissements extrêmes, contrairement à ce que nous voudrions faire croire au monde. Alors pourquoi pas un(e) desaxé(e) mental pensant bien faire ? Cherchant à n'importe quel prix à faire fructifier les intérêts des Six, quitte à vendre son âme aux divinités souterraines dans un bal sanglant et morbide ?


Ses yeux hétérochromes brillent d'un éclat étrange, cherchant quelque chose sur les lèvres du jeune homme, dans le plis de ses paupières, dans le mouvement de ses doigts et de ses mains, dans la ligne de ses sourcils.

Un visage est-il un masque de comédie posé sur la tragédie de l'âme ?

MJ
 
Maître de Jeu

Le Matal 26 Fambir 1508 à 23h48

 
Le mobile ? Au risque de vous surprendre, il me semble clair : l'idée qu'on assassine les Maître-Chands dans le but de...

La jolie baie décorée de motifs art nouveau explose, projetant des éclats de verre coloré dans toute la pièce. Kenneth écarquille les yeux de surprise et porte la main à son gilet, qu'une tache rubiconde phagocyte lentement. Tétanisé, Umbre perd de précieuses secondes tandis que le jeune homme dit d'une voix lointaine :

Merde...

Il tombe à genoux, le regard atone, et bascule vers l'avant.

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