*** A un étage de la Ruche qui s'élève bien au dessus des bruits et des risques de la rue, derrière une grande porte de bois ornée encadrée par deux gardes armées, s'ouvre un petit couloir donnant accès à plusieurs petites portes.

Derrière ces portes se trouvent des pièces toujours semblables : les dortoirs des Anja's qui n'avaient pas d'autre habitation en ville ou qui préféraient, au terme de leur grossesse, habiter dans la Ruche.

Chacune de ces pièces est une grande pièce en ogive, avec de grandes fenètres lumineuses, un plafond haut, des tapis moelleux sur le sol, des tables basses et des fauteuils profonds éparpillés un peu partout.

Tout autour de la pièce, de lourds rideaux amménagent des alcôves confortables qui encadrent soit de grands lits accompagnés de commodes, soit des baignoires, soit des tables recouvertes de coussins et qui permettent aux Anja's partageant le dortoir de s'isoler.

Un cordon doré derrière chaque lit et chaque baignoire permet d'appeler en urgence une Soigneuse, et des clochettes d'argent sur les tables basses permettent aux Anja's d'appeler des servantes pour obtenir un thé, un petit repas, un livre ou un ouvrage,...

La pièce dégage une telle impression de chaleur et de confort qu'on en oublie facilement que les fenêtres sont munies de barreaux.

Chaque dortoir compte six lits, mais tous ne sont pas pleins. ***

*** Une porte se ferme...Un silence....Puis plus rien.

Elle dormit profondemment ce jour-là. D'habitude, elle qui était pleine de vie, se sentit arrassée de fatigue et s'écroula complètement sur le matelas confortable du lit douillet au creux duquel on l'avait placée.

Combien de temps avait-elle dormi? Elle ne pouvait que s'en faire une idée. Si elle suivait sa logique, son Union s'était déroulée un début d'après-midi. Là, la nuit était déjà bien entamée.
Regardant par la fenêtre, elle ne prêta guère attention aux barreaux qui la ceignaient, elle constata que la ville était endormie. Un vent frais de début de Marigar fouettait les édifices de chaque rue.

Ce doit être le dortoir des Anja's se dit-elle.

En contrebas, elle distinguait des silhouettes immobiles. Les gardiennes de la Ruche étaient toujours sur le qui-vive. Rien, apparemment, ne pouvait les perturber.

Azzelath se décida de jetter un regard plus approfondi sur la chambre dans laquelle elle se trouvait. Un bon feu brûlait dans l'âtre. Il avait du être alimenté pendant son lourd sommeil.

Puis, sur une simple étagère en bois, une petite pile de livres lui apparut.
"Mémoires d'Outre-Kryg", "La vie du S'sarkh dans le monde animal", "La guerre des Tours n'aura pas lieu", "Confessions d'une astrologue".

Elle décida de prendre ce dernier et commenca à le lire patiemment. Elle ne ressentait ni la faim, ni la soif, elle était tout simplement bien. Elle espèrait juste qu'elle pourrait bientôt sortir d'ici et ainsi débuter son apprentissage des astres. ***

*** Une semaine après, alors que la jeune tydale était sur pied depuis longtemps et bouillait légitimement d'impatience, la soignante se présenta dans le Dortoir. ***

*** Elle fit installer l'Anja sur son lit et commença l'auscultation en posant ses questions rituelles sur la santé d'Azzelath, est-ce qu'elle mangeait bien, est-ce qu'elle avait des nausées...

Pendant que celle-ci la rassurait sur son état général, un sourire vint tout à coup épanouir le visage ridé de la soignante. ***

*** Plongeant ses mains dans un seau d'eau fumante, elle attendit qu'Azzelath se rhabille avant de se placer face à elle d'un air qui n'était plus du tout épanoui. ***

*** A priori, non, elle n'en avait pas. Le comportement à adopter était drastique, mais c'était le prix à payer pour mettre au monde un successeur du Tableau. ***

*** Azzelath se courba pour la remercier et attendre l'autorisation de quitter les dortoirs. ***

*** La soignante eut une petite moue. Elle avait vaguement entendu parler de ces pierres, un truc trouvé dans la faille... L'histoire avait été racontée dans la salle des soignante par la soeur du Reproducteur qui était le père des petiots de la tydale qui nettoyait la bibliothèque une fois par semaine. Mais le coté dangereux avait été soigneusement caché par Miest'hé, et la soignante n'en avait pas entendu parler.

Elle ne vit donc a priori aucune raison d'interdire cette activité à l'Anja Karna. ***

*** Et la soignante s'en fut. ***