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Le Julung 5 Nohanur 1509 à 00h24
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| Le jour s'était levé, terriblement matinal comme à son habitude... N'en déplaise à Ghaâli qui trimballait sa tête des mauvais jours, avec un épis en guise de couronne, les yeux vitreux et tout le tralala. La soirée de la veille en compagnie de sa collègue Sharoke avait été suffisamment éthylique pour lui offrir un mal de crâne carabiné, même son mou refusait de lui donner des nouvelles télépathiques.
- Tu sert vraiment à rien... Grogna t'elle.
Mornifle dit :- Grmblmblm...
Elle n'était pas parvenu à avaler quoi que se soit et s'était rendu à la ruche pour y retrouver Sharoke avec qui elle avait rendez vous. A l'entrée, les gardiennes n'avaient pas fait d'histoire, elles s'étaient surement habituées à sa tronche et l'avaient même salué poliment.
Sans relever, elle passa le seuil et fut heureuse de s'extraire aux rues déjà trop bruyantes de la ville pour pénétrer dans ce lieu calme et discipliné. Elle partit en direction du lieu de travail des nourrices espérant y rencontrer Sharoke car elle avait complètement oublié, la veille, de définir avec elle un endroit où elles auraient put se retrouver. Arrivé sur place, au hasard elle poussa une porte et atterrit dans ce qui semblait être un réfectoire. Dans la pièce, quelques inaptes s'affairaient à redonner un peu de propreté aux tables en bois brut sur lesquelles on avait servit le petit déjeuné.
- Hajar. Jappa t'elle. Vous auriez pas vu Sharoke ? C'est une nourrice...
L'un des inaptes leva un sourcil, c'était un vieux mâle au dos vouté par le labeur à qui il manquait une main. Il se redressa un peu et dit, sur une voix morne et rocailleuse.
- Hajar, Bougez pas j'm'en vais vous la chercher.
- Très bien fais vite je te prie, c'est assez urgent. Ordonna t'elle sans méchanceté.
Le tydale partit aussitôt en boitillant et disparut dans l'encadrement de la porte. La soignante s'installa dans un coin et tâcha de ne pas trop réfléchir pour ne pas se faire de mal. | |
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Le Julung 5 Nohanur 1509 à 19h28
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| Sharoke auscultait une anja pour déterminer si la cérémonie de l'union avait été un succès. Lorsque cela fut fini, l'anja s'éloigna d'un pas vif, heureuse de la bonne nouvelle qu'elle venait d'entendre, tandis que Sharoke écrivait ses observations dans le dossier concernant l'anja.
Elle venait juste de terminer d'écrire son rapport que quelqu'un frappa à la porte. Elle haussa un sourcil: la prochaine auscultation avait normalement lieu dans dix minutes.
Entrez.
La surprise qu'elle éprouva en voyant un inapte ne fut en rien exprimée. En effet la nourrice garda un visage impassible, tandis que l'inapte lui annonçait que Ghaâli l'attendait dans le réfectoire des anja's.
Sharoke le remercia, rangea le dossier à sa place, et demanda à une nourrice de continuer les auscultations à sa place.
Lorsque Sharoke arriva dans la pièce, elle aperçut Ghaâli, et constata avec soulagement qu'elle n'avait pas été la seule à connaître un réveil difficile. Elle se planta devant sa nouvelle amie et afficha un sourire chaleureux, malgré son teint encore plus pâle que d'habitude:
Aka's Hajar, Ghaâli. Cela me fait plaisir de te voir si tôt dans la Ruche.
Prête pour interroger les anja's?
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Le Vayang 6 Nohanur 1509 à 23h18
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| Sharoke tentait d'assimiler toutes les informations données par Ghaâli tandis qu'elles arpentaient les couloirs. Elles trouvèrent sans peine la pièce où Zahyria et Carsynia suivaient un cours sur l'astrologie.
Sharoke interrompit poliment la consoeur qui donnait le cours et demanda l'autorisation d'interroger les deux jeunes anja's et donc de les dispenser de cours. La consoeur appela les deux anja's et fit un signe de la tête à Ghaâli et Sharoke. Elles purent donc quitter la pièce et Sharoke, connaissant par coeur les lieux, se dirigea naturellement vers une salle qu'elle savait libre à cette heure-ci. En chemin elle croisa un inapte, et lui demanda poliment d'apporter des boissons chaudes et biscuits dans la salle numéro deux du secteur trois. Puis le quatuor entra dans la salle en question.
Cette petite pièce lumineuse ressemblait à une salle de jeux. Des tapis épais recouvraient entièrement le sol, et des coussins étaient disposés dans un coin de la pièce. Sharoke referma la porte, s'assit sur un coussin, attendit que les anja's et Ghaâli en fasse de même, puis se tourna vers Carsynia et Zahyria et dit d'une voix douce:
Carsynia, Zahyria, vous m'avez déjà vue, car je suis nourrice depuis plusieurs mois, mais peut-être n'avez-vous jamais croisé ma consoeur Ghaâli, elle est une excellente soignante.
Sharoke se tut un instant, avant de reprendre:
Nous enquêtons sur l'attaque récente d'Utrynia, et nous cherchons à savoir s'il y aurait un lien avec une attaque plus ancienne, dont vous avez peut-être des souvenirs qui pourraient nous aider. Nous aimerions parler de nouveau de ce qui s'est passé lors de cette nuit.
Quelqu'un frappa à la porte. Sharoke se leva et ouvrit à l'inapte, qui déposa délicatement un plateau au centre du cercle qui s'était formé. Le plateau est bien garni: boisson chaude sucrée gardée au chaud dans un vase spécial, des biscuits, du miel...
Sharoke remercia l'inapte et le congédia, puis revint à sa place. Elle servit les deux anja's et Ghaâli, puis plongea ses yeux gris acier dans ceux de Carsynia puis de Zahyria.
Certains détails de cette nuit vous sont-ils revenus depuis?
Est-ce que depuis vous avez remarqué des choses ou évènements étranges?
La nourrice jeta un bref coup d'oeil à Ghaâli pour lui envoyer un message télépathique, puis retourna de nouveau son attention sur les deux anja's.
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Le Sukra 7 Nohanur 1509 à 18h42
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| Les deux fillettes restent silencieuses quelques instants, la tête baissée.
Ces souvenirs sont de ceux qui font fléchir, même les plus endurcies.
Finalement, elles se regardent puis Carsynia prend la parole.
"Nous dormions toutes les deux lorsqu'on nous a enlevé.
Il y avait un mâle.
On a tout de suite compris qu'il se passait quelque chose de pas normal, vu que les mâles ne peuvent ainsi décider de nous réveiller sauf en cas d'urgence.
Mais là, il n'y a avait aucune odeur de fumée, ou de cris.
Toutes les autres dormaient.
On a essayé de parler, ou de bouger, mais on n'a pas pu.
Paralysées, le mâle nous a pris sur ses épaules, et ensuite il est sorti de la Ruche.
On avait peur.
Ensuite, il a rejoint d'autres mâles.
Ils étaient tous armés.
On nous a emmenés loin. On nous avait mis des capuches pour qu'on ne puisse rien voir.
De temps en temps, ils nous donnaient à boire et alors on pouvait voir autour de nous.
Il y avait une énorme créature. Un Furyan, on a su plus tard.
Il nous regardait bizarrement.
Il ne nous a jamais approché. Mais il discutait souvent avec le tydale qui nous avait enlevé.
On ne nous a pas fait de mal.
On dormait souvent en fait.
Puis nous avons été libérées.
Le Furyan avait été tué.
Les mâles n'étaient plus là..."
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Le Dhiwara 8 Nohanur 1509 à 12h05
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| Sharoke tentait de mobiliser toutes ses facultés mentales, malgré sa fatigue. Elle faisait ressurgir un sombre instant du passé aux deux anja's et commençait à culpabiliser, mais en même temps, si cet incident avait un quelconque lien avec la récente attaque, il fallait passer par là.
Elle écouta Carsynia attentivement.
Le regard étrange du Furyan? Certainement le regard que ces êtres lançaient à leurs futures victimes. Le Furyan ne les avait jamais approché, ce qui était déjà plus étrange en soi. Le tydale avait dû avoir une certaine autorité sur lui.
Ce n'était pas logique. Seul l'Artisan du Déclin avait une réelle autorité sur ses rejetons.
Il n'y avait a priori aucun lien avec l'attaque du Tark'nal. Car si l'attaque en question était hypothétiquement l'essai d'une arme créée pour éradiquer les tydales, alors l'enlèvement des anja's aurait dû servir à des expérimentations. Or on ne leur avait rien fait.
A quoi cet enlèvement avait-il pu donc servir? Si Khamaat, Anandra et la troupe de danses-lames n'étaient pas arrivées à temps, jusqu'où seraient-ils allés avec les enfants?
Sharoke se massa les tempes. Les anja's avaient dû entendre quelque chose, dans une discussion entre les tydales, ou bien dans celle que le kidnappeur avait eu avec le Furyan. Mais cela avait dû être dans un dialecte étranger aux anja's.
dit :Une hypnose! Une hypnose! Faut faire une hypnose!
Sharoke n'avait pas prêté attention à sa Moue depuis le début, et l'idée qu'elle venait d'entendre faillit lui tirer un soupir.
C'était stupide, l'hypnose n'était pas un moyen sûr sur lequel se reposer, et puis d'ailleurs elle ne savait pas comment s'y prendre, juste qu'il lui fallait un pendentif ou un objet dans ce style.
dit :Mais avec l'hypnose, elles pourraient se souvenir du moindre détail! Y compris les conversations qui ont eu lieu, même si elles n'en ont pas compris la signification!
Sharoke proposa l'idée à Ghaâli par télépathie, puis se dit que c'était impossible. Même si on considérait que cette technique marchait réellement, les deux liadha's auraient donc besoin de l'aide d'une tydale compétente en hypnose, et d'une polyglotte. En effet le dialecte utilisé avait dû être du Jurimancien, ou du Rabaän dans le meilleur des cas, car les tydales qui avaient conspiré appartenaient à la Confrérie des Six. Or la nourrice ne connaissait aucune de ces deux langues, tout comme sa consoeur.
Sharoke se demanda si Fonkin, le tchaë avec qui elle avait voyagé pendant plusieurs mois, pourrait lui prêter main forte sur cette affaire. Après tout, elle avait pu le constater, les tchaës étaient très méfiants et accordaient beaucoup d'importance au moindre détail. Sans compter le fait qu'ils pensaient de manière différente. Et peut-être s'y connaissait-il en hypnose.
La nourrice demanda par télépathie à Ghaâli son accord d'introduire Fonkin dans l'enquête, puis s'adressa de nouveau aux anja's:
Est-ce que le Furyan semblait se disputer parfois avec le tydale?
Aviez-vous déjà vu les mâles auparavant? Discutaient-ils en tydale ou dans une langue étrangère?
Aviez-vous vu où étaient partis les mâles avant qu'on ne vous libère? Avaient-ils dit quelque chose de particulier?
Sharoke doutait de plus en plus de l'existence d'un lien avec l'attaque récente, même s'il était étrange que les Filles du Déclin soient souvent la cible de l'Artisan du Déclin.
Or Sharoke ne croyait absolument pas au hasard. | |
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Le Dhiwara 8 Nohanur 1509 à 23h57
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| Ghaâli écouta tout sans en perdre une miette. Ni des biscuits qu'elle couvrait de miel et dévorait voracement sans chercher la moindre raison de ne pas en profiter. Elle se flattait intérieurement d'avoir bien fait de proposer à Sharoke de venir, la nourrice s'y prennait à merveille.
- Zahyria tu peux parler tu sais, ici on est entre nous tu n'as rien à craindre. Dit t'elle d'une voix qui se voulait douce avant d'ajouter. Tu finis pas tes biscuits ?
Le long bras maigrichon de la soignante s'étendit et rafla le rab de nourriture devant les yeux écarquillés des deux petites. Elle reçut alors les propositions télépathiques de Sharoke et lui lança un regard noir. Un tchaë dans la ruche !! L'idée l'aurait bien fait sauté au plafond si elle n'avait pas été en pleine digestion. Elle resta ensuite longtemps silencieuse, les yeux mi clos elle semblait en proie à de grandes réflexions. Toute cette affaire était de plus en plus bizarre, finalement le seul point commun qu'il y' avait entre les deux attaques c'était la volonté de l'artisan de faire encore souffrir le peuple tydale. Quelle idée avait il en tête lorsqu'il avait fait enlever les gamines..? Pourquoi elles et pas les autres ? Les avait il choisit au hasard... Difficile à croire si ça avait été le cas ils auraient pris les deux premières venu du dortoir... C'était peut être le cas d'ailleurs...
La soignante se tenait le front entre les mains elle ne voyait aucun moyen de démêler cette histoire. Dans son coin, elle se mit à murmurer quelques formules, cherchant à lancer un sortilège qui, pensait elle, allait l'aider à se servir de sa tête. Quand elle eut finit, son visage changea subitement d'expression. Elle affichait un sourire carnassier, ses sourcils étaient froncés et ils gigotaient au dessus de ses yeux aux pupilles anormalement dilatées. Elle se mit à tanguer sur son cousin, comme si elle était ivre. Le sortilège de soif de l'esprit avait fonctionné, elle se sentait soudain beaucoup plus lucide, elle s'adressa télépathiquement à Sharoke. Finalement si le Tchaë était sympa il pouvait venir, ça ferait peut être avancer les choses. Elle avait une furieuse envie de lancer une bataille de cousin avec les gamines mais tâcha de garder son calme. Elle trépignait sur place. Du coin de l'œil elle venait de repérer un énorme pouf qui ferait un avantage certain en cas de guerre ouverte.
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Le Matal 10 Nohanur 1509 à 12h11
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| Zahyria prit la parole sans toucher aux biscuits.
Le Furyan ne se disputait pas avec le tydale.
Ils étaient amis, je pense. En tous cas, ils ne s'en tapaient pas cinq mais avaient des attitudes de gens qui sont d'accord pour pas mal de choses...
Les mâles, on ne les avait jamais vu.
Entre eux, ils ne causaient pas.
Leurs mouvements et leurs actes étaient très... professionnels, je dirai.
Avec le Furyan, le tydale au regard bizarre causait dans une langue qu'on ne comprenait pas...
Et on a rien vu de particulier avant qu'ils s'en aillent.
Elle hésite un instant.
Y'a juste un truc que Carsynia n'a pas vu car elle dormait et pas moi.
A un moment, le Furyan s'est approché de nous.
Je faisais semblant d'être assoupie, mais j'avais les yeux entrouverts.
Il a dit quelque chose dans sa langue bizarre, et je me suis senti bizarre.
Puis il a tendu une de ses pattes vers nous, et une sorte de brume verte nous a atteinte.
J'ai eu peur.
Mais on a pas eu mal.
C'était juste... chaud.
Les deux fillettes se regardent, apeurés à l'évocation de ces souvenirs.
Elles semblent avoir tout dit de ce qu'elles avaient vécu...
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Le Sukra 21 Nohanur 1509 à 10h52
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| La nourrice ne parvenait toujours à aucune conclusion sûre, mais les deux anja's semblaient éprouvées. Leur remémorer ces souvenirs devait être assez traumatisant, elle ne voulait pas se montrer trop insistante. Aussi se contenta-t-elle de sourire aux enfants et à sa collègue, et d'ajouter:
Merci beaucoup Zahyria, Carsynia. Je m'excuse d'avoir pris de votre temps pour parler de tout ceci. Je doute qu'on vous en parle de nouveau dorénavant.
Avant de retourner en cours, vous pouvez prendre quelques biscuits avec vous.
Sharoke se leva et se tourna vers Ghaâli:
Aka's Jafhay, Ghaâli, je dois te laisser pour continuer mes consultations.
Zahyria, Carsynia, je vous raccompagne ou vous préférez retourner seules en cours?
Les deux anja's se contentèrent de se lever hâtivement et de suivre la nourrice. Manifestement la remémoration de ces évènements les avaient rendues de nouveau nerveuses. Sharoke se demanda si sa consoeur et elle avaient bien fait de leur faire revivre tout ceci.
Lasse, elle quitta la pièce avec les deux anja's, laissant la soignante seule avec les gâteaux et le miel.
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