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Congrés : Matal 6 Manhur – Démonstration de la voix

Postez ici vos roleplays pour participer à la Démonstration de la Voix
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Sujet lancé par Narrateur
Le 07-05-1508 à 18h06
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Posté par Nuruhuinë,
Le 18-05-1508 à 18h14
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Narrateur

Le Merakih 7 Manhur 1508 à 18h06

 
Matal 6 Manhur, la vie a repris son cours après la journée festive de la veille. Le congrès continue mais e quotidien a rattrapé la plupart des habitants, toutefois aujourd’hui les Propages habituellement itinérants et sur les routes de Syfaria, vont se livrer à un exercice qui ne se voit quasiment pas à Lerth. Les Convertis y auront déjà assisté lors de leur vie avant qu’ils ne reçoivent la révélation. Mais aujourd’hui la Scintillante va résonner des voix de ses fils Orateurs, Porteur de la Révélation de S’sarkh et qui ont consacré leur existence à la propagation de la Vision. Pour une fois, la foule sera attentive et ne conspuera pas l’Orateur. Néanmoins les seules âmes à convertir seront celle des invités étrangers, pour les autres, il ne s’agit que de renouveler intérieurement ses convictions et se remémorer l’instant ou la Révélation les a touché.
Ce qui intéresse les Témoins, ce sont les récits des voyages de leurs compatriotes voyageurs et aventuriers. Les récits des cités lointaines que certains n’ont pas vu depuis des éons, voire même n’y ont et n’irons jamais. Voyager par l’esprit dans les récits des Propages, habiles conteurs d’histoire, c’est déjà voyager pour beaucoup de Témoins. Par ses récits voyagent également les informations et les nouvelles. Ici un propage nous raconte Korsyne et le rêveur fou qui fit trembler les rêves de la race Nelda, la un autre raconte le Concile et les déboires des délégations dans la tour corrompue. Les récits, contes et légendes résonnent dans les Sillons et feront réfléchir, trembler et rêver les esprits des Témoins sédentaires.


EDIT HRP MJ7 :
- Etant peu évident pour tous de poster et de participer à tous les roleplays. Les sujets des événements du Congrés seront un peu plus espacés dans le temps que leur déroulement réel. Prenez votre temps et participez a votre rythme, un peu de distorsion temporelle ne nuira pas au RP si la chronologie globale est respectée.
- N'hésitez pas à ouvrir vos propres sujets pour interragir avec vos amis. Aprés tout vous n'avez pas fait tout ce chemin pour ne pas participer au Congrés ?
- Tous les sujets relatifs au Congrés sont ouverts à tous les participants et sont temporellement déclinés en fonction du programme. La date étant écrite dans le titre, vous pouvez poster pendant plusieurs jours à condition de respecter la trame temporelle et de garder la cohérence. Bon jeu et bon RP.


 
Samael

Le Merakih 7 Manhur 1508 à 21h23

 
La démonstration de la Voix, Samael sourit en songeant à cette cérémonie. Il est vrai que les habitant de Lerth aimaient écouter leurs Hérauts, les annonciateurs errants n’étaient que rarement à Lerth. D’ailleurs ne rentrait il pas de presque une année d’errance ayant mené un périple sur de nombreuses terres et jusque dans les contrées les plus reculées de l’île. Le Nelda décida donc de se prêter à la cérémonie et de conter quelques unes de ses meilleures histoires. Il avait également pris le temps de composer un chant relatant les événements du Concile. Sortant de ses rêveries, le Propage s’installa à un croisement fréquenté de l’Agora et s’éclaircit la voix. Quelques accords l’assurèrent du bon accordage de son Sitar et il commença de jouer une mélodie à la saveur sombre. Une fois l’attention de son auditoire attiré, le Nelda commença de déclamer ces vers :

Morts les fils
Le monde des flammes est prêt,
Brumes sur la terre,
Ténèbres sur le monde,
Tempête dans les airs,
Le sang pleuvra,
Sur les cadavres nus,
Voici venu
L'atroce temps de terreur.

Ecoutez la mélopée lancinante de la Tour maudite,

A la requête des Eternels de Sous-Terre.
La Poussière brava mille dangers,
Mais les Obsessions furent rassemblées.

Les Six envoyèrent chacun trois émissaires,
Au Concile de la Tour figée.
Se joignirent à eux deux Tatoués

Plusieurs jours, la trahison dormant en leur sein,
Les poussiéreux s’épièrent en chien de faïence,
Aveuglés par l’incompréhension et la méfiance.
L’Usurpateur frappa par l’insoupçonnée main

Le Traître Nemen chanta avec les Obsessions
Et le séculaire bouclier libéra la Tour du temps
Les âmes torturées par la corruption
Des Effluves du Seigneur des Océans.

Encerclés par les armées du Félon,
Abandonnés par le traître chevaucheur des vents
La Poussière s’agglomère en un poing puissant
Pour faire chanter les Obsessions.

Protégés et prisonnier hors du temps,
Les antiques gardiens protègent leur secret,
L’acier mord, la balafre s’élargit, libérant
Les âmes des torturés.

L’Acéré enfermé depuis 1000 ans
Libéré de ses geôliers, reconnaissant
Guide l’équipée dans les couloirs vivants
Les entrailles de la Tour s’animant.

Cours, cours, Poussiéreux !
Au bout du tunnel, la lumière
Fait se presser vers ses feux
Les insectes de Poussière.

Brûle les ! Ecrase les ! Maraudeur
L’armée des Assulters est décimée
Piètre victoire sur l’Usurpateur,
Nul ne sait ce qu’il advint du Tatoué.


Le Nelda termina sa diatribe sur une note lugubre et laissa son auditoire absorber les paroles. Il en profita pour penser à son apprentissage auprès de Berger des Âmes et se remémora la leçon que celui-ci répétait sans cesse :

"La Voix est un torrent qu’on ne peut refouler, ni barrer, ni contraindre. Elle s’ouvrira toujours un passage vers l’océan des âmes égarées."


Appelez moi Charogne, et je vous appellerai Cadavre.

 
Randall Tallstag

Le Julung 8 Manhur 1508 à 00h37

 
Pour l'occasion, Randall avait reveti la tenue qu'il portait habituellement. Il pensait qu'ainsi, les Temoins se feraient une bonne idée de la maniere dont il voyageait. En outre, cela stimulerait sans doute leur imagination et leur donnerait l'occasion de s'evader un peu plus, l'espace d'un instant...

Enfin, tenue... il etait pour ainsi dire "en armes". Son armure de mailles, complete, reparée et lustrée (il avait d'ailleurs bien pesté a la simple idée de devoir remplacer minutieusement tous les anneaux abimés ou manquants). Une lourde paire de bottes en cuir, solides, renforcées par quelques plaques de metal a certains endroits.

Sa hallebarde, qui le suivait depuis le debut de ses periples. Il etait devenu extremement adroit avec. A certains moments, meme, lorsqu'il avait assez d'espace, il n'hesitait pas a offrir une demonstration de ce qu'il etait capable de faire. La populace n'avait que rarement l'occasion de voir ce genre de chose, et il s'adonnait a l'exercice avec plaisir.

Contrairement au style plutot theatral de Samael, Randall, pour sa part, prenait des airs de vieux conteur, et c'etait plutot par petits groupes qu'il declamait des extraits de ses voyages en foret, ou encore sur les longues et interminables routes vers l'est.

Toutefois, arrivé sur une des places principales de la cité, il s'installa. Rapidement, vu son accoutrement, il fut le centre de l'attention generale. Prenant un siege, son auditoire en cercle autour de lui (c'est a dire une foret de tetes), il entame.


- Aujourd'hui, je vais vous conter le recit d'un voyage dans les steppes glacées du Nord. Bravant les dangers qui les guettaient, un Propage, un Transcient et un Contemplateur deciderent de partir pour... Uldmenya.

Il laissa planer un silence dans l'assemblée. Il commencait a captiver leur attention. Lui s'etait longtemps rememoré ce periple, qu'il considerait comme sa premiere veritable traversée d'une partie du monde.

La quete du Livre de Diaze. Serphone, Fea Ura, et Randall. Il s'en souvenait comme si c'etait hier, et improvisait, changeant de temps en temps certains points, afin que tous puissent comprendre.


- Partis de Lerth en direction du pilier d'Ulmendya, les trois Temoins partaient a la recherche d'une indication dont le Transcient avait besoin. Tous etaient volontaires et prets a combattre si necessaire les multiples dangers qui se dresseraient sur leur chemin.

Une pause.

- Et, comme ils s'y attendaient, l'Usurpateur, ce mille fois maudit Pen'Ssarkh, placa ses pions sur leur route. Le Propage, faisant fi de la menace, extermina une partie des abominations. Helas, trois fois helas, ils etaient nombreux, et nos comperes durent rapidement galoper a travers les bois afin de sauver leurs vies.

L'auditoire semblait comme captivé.

- Plus ils avancaient, plus les conditions etaient rudes. La temperature, deja peu clemente en cette saison, s'abaissait de jour en jour. Les nuits se faisaient de plus en plus longues. L'atmosphere, plus oppressante. Bientot, la neige et la grele etaient sur eux. Mais ils reussirent a atteindre leur objectif sans plus d'ennuis.

Une pause. Il commencait a avoir soif, et fit discretement signe a un Temoin non loin de la qui tenait une buvette.

- Ils etaient la, au Pilier d'Ulmendya, leur bivouac installé, tentant de se rechauffer sur un maigre feu, se nourrissant de la maigre pitance qu'ils avaient. mais soudain...

Il baisse la voix. tous tendent l'oreille pour l'entendre, lorsqu'il eleve de nouveau brusquement la voix, effrayant peut-etre au passage un ou deux spectateurs parmi les plus jeunes.

- Soudain! Ils virent quelque chose apparaitre au loin. Quelqu'un leur rendait visite...

Sa chope de biere arrive. S'interrompant quelques instants, il boit une longue gorgée et remercie celui qui lui a apporté la chope d'un signe de la tete.

- Et ce quelqu'un n'etait pas n'importe qui. D'ailleurs, ils eurent du mal a y croire. Le Contemplateur, qui avait un penchant prononcé pour l'alcool, en etait un peu plus convaincu que les deux autres, mais l'histoire ne dit pas si il etait sous l'emprise de l'un ou l'autre de ses breuvages a ce moment la...

Une autre gorgée. Il devait parler un peu moins fort, maintenant qu'il y avait un peu plus de silence, mais l'exercice restait contraignant.

- Toujours est il qu'ils avaient en face d'eux... une Nemen.

Quelques exclamations de surprise dans l'assistance.

- Une Nemen, repondant a un nom long et compliqué, que pour l'amour de S'sarkh je n'epellerai pas ici... nommons la Syrtai, car tel etait une partie de son nom. Syrtai, donc, leur apparut. Dans une tenue, disons le, qui n'etait guere ce a quoi on aurait pu s'attendre. Silhouette gracile, dénudée, dénotant dans ce paysage de misère.

Une autre gorgée.

- Le Transcient, voyant la une bonne opportunité d'obtenir l'information qu'il etait venu querir dans la region, invita la Nemen sous leur tente de fortune. Les discussions durerent longtemps...

Alors que la foule attend plus de details sur les discussions, le Propage continue:

- ... mais malhereusement, il n'est pas possible d'en donner une transcription ici. Toutefois, les trois Temoins furent surpris de constater que la Nemen avait visiblement du mal a les comprendre, et inversement... il y avait la deux manieres de penser differentes, et Syrtai s'exprimait d'une maniere, dit-on, peu commune. Elle leur tint des paroles sibyllines, destabilisantes, deroutantes... sans doute tout cela a la fois. Transcient et Propage tentaient desesperement de comprendre, alors que le Contemplateur etait deja reparti dans ses contemplations alcolisées, placant de temps en temps une remarque aussi claire que les paroles de la Nemen...

Encore une gorgée. Il arrivait sur la fin.

- Finalement, nos trois Temoins repartirent de leur periple dans les steppes du Nord, non pas avec l'information initialement desirée, mais avec la satisfaction immense d'avoir etabli un contact pacifique avec une Nemen. Et aussi de precieuses informations communiquées par celle-ci.

*Glou, glou*. Plus qu'une gorgée et la chope serait vide.

- L'histoire ne dit pas comment s'est deroulé le voyage retour... sinon que les trois Temoins finirent par arriver heureux mais epuisés a Lerth, chacun pouvant reprendre ses occupations habituelles. Si ce n'est qu'un lien qu'on peut difficilement rompre s'etait tissé entre eux... ils etaient liés par la nature meme de ce qu'ils avaient vecu.

Il termine sa chope, ainsi que son discours:

- Et ainsi se termine leur histoire. Je vous remercie de votre attention.

Pour Le soulager, je souffrirai,
Par Sa souffrance, je m'enragerai,
Et par la Rage, je les exterminerai...

 
Trempe

Le Julung 8 Manhur 1508 à 10h17

 
Le Chevalier, ayant retrouvé sa tenue sombre et claire, légère, bien lointaine de ses anciennes habitudes d’infanterie lourde, et son enfant, drapée dans les vêtements qu’elle se brodait elle-même, passèrent leur seconde journée du Congrès ensembles, à aller et venir dans les rues, s’arrêtant chaque fois qu’ils croisaient un Propage qui contait l’un de ses récits de voyage au travers de Syfaria à la foule.

L’ancien soldat savait que la gamine avait toujours aimé les histoires, et que celles des Témoins lui plairaient certainement, et c’était la raison pour laquelle il avait insisté pour qu’elle vienne, la portant sur son dos pendant la majeure partie des déplacements, pour reposer sa cheville fragile. Il ne s’était pas trompé, et avait constaté avec émerveillement que l’enfant possédait toujours cet amour des récits qui lui donnait un visage si lumineux lorsqu’elle en entendant. Son visage demeura souriant durant tout le jour.

Pour sa part, le Chevalier trouva dans cette journée une joie tout aussi enfantine que celle de sa fille. Après avoir assisté à tant d’attitudes et de coutumes étranges, il retrouva dans le discours des Propages les vieilles habitudes miliaires de se conter des histoires le soir au coin du feu, pour garder le moral des soldats au beau fixe et pour resserrer les liens d’amitié que unit les gars d’une même unité.

En fin de compte, même si ce n’était le soir et qu’aucun feu ne brûlait à Lerth, heureusement, il se faisait clair que malgré leurs attitudes curieuses, les Témoins étaient bel et bien des êtes de poussière et trouvaient les même joies que les autres, avaient les même plaisirs simples communs à tous. Déjà, au banquet, la veille, il avait trouvé un univers dans lequel il se sentait à sa place. Cela continuait, dans ces discours. Des semaines avant, cela avait été dans le voyage fait en compagnie de Témoins.

Au début du Congrès, il avait déjà ancrée en lui la conviction que le chemin qu’il avait choisi était le bon, et que devenir un Témoin était ce qui l’attendait, et le meilleur qui l’attendait. Le Congrès donnait au Tchaë le sentiment qu’en plus d’être ce qu’il pourrait faire de mieux pour les êtres de poussière, ce serait également une voie dans laquelle il pourrait trouver la paix qu’il cherchait au fond de son être.

D'heures en heures la fille et son père écoutèrent les récits, de Témoins qu'ils connaissaient, parfois tous les deux, parfois l'un ou l'autre d'eux seulement, et parfois d'inconnus pour eux deux. Certaines histoires contées leurs étaient connues, d'autres étaient de parfaites découvertes, tout au long de ce jour ils n'eurent pas le temps de s'ennuyer.


 
Erling

Le Julung 8 Manhur 1508 à 14h54

 
C'était la première fois qu'Erling pouvait s'autoriser à participer à la journée des Propages. Il était réelement ravi de le faire. Le matin même, en réfléchissant aux mots qu'il allait dire, il s'était rendu compte du chemin qu'il avait parcouru sur Syfaria. Il s'était étonné de pouvoir maintenant être vu par les Témoins de Lerth comme un voyageur tenace. Pour celà, le Propage avait décidé de relater son périple qui l'avait conduit du nord au sud et de l'est à l'ouest.

Maintenant, monté sur un petit perron qui donnait l'accès à une maison, Erling dominait de quelques têtes l'assemblée reunie devant lui. Il avait repassé ses habits de voyage et la brise marine foutait légèrement sa cape. La tension vînt le prendre au ventre mais il la refoula pour commencer.


Mes amis qui êtes là pour m'entendre, je vous salue. En temps que jeune Propage, je me dois de vous conter mon premier périple, un voyage dont les rebondissements m'ont entrainé d'un côté et de l'autre de notre île.

Erling désigna les points cardinaux avant de continuer. Il remarqua que certaines personnes traduisaient ses paroles à ceux qui ne pouvaient les comprendre.

Accompagné d'un Protecteur et d'une autre Propage, mon voyage commença par une longue marche jusqu'à Syrinth. J'étais alors ravi, les chiroptères tombaient sur notre passage et nous allions propager Sa Voix. Toutefois, sachez que dans le vaste monde rien n'est jamais simple. Les Equilibriens de la forêt ne nous acceptèrent pas en ville. Cependant, il en fut qui nous conseilla de gagner Zarlif, ce que nous fimes. Là ce tenait le célèbre festival, presque digne de notre Congrès par son animation. Mais, à peine commencions nous à profiter de la fête que les Nemens répendirent les nouvelles à propos des Obsessions.

Je partis immédiatement pour la Lagune des Glaces où un Confrère des Six fort habile réussit à libérer l'artefact. Cependant, la possession du miroir fit jaillir des tensions et je partis avec un autre des Six et plusieurs compagnons en direction des montagnes du Matriarcat. Jamais je n'ai frolé la mort d'aussi prêt que les jours qui suivirent. A chaque détour du sentier se trouvait un Gambol ou un Loup. Mes compagnons veillèrent sur moi alors que j'agonisais et je m'en sortit finalement. Notre groupe se disloqua cependant. Conforme à ma volonté je restai le porteur de l'Obsession. Nous nous réintroduimes en Equilibrium pour nous séparer à un transport Nemen qui me ramena à Lerth.


A ce moment là de son récit, le Propage ouvrit les bras pour embrasser la ville.

Mais, je n'ai passé que trois jours dans notre belle ville avant de la quitter de nouveau. Toujours pour les Obsessions. Le Propage Saltis' Dymer, seul dans le désert de Korsyne, s'échinait à libérer un nouveau miroir. Il atteint son but alors que j'étais à moins d'un jour de marche de lui. Cependant, pour celà il y perdit la vie ! Mais, le S'sarkh sait récompenser ses vaillants serviteurs et la magie de la symbiose le fit réapparaitre par un Pilier de Poussière. Quant à moi, seul dans le sable avec les Assulters, je pus récupérer le miroir. Voilà que j'étais moi même porteur.

Dans l'affaire des Obsessions, les tensions se multipliaient et les Hauts Rêvants n'avaient pas de Miroir. Par soucis d'équité, Saltis' Dymer et moi-même décidâmes de leur donner celui que je portais. Je me rendis donc à Jypska. Je suis resté quelque temps dans cette ville et je m'apprétais à aller occir un abomination en compagnie de la Meute Haut Rêvante et du Contemplateur Orol'Nar lorsque nous apprimes que l'Usurpateur, maudit soit-il, avait attaqué les lieux du Congrès. Ni une, ni deux, nous y avons foncé.

Là, ce ne fut que lutte sauvage dans les montagnes que des Assulters aussi féroces que possible. Mais, celà n'était rien en comparaison de ce qui arriva. Un lieutenant du Maudit fit son apparition et mes yeux virent un Maraudeur. Les naseaux fumant, d'une taille gigantesque, aussi terrifiant que l'on le dit. Nous nous cachâmes, impuissant face à une telle créature. Mais nous pûmes voir qu'elle donna la mort à quelques Assulters avait de repartir. Nous pouvions maintenant gagner. Nous luttions toujours lorsque les diplomates du Congrès firent leur apparition et nous aidèrent à finir ces abominations.


Erling fit une pause dans son récit. Il en était presque essouflé.

A partir de là, en compagnie d'un Propage et d'un Transcient, nous partîmes pour Utrynia et le Matriarcat. Ce furent là que se passèrent ces dernières semaines avant le Concile où je visitai aussi la belle ville de Kryg.

Les aléas de Sa volonté m'ont ainsi guidé d'un bout à l'autre de Syfaria et je suis fier de l'avoir servit de mieux que je l'ai pu.


Quelques applaudissements se firent entendre dans la foule. Cependant, le Tydale ne salua pas son auditoire. Il souhaitait encore ajouter quelque chose.

Et, mes amis, sachez le, en ces beaux jours de Congrès, c'est maintenant Syfaria qui vient à nous. Nombre de personne que j'ai rencontré au cours de ce périple sont ici, peut être parmi vous.

Erling scruta la foule à la recherche d'un visage connu.

Celà montre que les Témoins sont une Faction forte et respectée car telle est Sa Vision du monde.

Enfin, Erling s'interrompit, après un récit de plus d'une heure. Il salua le public, fourbit mais heureux.


Pélerin du S'sarkh

 
Jemori Colcook

Le Vayang 9 Manhur 1508 à 00h26

 
***
Alors qu'à chaque coin de rue des voix s'élevaient pour conter monts et merveilles, le Confrère errait pour profiter des récits et des fables. La seule chose qu'il dépréciait dans cette soirée fut le fait que ce soit un spectacle improvisé, pas même un vrai spectacle de rue, ni de salle, et bien que cela ait aussi son charme, il aurait peut être préféré autre chose.

C'est finalement, les fesses déposées sur un mouchoir recouvrant le rebord d'une fontaine, qu'à son tour, Jémori se décida à jouer un peu plus que son rôle d'invité et de mêler sa voix à celle des Propages.
***

Laissez-moi vous conter une légende ...
Une légende qui court dans les sables entourant ma Cité, les Sables d'Amody.
C'est une fable que les voyageurs se racontent entre eux, que les pèlerins redoutent et que les nomades chantent.
Un ami que certains connaissent ici me l'a conté, et c'est à présent à vous que je vais dévoiler ce conte ancien.

Son nom ? ...
Arameth


Il n’est jamais précisé où exactement, mais ceci, comme toutes les légendes des temps anciens, reste un des obscurs détails dont les contes se soucient peu.

Ce qu’il est bon de savoir, c’est qu’autrefois, un jeune homme s’était taillé avec d’autres de ses compagnons, un petit domaine où il régnait en maître. Par l’ardeur de ses guerriers et par la force de leurs volontés, ils vivaient en tranquillité, loin des grands et des grandes de ce monde.

Sans avoir de terribles goûts pour la conquête, ils étaient quelquefois amenés à combattre sur les routes, portés par les simples dires de leur barde Edeleon à la harpe. Désireux de connaître un peu le lointain et de s’imposer un peu plus à l’horizon, ils avançaient souvent dans les terres, mi-soldats mi-voyageurs.

Un jour de fête, comme il en existait souvent, Cardone, le maître de tous, fit venir l’un de ses devins et lui demanda de lui traduire quelques arcanes du Destin. Tous mirent fin à leurs jeux et Edeleon fit cesser le jeu de ses doigts sur les cordes de son instrument. Ils écoutèrent.
Le voyant se leva, caressa sa barbe grise et parla non sans précautions :


« Il y a certains évènements sur le chemin du Destin qui sont dissimulés, même aux yeux du voyant ; et bien plus qui nous apparaissent clairement, mais devraient plutôt être cachés à tous ; je sais beaucoup qu’il serait préférable de taire, et d’autres choses que la douleur de siècles de torture ne me feront pas dire. Mais je sais ceci et puis le prédire : Vous n’irez jamais à Arameth. »

Il s’éleva alors tout un brouhaha de conversations où il était question d’Arameth - certains en avaient entendu parler en dires ou en chansons, d’autres dans des livres et d’autres encore dans leurs rêves. Et Cardone, le maître de tous, envoya Edeleon se mêler aux gens, pour écouter ce que d’aucun disaient de Arameth. Mais les guerriers parlèrent des endroits qu’ils avaient conquis -maintes solides forteresses et maintes terres lointaines- et jurèrent qu’ils parviendraient à Arameth.

Edeleon revint auprès de Cardone, le maître de tous, et parla d’Arameth.
Les voyageurs parfois l’avaient vue comme un rêve limpide, le soleil brillant sur ses citadelles et ses pyramides, au sommet d’une dune, puis les nuages étaient venus, ou un brouillard de sables ; personne ne l’avait jamais vu longtemps, personne n’en avait approché ; bien qu’une fois, il y eut quelques hommes qui purent s’en approcher vraiment, et la rumeur de la ville leur souffla au visage, un coup de vent isolé et soudain, puis plus rien. Ceux-là dirent que quelqu’un vendait des riches épices inconnues et des senteurs parfumées qui n’existaient pas en ce monde, qu’on y faisait le commerce d’idées et de secrets, qu’il y était échangé des énigmes et des chefs d’oeuvres.
Cette ville est la plus belle des merveilles ; le soleil crie de bonheur quand il la voit ; pour Arameth, le Soir pleure, quand il passe sur ses toits.

Et Edeleon conta combien d’honorables périls étaient rassemblés autour de la ville, dont le chemin n’était pas connu ; c’était aventure légendaire. Puis tous les guerriers se levèrent et chantèrent la splendeur de l’aventure. Et Cardone jura qu’il parviendrait, mort ou vif, à Arameth. Et quand il demanda à ses guerriers quand devaient-ils partir, tous répondirent
« Maintenant ! ».
Et Edelon prit la tête et chanta Arameth. Et ils allèrent en guerre contre le Destin.

Ils marchèrent, ils traversèrent contrées et territoires jusqu'à ce que la Nature se lève contre eux. De sombres bêtes emportaient les plus imprudents, le froid de la nuit et la chaleur du jour emportaient les plus faibles, le désespoir et la fatigue emportaient les plus sensibles, l’adversité et la mort emportaient finalement les plus terribles. Les autres résistèrent et Edelon chanta Arameth. Mais le Temps fit d’eux ses esclaves. Car leur voyage ne cessait pas, les rides sur leurs visages se dessinaient, et leurs forces s’amenuisaient. Et les plus âgés disparurent. Et désormais, Edeleon ne chantait Arameth que pour Cardone et lui-même.

Mais ils continuèrent leur chemin, et bientôt leurs barbes devinrent terriblement blanches. Ils avaient voyagé loin, à la dure ; il était temps pour eux de se reposer de leur labeur et de rêver, dans un sommeil léger, des années qui furent et non point de celles qui seront.
Longtemps ils regardèrent vers le sud, et le soleil se coucha sur des mondes plus lointains encore, les vers luisants allumèrent leurs lanternes, et l’inspiration d’Edeleon se leva pour l’abandonner à jamais, pour aller contenter -qui sait- les rêves d’hommes plus jeunes.

Et Edeleon dit :

« Maître de tous, je ne sais plus le chemin d’Arameth. »
Et Cardone sourit, comme sourient les vieux, sans grande joie et il dit : « Les années passent sur nous comme d’énormes oiseaux que le Sort et la Destinée ont levé de je ne sais quel vieux marécage gris. Et il se peut fort que contre cela aucun guerrier ne puisse lutter, que le Destin soit notre conquérant, et que notre quête a échouée. »
Après quoi ils ne parlèrent plus. Ils tirèrent leurs épées, et côte à côte descendirent dans les landes, cherchant toujours Arameth.

On crois qu’ils n’allèrent pas bien loin, car il y avait un grand et long désert mortel plus loin dans ces landes, et une chaleur qui durait plus longtemps que les jours, et des bêtes effroyables faites à ces contrées. En tout cas, il n’est aucune légende, qu’elle soit en vers, ou dans les chansons des gens, qui parle d’un héros parvenu en Arameth.


Il faut dépenser le mépris avec une grande économie, à cause du grand nombre de nécessiteux.

 
Nelle

Le Sukra 10 Manhur 1508 à 00h05

 
Encore une journée radieuse... Décidément, le beau temps semble lui aussi être au rendez-vous du congrès, pour le plus grand bonheur des habitants de Lerth et de ses visiteurs.

Nelle s'engage dans les rues de Lerth avec un ravissement d'enfant. Et pour cause : elle avait à peine huit ans lors du dernier congrès, et le souvenir de cette journée passée à écouter les propages et autres conteurs improvisés à tous les coin de rues reste un de ces préférés.
Il ne lui semble d'ailleurs pas si lointain, et bien que propage à son tour, de fraiche date cependant, Nelle envisage avec la même ferveur que dix ans plus tôt de passer une nouvelle journée peuplée de contes et de récits passionnants...

Et elle n'est pas déçue : après la chanson de Samael relatant les évènements du concile, Nelle écoute avec attention le récit de Randall, dans lequel elle reconnaît aisément les protagonistes.
Continuant son chemin déambulatoire dans les ruelles tortueuses du centre-ville, elle se joint au groupe qui s'est rassemblé autour d'Erling, et c'est avec une vive émotion qu'elle l'écoute relater l'épisode ou son père trouva la mort...
Elle le salue d'un discret signe de tête puis s'éloigne de nouveau à la recherche d'autres récits, pour finalement voir son attention attirée par un nouvel attroupement se formant au pied d'une fontaine.

Nelle s'approche curieusement en détaillant le tydale maniéré dont le visage lui est totalement inconnu, et dont la magie de la symbiose lui révèle rapidement qu'il s'agit du diplomate de la Confrérie. Jemori Colcook.
La curiosité de la jeune tchaë s'en trouve renforcée, et elle s'installe auprès d'un vieux Serviteur du corps tydale qui a l'amabilité de lui traduire au fur et à mesure le récit en ssarknesh.

Lorsque celui-ci s'achève, Nelle ne peut retenir le commentaire spontané qui lui échappe des lèvres à voix haute, tandis qu'elle se relève joyeusement :


Moi, j'espère bien que j'irai, à Arameth !

En ce jour, malgré sa robe chic et sa coiffure soignée, Nelle est redevenue une petite fille émerveillée...


 
Thymias Silberzauberer

Le Sukra 10 Manhur 1508 à 18h51

 
*** Thymias s'était confortablement installé dans un coin tranquille. Le Gardien baignait dans la fumée que sa pipe dégageait. D'où il était, il n'était gêné par personne et ne perdait pas une goutte des récits.

Les yeux fermés, ce délicieux goût de tabac à pipe dans la bouche et baigné par la lumière bienfaisante du soleil, le vieux Tydale laissait vagabonder son esprit.

Les vers de Samael, les récits de voyage de Randall et d'Erling, le récit d'une légende d'un inconnu, tout ceci stimulait l'imagination.

Uldmenya...Syrinth...Jypska...Kryg sa ville natale...Arameth...

Thymias revivait sa jeunesse. Aujourd'hui, le vieux psychagogue passait son temps à Lerth entre son bureau à la mairie et la bibliothèque, mais plus jeune, lui aussi avait voyagé. Ces souvenirs enfouis au plus profond de lui même ressurgissaient. Sa jeunesse au matriarcat, sa fuite du harem pour ne pas devenir reproducteur, son voyage à travers Syfaria, sa rencontre avec un propage, sa conversion, son apprentissage, son retour sur les routes pour à son tour propager les paroles du S'sarkh, et enfin sa vie comme anatomiste et médecin à Lerth, tout lui revenait, parfois avec douleur, parfois avec plaisir.

A présent, le voyage faisait peur à Thymias, il n'était plus d'un grand courage et les rhumatismes commençaient à se faire sentir, mais les propages étaient là pour pallier un peu à cette vie de sédentaire du gardien.

Il revoyait des paysages, des villes, des bâtiments, des personnes croisées ici et là. Le Gardien de la Communauté esquissa un sourire, une larme coula le long de sa joue pour venir se noyer dans sa barbe...
***

 
Jemori Colcook

Le Luang 12 Manhur 1508 à 01h59

 
***
Son récit terminé, le chamarré Tydale releva les yeux sur l'attroupement qui lui faisait face, et plus particulièrement une jeune fille.
Ne voulant commettre l'affront -plus à lui même qu'à autre chose- de s'exprimer dans une langue qu'il ne maîtrisait pas à la perfection, le Confrère ne dit rien.
Il se contenta de sourire.

Et si le sourire qu'il présenta à jeune demoiselle était au premier abord chaleureux et amical, il en fut rapidement autrement, un sourire qu'on aurait pu prendre pour narquois ou rieur, mais en realité, qui ne l'était pas.
Non, ce sourire était un défi, lancé non pas à l'étrangère, ni à la jeune Tchaë, mais simplement à la parcelle d'existence qui lui faisait face.

Puis, aussi subtilement que le sourire avait changé, il redevint simple sourire parmi tant d'autres, trompe l'oeil et facétieux.

Le Diplomate maniéré se releva et salua d'une révérence.
***


Il faut dépenser le mépris avec une grande économie, à cause du grand nombre de nécessiteux.

 
Nelle

Le Merakih 14 Manhur 1508 à 19h10

 
Ne semblant pas remarquer le changement subtil qui s'opère dans le sourire du tydale, Nelle lui adresse en retour un visage affable et plein de candeur, encore envoûtée par la magie des divers récits qui s'enchaînent.

Comme le diplomate n'a pas commenté ou répondu -autrement que par ce sourire- à l'exclamation qui lui a involontairement échappé, elle en déduit qu'il ne parle sans doute pas le ssarknesh, et comme elle ne connait pas le moindre mot de tydale ou encore moins de rabaan, elle en conclut que leur échange va manifestement devoir s'arrêter là.

Elle se rappelle qu'Erling a dit le connaître, mais celui-ci est sans doute en train de répéter son récit devant un nouvel auditoire...
Les occasions de se faire présenter le chamarré chambellan ne manqueront sans doute pas, de toute façon.

Un léger salut de la tête, et la jeune tchaë s'éloigne à la recherche de nouvelles histoires à écouter.

Bien que propage, il ne lui vient absolument pas à l'esprit d'endosser elle-même le rôle de conteur...


 
Arkana Voroshk

Le Merakih 14 Manhur 1508 à 20h40

 
Arkana était venue assister au récite. La Tydale, habillée d'une robe sombre, droite et simple, se tenait très légèrement à l'écart du groupe de badaud amassé devant les divers conteurs, assise sur un petit banc de bois. Les mains croisés sur les genoux, sa longue mèche défaite, la Némésis avait troqué son apparence de guerrière pour des atours plus féminins. Les quelques bijoux qu'elle arborait -bracelets et colliers fins d'argent- témoignaient de l'effort.

La Voroshk écoutait calmement les mots s'écouler de la bouche des narrateurs, fermant parfois les yeux pour mieux en extraire l'essence, la portée et le goût. Par deux fois, un évanescent sourire s'épanouit sur ses lèvres avant que l'expression d'impassibilité de la Matriarcale ne reprenne le dessus.

Arkana goutait visiblement au divertissement et trouvait l'apaisement dans les saveurs de voyage que propageaient les Témoins.



 
Samael

Le Merakih 14 Manhur 1508 à 22h29

 
Samael avait parcouru quelques ruelles et il trouva s'installa devant une taverne cette fois ci. Attirant l'attention sur lui en jouant un enchaînement complexe sur son Sitar. Le Propage capta l'écoute et le silence de son auditoire, la foule se rassemblait déjà avide d'entendre une nouvelle histoire. Samael déclara d'une voix puissante :

Oyez Oyez mes amis ! En ce jour de fête ! Je vous trouve pour beaucoup attablé devant un breuvage noble mais peu d'entre vous ne s'est jamais posé la question des origines et de la création de la bière. Adonc je m'en vais vous conter une vieille légende, moi qui sait. Ecoutez donc le chant de la Bière.

Le Nelda fait une pause et joue quelques accords sur son Sitar pour accompagner son histoire.

Bière, la bière est née de l’orge, du houblon godon la godaille,
Mais n’ira point naître sans l’eau, ni sans flambée de feu cruel.

Houblon, tout blond, fils du Tapage, on l’a piqué tout maigre en terre,
Planté petite fourche en terre, l’a semé comme un grain d’ortie
Chez Kaleva, prés de son puits, sur le talus du champ d’Osmo.

Jeune germe il a levé vite, fors la terre en brindille verte :
L’arbrisson bientôt s’est ouvert, c’est le houblon de haute cime.
Le vieux du bon sort sème l’orge, à l’orée du champ neuf d’Osmo.

L’orge a poussé de belle tige, il grandit de belle houppière,
A l’orée du neuchamp d’Osmo, dans l’essart du fils Kaleva.

Le temps passe, une once de jours, le houblon chuchote dans l’arbre,
L’orge bavarde dans le champ, l’eau dans le puits de Kaleva :
« A quand le jour de nous unir, jour d’accord pour notre mélange ?
Solitaire la vie est triste, plus douce à deux, si belle à trois. »

Osmotar, brasseuse de bière, Kapo, la fabre des cervoises,
Egrène à l’épi les grains d’orge, dans sa paume six grains de l’orge,
Sept boutons de houblons poudrés, huit poches d’eaux claires puisées ;
Boute la marmite à la flamme, met le mélange à mijoter.

Ainsi cuit la bière de l’orge tout un soleil de l’été bref,
A la pointe du cap en brume, au bout de l’île envaporée,
Dans une seille de bois neuf, le baquet de bouleau cerclé.

Or elle a mitonné la bière, mais ne sait point la fermenter.

Elle songe, la belle, et pense, elle dit les mots que voici :
« Que vais-je mêler au baquet, mélanger à l’eau de la seille,
Pour le franc ferment de la bière, le bon levain de la cervoise ? »

Kalevatar, la vierge belle, doigts jolis, les fines menottes,
Toujours en gestes de glissades, Kalevatar le pied menu
Trotte et court du mur au chevêtre, elle arpente lierne et plancher,
S’affaire ici, juponne là, veille d’une marmite à l’autre.

Sur le plancher voit une écharde :
Elle cueille l’écharde au sol,
La lorgne, la tourne en menotte :

« Que deviendra l’écharde blanche, dans la main de Kapo la belle,
Les arteils de la bonne vierge, si je la porte dans sa main
aux doigts de la bonne pucelle ? »

Et la porte aux mains de la belle, aux doigts de Kapo la pucelle.

Kapo la serre en ses deux paumes, la frotte en ses deux mains fermées
Sur une cuisse, et l’autre cuisse ; l’écureuil jaillit, torche blanche.

Elle conseille ainsi son fils, elle guide son écureuil :

« Ecureuil, jaunet des collines ! cours t’en vite où je te commande,
Où je te somme, où je te mande :
A Metsola, la forêt douce, Tapiola le bois des aguets !

Grimpe dans l’arbre tout menu, griffe haut la cime touffue,
Que l’aigle n’aille t’empoigner, ni te cogner, l’oiseau de l’air !

Porte les pignes du sapin, les glumes du pin toutes dures,
Mets les dans la main de Kapo, dans la cervoise d’Osmotar ! »

Or l’écureuil sait bien courir, toupillon de queue il tourbille,
Bientôt vole à son long voyage, Jacquet court le trajet sans halte,
Par une breuil, une autre breuil, il passe un peu de biais la tierce,
Jusqu’à Metsola, forêt douce, Tapiola, le bois des aguets.

Il voit trois sapins de maubois, quatre pins de ramée petite ;
Il grimpe au sapin dans la noue, dans le trochereau de la lande.

Et l’aigle ne l’a pas serré, ni méhaigné, l’oiseau de l’air.

Il casse les pignes du pin, coupe les billes du sapin ;
Les musse, pignes dans ses griffes, les entortille dans ses pattes ;
Il les porte aux mains de Kapo, dans les doigts de la bonne vierge.

Kapo les mélange à la bière, Osmotar, au moût de la cervoise ;
La bière n’en fermente guère, Nul levain pour la potion fraîche.

Osmotar la fabre de bière, Kapo, brasseuse des cervoises,
La pucelle songe et demande : « Que vais-je mêler dans la seille
Pour le franc ferment de la bière, ce bon levain de la cervoise ? »

Kalevatar, la vierge belle, doigts jolis, les fines menottes,
Toujours en gestes de glissades, Kalevatar au pied menu
Court le chevêtre du plancher, elle trottine sur la lierne,
S’affaire ici, juponne là, elle épie la marmite et l’autre ;
Sur le plancher voit un copeau ; elle cueille au sol le copeau.

Le lorgne, le tourne en menotte : « Que sera le copeau gisant,
Dans les mains de Kapo la belle, dans les doigts de la bonne vierge,
Si je le porte dans sa main aux doigts de la bonne pucelle ? »

Et le porte aux doigts de la belle, aux mains de Kapo la pucelle.

Kapo la serre en ses deux paumes, la frotte en ses deux mains fermées
Sur une cuisse, et l’autre cuisse ; la martre jaillit, gorge d’or.

Elle conseille ainsi la martre, elle guide son orpheline :
« Martre, martre, petit oiseau, poil de prix, ma belle fourrure !

Trotte vite où je te commande, où je te somme et je te mande :
A la caverne du grand brun, le logis du Placide en forêts,
Les Placides là-bas font leur chamaille, les grands bruns mènent fort tapage !

Ramasse la bave à tes paumes, a mains pleine écope la mousse,
Mets-la dans la main de Kapo, dans la cervoise d’Osmotar ! »

La martre sait bien détaler, se faufiler, la gorge d’or.

Bientôt s’en trotte en longue route, elle court le trajet sans trêve,
Passe le gué, l’autre rivière, passe la tierce un poil de biais,
Jusqu’à la caverne du brun, la chambre en rocaille du Placide.

Là-bas les Placides sont en bataille, les grands bruns mènent leur tapage
Sur le rocher fourré de fer, la colline aux versants d’acier.

La bave coule aux crocs du Placide, la mousse, de sa gueule affreuse :
Elle écume à sa main la bave, cueille la mousse à pleine paume ;
Puis la porte aux mains de Kapo, entre les doigts de la pucelle.

Kapo la verse dans sa bière, Osmotar, au moût de cervoise
Songe, et pense, elle se tracasse : « Que vais-je verser dans la seille
Pour le ferment de la cervoise, le levain léger pour la bière ? »

Kalevatar, la vierge belle, doigts jolis, les fines menottes,
Toujours en gestes de glissades, Kalevatar au pied menu
Trotte au chevêtre du plancher, court sur le pont, passe la lierne,
S’affaire ici, juponne là, veille de potière en marmite.

Sur le plancher voit une cosse, se penche et ramasse la cosse.

La lorgne, la tourne en menotte : « Que sera la cosse gisante
Dans la main de Kapo la belle, aux doigts de la bonne pucelle,
Si je la porte dans ses mains, aux doigts de la bonne pucelle ? »

Et le porte aux doigts de la belle, aux mains de Kapo la pucelle.

Kapo la serre en ses deux paumes, la frotte en ses deux mains fermées
Sur une cuisse, et l’autre cuisse ; Mehila jaillit, c’est l’abeille.

Elle conseille son oiseau, elle guide la bonne abeille :
« Belle abeille, mon oiseau lisse, reine des fleurs dans la prairie !

Vole t’en vite où je te demande, où je te somme et je te mande :
Sur l’île du mitan de la mer, parmi les brisants de la vague !
Il est une fille assoupie, teinture de bronze endormie,
Sur sa hanche l’herbe est sucrée, la fleur de miel à son giron.

Cueille la miessée sur tes ailes, apporte le miel dans ta cape
De la pointe de l’herbe frêle, le calice de la fleur d’or ;
Mets le dans la main de Kapo, pour la cervoise d’Osmotar ! »

Or donc l’abeille, l’oiseau lisse, vrille son vol, file dans l’air.

Vite vole la route longue, voltige le trajet sans trêve
Par une mer, une autre mer, un grain de biais la marée tierce
Jusqu’à l’île au mitan des vagues, parmi les brisants de la mer.

Elle voit la fille endormie, la gorge d’étain sommeillante
Dans la prairie, le pré sans nom, sur le talus du champ de miel,
A son coté l’herbe est dorée, tige d’argent sur sa ceinture.

Elle mouille son aile au miel, dans la miessée trempe sa plume
Sur la pointe de l’herbe frêle, le minois de la fleur dorée ;
Puis le porte aux mains de Kapo, aux doigts de la bonne pucelle.

Kapo le met dans la cervoise, Osmotar l’égoutte à sa bière :
La bière en fermente à cœur joie, la boisson fraîche lève dru
Dedans la seille aux douves neuves, le baquet de bouleau cerclé ;
Elle bouillonne au ras des anses, se rue blanche par-dessus bord,
Elle veut déferler par terre, libre couler sur le plancher.

Le temps passe, une once de jours, un brin de temps pousse et s’envole :
Les gaillards ont lampé la bière, Lemminka l’entonne à l’abus :
Ahti gris, kauko s’enivre, coquin rougeaud se grise et saoule
Par la cervoise d’Osmotar, la bière de Kalevatar.

Osmotar, la fabre des bières, Kapo, brasseuse des cervoises
Ainsi parle et dit sa complainte : « Ô misère, jour gris, jour noir,
J’ai brassé la bière mauvaise, j’ai fait la cervoise effrontée :
Elle se sauve du baquet, bave en vagues sur le plancher. »

Le bouvreuil a chanté dans l’arbre, la grive au rebord du larmier :
« La cervoise n’est point méchante mais bière de bonne bombance,
Va-t’en la vider en futailles, dans le cellier qu’elle fermente,
Dans la tonne aux douves de chêne, serrée dans les feuillards de bronze. »

Ainsi nous est née la cervoise, bière des fils de Kaleva ;
Elle est cervoise bien nommée, bière belle par sa famée,
Car elle mène la vie bonne pour la soif des gens de guenille ;
Ride la bouche en rire aux femmes, elle met l’homme en bonne humeur,
La gent de guenille en gaieté, en gigue les fous qui se grisent.

La patronne de Pohjola quand elle ouït le dit de la bière,
Trotte et bonde un grand baquet d’eau, le cuveau neuf jusqu’à mi douve,
La dedans l’orge pour la bière, et mainte cosse du houblon.

Puis commence à brasser la bière, elle tourne et touille l’eau forte
Dans la seille aux douves nouvelles, le baquet de bouleau cerclé.

Lune et lune on chauffe les pierres, été sur été l’eau mijote,
On a brûlé des breuils de bois, épuisé maint puits d’eau puisée :
Déjà les breuils souffrent pelade, eau rare les sources tarissent,
Car on mitonne les cervoises, on brasse à pleins baquets la bière,
Pour les longs festins de Pohja, les ripailles des bons compères.

La fumée volute sur l’île, le feu flambe aux brisants du cap.

Fumée grasse, la corde épaisse brume bers l’air en fumerolles
Montées des brasiers effarants, flambées blanches du feu nourri :
Elle couvre à moitié Pohja, noircit toute la Carélie.

Le peuple alentour s’ébahit, baille au ciel, guigne l’œil songeur :
« Or çà, d’où monte la fumée, la brouée blanche vers le ciel ?
Fumée de guerre ? bien trop maigre. Flambée de berge ? Par trop grande. »

Or la mère de Lemminkä, dés l’aube, aux lueurs de l’aurore,
Trotte à la source puiser l’eau ; voit la fumée, la torche épaisse
Par-dessus le pays du nord. Fronce sourcil, puis parle ainsi :
« Ce sont bien des fumées de guerre, traînée blanche, brume aux batailles ! »

Ahti, le fils de Saarela, Kaukomieli le bel, tourne les yeux, guette le ciel.

Ahti pense, Lemminkä songe : « et si j’allais ramper au guet,
Tout prés du feu pour rebeugner d’où se dresse la fumée-là,
La brume gonflée dans le ciel, vois si c’est la fumée de guerre,
La flambée d’avant les batailles. »

Kauko rampe vers l’aguets, au nid de la fumée levante ;
Ce ne sont point des feux de guerre ni flambées d’avant les batailles ;
Ce sont les feux pour la cervoise, la flambée sous le moût de bière,
Dans le goulet de Sariola, à l’abri de l’estran du cap.

Or donc Kauko guette et lorgne…Kauko guigne, l’œil bigleux,
Un œil louche, l’autre bigleux, et la bouche un peu de ginguois.

Il parle l’œil écarquillé, il braille devers le goulet :
« Belle mère, ma tendre mère, bonne dame de pohjola !
Apprête la bière épatante, brasse la cervoise corsée,
Pour la soif de la troupe grande, brasse pour Lemminkä surtout,
Pour les ripailles de sa noce, avec ta fillette, la jeune ! »

Ainsi la bière est bien brassée, prête à boire.
On entonne la bière rouge, cervoise belle, on la démène
Qu’elle gît dessous la terre, dans le cellier de pierres fraîches,
Dans la tonne aux douves de chêne, serrée devers la bonde en bronze.



A la fin de sa longue légende, le Nelda est assis en tailleur sur le sol, le Sitar sur la cuisse. les notes se sont égrenés doucement pour égailler le long récit. Autour de lui le public est silencieux et un groupe d'enfants est accroupi au premier rang buvant les paroles du Propage. Samael termine donc d'une voix douce et se relève tranquillement. Une fois debout, le Nelda s'incline devant son auditoire en remerciement.




HRP : Texte adapté d'après le Kalevala, l'épopée des Finnois par Elias Lönnrot.


Appelez moi Charogne, et je vous appellerai Cadavre.

 
Nuruhuinë

Le Dhiwara 18 Manhur 1508 à 18h14

 
*** Par les rues de la Scintillante, Nuruhuinë flânait et s’abreuvait des histoires racontées aux quatre coins de la cité. Samael était un conteur hors paire et sa légende sur la bière une vraie merveille. C’est finalement au pied d’une fontaine qu’elle trouva son bonheur. Un dandy chatoyant évoquait la Perle. S’approchant de plus près, elle crut reconnaître un tydale qu’elle avait croisé dans les faubourgs d’Arameth, mais elle n’en était plus très sûre. Ce qui l’était par contre, c’est son envie d’y retourner et que le rêve devienne enfin réalité. Un long soupire, le nez dans les nuages, la petite tydale s’en retourna vers la Mission. ***




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